Retour aux mots sauvages
de Thierry Beinstingel

critiqué par PA57, le 17 avril 2011
( - 41 ans)


La note:  étoiles
Un roman actuel et moderne
"Eric", c'est le prénom qu'a choisi le "héros" de ce roman comme pseudo. En effet, électricien de métier, après plusieurs années passées à travailler dans son corps de métier, dans une société de télécommunications, il est muté et travaille désormais en tant que téléopérateur. Il ressent un véritable mal-être, que personne ne comprend. Il est déshumanisé, les réponses qu'il donne aux clients sont notées sur un écran d'ordinateur. A la même époque, une série de suicides dans le même entreprise commence à créer des remous dans la presse. Lassé, un jour, il décide d'aider vraiment un client, en le rencontrant. De plus, il essaye de s'oublier en allant courir aussi souvent que possible.
Sans décrire réellement avec des mots l'horreur, Beinstigel arrive à nous le faire ressentir à travers son personnage. Le roman est court, avec des phrases courtes, mais efficaces. Néanmoins, je trouve qu'il lui manque un quelque chose qui en ferait un chef d'oeuvre.
Et toujours d'actualité. 9 étoiles

Il a passé des années dans un grand groupe de télécommunications, comme électricien. Un boulot manuel, un boulot d'équipe de copains. Et puis restructuration oblige, le voilà maintenant téléopérateur sur une plate forme téléphonique. Un boulot de parleur, un boulot d'anonyme où tu n'existes pas. Tu as même un faux prénom. Tes "clients" n'ont ni âme ni visage et ce n'est même pas ta voix qui leur dit bonjour. Et puis un jour tu n'en peux plus, malgré les consignes tu rappelles cette voix caverneuse qui t'assure qu'il a bien payé sa facture, début d'une histoire d'amitié. Et puis ces suicides dans le groupe, encore et encore. Lui il court, il écrit, il essaie de vider cette tête dans laquelle sans cesse grésillent les appels, les insultes, les grossièretés, les objectifs à atteindre. Un livre court mais saisissant sur cette violence au travail, faite d'anonymat et de déshumanisation. "Rien n'est à toi, tu ne vaux pas un seul centime, tu appartiens à la société anonyme". C'est pas d'aujourd'hui et pourtant de plus en plus actuel, de plus en plus sournois, de plus en plus dévastateur. Thierry Beinstingel est cadre dans les télécommunications. Il sait de quoi il écrit.. on a tous reconnu le groupe. Hélas. Un livre poignant, chronique d'un travailleur ordinaire.

Lectio - - 75 ans - 27 mai 2014