Tous Coupat, tous coupables : Le moralisme antiviolence
de Alain Brossat

critiqué par Aubécarlate, le 11 avril 2011
( - 42 ans)


La note:  étoiles
S'indigner ne suffit pas, il faut frapper!
Il y a comme un consensus assez inquiétant autour de la question de la violence. Tout le monde rejette la violence, la disqualifie moralement. Mais voilà, le problème est que la violence est toujours le fait de l’autre. Quelle que soit l’origine du discours (gauche radicale, droite, ONG, etc.) la violence est condamnée. Toutefois en creusant un peu, il y a des violences acceptées : les violences policières et carcérales pour les conservateurs, les séquestrations pour les gens de gauche. Tous veulent que ces actes ne soient pas qualifiés de violents : ils sont des défenses contre d’autres violences, vraies celles-là.

Avec des textes courts et saisissants mais parfois difficiles (l'auteur est un philosophe) Brossat dénonce le moralisme anti-violence, qui brouille les notions. Entre hypocrisie et validation du système en tant que tel, les anti-violences cachent leur violence propre derrière leur propre petit doigt.

Or, il convient d’assumer la violence. Face à un Etat (toujours par principe oppresseur puisque structure de pouvoir séparé des citoyens) la violence est toujours légitime mais jamais nécessaire : cette formule de Zizek retourne la classique : la violence n’est jamais légitime mais parfois nécessaire. Pour Zizek, la violence est question de tactique mais sa légitimité est toujours là.

Quoi qu’il en soit, dans cet ouvrage, Brossat, montre que le consensus antiviolence conduit à accentuer l’hystérie sécuritaire et à gonfler les condamnations de ceux qui s’opposent au système capitaliste.
Revenant sur la triste affaire Tarnac, où nos dirigeants ont montré à la fois la nullité de la procédure pénale, la justice aux ordres, l’arbitraire des sanctions, la vilénie des lois anti terroristes, et la cruauté de la condition carcérale, Brossat affirme qu’un citoyen un tout petit peu éclairé a plus à craindre du gouvernement que des prétendus terroristes.
Mieux encore, plutôt que de dire que les jeunes de Tarnac n’ont pas commis de violence (et par là se situer dans la perspective intellectuelle des antiviolences), affirmer que oui, ils sont ultra violents car rebelles à l’ordre ambiant, et que nous aussi nous validons cette violence !