Nicolas de Staël
de Daniel Dobbels

critiqué par Kinbote, le 19 juillet 2002
(Jumet - 65 ans)


La note:  étoiles
Aux confins du plan vierge
Un livre composé en deux parties. D'abord un texte de Daniel Dobbels intitulé « L'âme des plans » (en référence à une citation de Cézanne) nourri des lectures de Char, Artaud, Deleuze , Derrida qui éclaire l’oeuvre du peintre et enchaîne les commentaires autour de quelques tableaux-clés : Nature morte au chandelier sur fond bleu, Les Mouettes, Nu couché, Les Indes galantes, Paysage marine.
Où on découvre un peintre habité par son métier, et qui révèle dans les extraits rapportés de la correspondance du peintre un remarquable écrivain.
La seconde partie propose cent reproductions en couleurs. La production est découpée en sections, en périodes qui montrent bien l'avancée du peintre jusqu'«aux confins du plan vierge », qui l’emportera finalement un certain 16 mars 55. L’effacement de la figure jusqu’à l’épure et ensuite son lent resurgissement dans des compositions aux larges aplats de couleurs vives, au sens de blessantes...
« Ma peinture , écrit-il, je sais ce qu'elle est sous ses apparences, sa violence, ses perpétuels jeux de force ; c'est une chose fragile dans le sens du bon, du sublime, c’est fragile comme l’amour… »
Enfin une chronologie. Elle nous apprend que Nicolas de Staël est né en 1914 à Saint-Pétersbourg d’un père militaire et aristocrate, qu'en 1919 sa famille émigre en Pologne et puis qu'après la mort de ses parents, en 1922, il est envoyé à Bruxelles où il suivra des études classiques et de peinture avant de voyager et de s'établir en France dans le milieu des années trente.

L’oeuvre de Staël reste encore peu connue du grand public.
En 53, il écrit : « La peinture seule reste en pleine aventure. » Cinquante ans plus tard, au moment où les « installateurs » ont pris les places fortes de l’art, cette phrase résonne comme un avertissement dont on n'aurait pas pris la peine mesure, une prophétie manquée, et une occasion sans pareille de la relancer, de la réaliser enfin.
Nous laisserons le dernier mot de cette note à René Char qui écrivait: "Staël a peint. Et s'il a gagné de son plein gré le dur repos, il nous a doté, nous, de l'inespéré qui n'a rien à voir avec l'espoir"