Poussière de Rosamond Lehmann

Poussière de Rosamond Lehmann
(Dusty answer)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Jfp, le 3 septembre 2011 (La Selle en Hermoy (Loiret), Inscrit le 21 juin 2009, 76 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 10 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (2 199ème position).
Visites : 3 814 

proust made in england

Rosamond Lehmann avait probablement lu "A l'ombre des jeunes filles en fleur", paru en 1919 et immédiatement traduit en anglais, avant de composer cet étrange roman psychologique où l'on retrouve quasiment en miroir la petite bande de Balbec. Ici, nous sommes dans la campagne anglaise, où Judith, la narratrice, va s'éprendre d'un groupe d'amis installés dans la propriété voisine. Les personnages évoluent au cours du temps, certains mûrissent tandis que d'autre gardent leur âme d'éternel adolescent, et beaucoup d'illusions tombent au fil des amours et des amitiés sans cesse contrariées par la mort et l'éloignement. Roman "à scandale" à l'époque où il parut, cette évocation très libre des penchants avoués et inavoués d'une jeunesse oisive proche de l'aristocratie, constitue pourtant une fine analyse des sentiments humains, qui atteint à l'universel grâce à sa profondeur et sa sincérité. Admirablement rendue par la traduction de Jean Talva, la langue déploie toute sa saveur pour décrire la complexité des rapports amoureux.

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critique

10 étoiles

Critique de Proust19 (, Inscrit le 21 mai 2024, 68 ans) - 21 mai 2024

Poussière (Dusty answer) de Rosamond Lehmann.
Rosamond Lehmann dans son entretien de 1967 avait dit qu'elle n'avait pas lu Proust en 1927, c'est en effet étonnant tant la recherche des voix et la nostalgie sont proches de Combray et de Balbec.
Nous sommes dans un port de villégiature sur la Tamise à 50 km à l'ouest de Londres comme il est plusieurs fois expliqué dans le roman. Les maisons sont au bord de l'eau ce qui explique le rôle majeur joué par le fleuve dans ce roman.
Ce ne sont pas tant les éloignements physiques qui, après les deux premières partie, séparent Judith ceux qu'elle aime mais bien leurs sentiments (pour d'autres jeunes filles ou d'autres garçons) et également les sentiments de Judith elle-même. Même si ce n'est pas explicité, il faut chercher à comprendre. Le problème de la littérature est le même que celui des relations avec les autres : il faut réfléchir., il faut chercher à comprendre, il faut interpréter et ne pas rester à la surface de ce que dit Judith (ou la narratrice, car elles ne sont pas plus fusionnées que dans La Recherche, même si elles sont proches)..
Le penchant de Judith pour Jennifer pendant la troisième partie qui se passe à Girton Coillege, Cambridge, est tout à fait avoué. La narratrice, et dans son sillage Judith elle-même, avoue son amour pour Jennifer et décrit ,avec de nombreux détails l'amour de Jennifer pour elle. Même si Judith préfère un garçon, elle n'en ressent pas moins une passion dévorante pour Jennifer. C'est cette double passion qui est le "scandale" évoqué et non pas, comme on le dit toujours, une banalité idiote, l'homosexualité qui est totalement assumée.
Je trouve la traduction de Jean Talva catastrophique en ce sens qu'elle ne rend pas compte de la caractéristique majeure de la création littéraire de cette romancière admirée par tous à son époque (Virginia Woolf, Lawrence, Waugh, Forster etc). Le roman est raconté par une narratrice qui diffère de l'auteur car elle est impliquée totalement dans l'aventure de Judith, mais qui diffère aussi de Judith. Cependant le style de la narration fait qu'on est régulièrement perdu entre la voix de la narratrice et la voix de Judith, qui dit ou ne dit pas je. Cette subtilité, qui sera encore plus patente dix ans après dans The Weather in the Streets (Intempéries) ouvre la voie (et la voix) vers les expérimentations les plus profondes du roman (Anita Brookner et Nathalie Sarraute en particulier).
Poussière, que l'(on considère à tort comme un roman pour jeunes filles en raison de son succès international à l'époque, est un grand chef d'œuvre qui marque l'évolution du roman peut-être plus que d'autres livres des années 20. "Ce livre vous consumera entièrement, transformant la totalité de votre vie intérieure pendant le temps où vous le lirez" (Jonathan Coe 1995)

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