Marco Polo les voyages interdits Tome1
de Gary Jennings

critiqué par Hamilcar, le 10 mai 2011
(PARIS - 69 ans)


La note:  étoiles
Vers l'Orient
Marco Polo est sur sa fin. Ses aventures retranscrites par Luigi Rustichello de Venise ont fait état de toute cette bravoure qui a mené ce voyageur vénitien auprès de Kubilaï Khan, chef mongol et empereur de Kithai (Chine), petit fils de Genghis, le Khan de tous les Khans. Nous sommes au 13° siècle et l’épopée de Marco a depuis, fait le tour du monde.
Sauf que Marco Polo n’aurait pas tout dit à son biographe. Dans une geôle génoise où tous deux se retrouvent enfermés, Marco confie à Luigi qu’il n’a révélé que la moitié de ce qu’il a vu ou fait, affirmation déjà livrée à son autre biographe, Jacopo d’Acqui.
Mais quel est le secret de Marco ? Luigi pensait-il que son œuvre, « les Devisements du Monde ou les voyages de Marco Polo» était d’une fidélité sans contestation possible avec la réalité de ce qu’avait vécu Marco ? Certes, il doit y avoir de la sincérité dans cet ouvrage. Mais, que la moitié ? Qu’est ce que Marco ne lui a pas dit ?
Gary Jennings part de ce concept pour élaborer un livre dans lequel Marco Polo devient son propre biographe pour dire ce qu’il n’a pas dit. Partant du principe que dans ce siècle tout n’était peut être bon à confier, il nous réserve presqu’en catimini des confidences que l’on finit par prendre pour réelles. Elles sont, en grosse majorité, de nature libertine. Elles pourraient même choquer et renvoyer dans les enfers le pauvre Rustichello s’il eut consenti à la pure narration des faits.
Partant de là se déroule le récit dans lequel le jeune Marco découvre les choses de la vie dans les bas fonds de Venise, se retrouve impliqué dans une affaire de meurtre dont il n’est qu’un artifice involontaire, avant de prendre la route sous l’égide de son père Nico et son oncle Mathéo pour la route de la soie, ce qui l’amènera à d’autres aventures picaresques et bien souvent salaces.
Outre de nombreuses scènes que la morale pourrait réprouver, surtout au 13° siècle, Gary Jennings effectue un vrai travail d’anthropologue en décrivant des peuples et leurs coutumes, à travers une démarche géographique qui nous mène de Venise à Kithay (Chine), en passant par la Perse et les contreforts himalayens. Tout a été, comme nous l’avait déjà démontré l’auteur dans l’Empire des Barbares, étudié et enrichi de connaissances culturelles indéniables.
Certes, on pourrait reprocher à ce livre le côtoiement, dans plusieurs chapitres, avec des œuvres dites licencieuses, car Marco, jeune aventurier, découvre le monde sous toutes ses formes, ce qui justifie pleinement le titre « Les voyages interdits ».
On comprend alors le biographe qui n’aurait pu décrire les scènes torrides que nous confie Marco.
J’ai, bien évidemment, adoré ce livre. Je me suis retrouvé à voyager aux côtés de Marco, dans des pays, une époque et des rêves que seules les mauvaises consciences pourraient nous interdire.