Rural ! Chronique d'une collision politique
de Étienne Davodeau

critiqué par Jean Loup, le 22 juillet 2002
(Vaulx en Velin - 51 ans)


La note:  étoiles
Bande dessinée-reportage
Le récit commence dans l'urgence. On voit un olibrius se ruer hors de chez lui, enfiler sa botte sur le perron, sauter dans sa voiture et foncer à travers champ. On découvre ensuite que l'olibrius en question, c'est Etienne Davodeau, l'auteur du livre. Et s'il est si pressé, c'est tout simplement parce qu'il a été prévenu qu'une vache allait mettre bas. Davodeau n'est pourtant ni vétérinaire ni agriculteur : il est un simple observateur de la vie quotidienne de trois paysans qui ont accepté d'être suivis pendant un an. "Rural !" n'est donc pas une fiction : Davodeau raconte le réel. Ces trois paysans qui ont choisi de faire de la production laitière bio. Ce couple qui a retapé sa maison pendant ces années pour apprendre finalement qu'une nouvelle autoroute allait passer dans leur jardin. Ces petites mesquineries et ces grandes injustices qui expliquent le tracé de ladite autoroute, pour le moins étrangement sinueux. Ce sont tous ces petits détails, ces morceaux de vie, drôles ou déchirants, que Davodeau retranscrit. Avec un réel talent, il explore une contrée quasiment inexplorée de la bande dessinée : celle du reportage. Oh, certes, "Rural !" se vendra sans doute beaucoup moins bien que le dernier Michel Vaillant, mais son intérêt pour le lecteur est tellement incomparable que cela en devient gênant pour Graton... La préface de
José Bové souligne le caractère particulier de cette bande dessinée, engagée dans la lutte pour une agriculture raisonnée sans tomber dans la propagande : il vaudrait mieux parler de simple bon sens, voire de civisme. Ce dont vous ferez preuve en achetant cette bande dessinée originale et réussie.
Une autre voie est possible 8 étoiles

Etienne Davodeau, familier de la BD documentaire, raconte ici l’histoire du projet autoroutier Angers-La Roche-sur-Yon vu depuis un petit coin de campagne, insignifiant aux yeux des promoteurs, un projet absurde impliquant un tracé aux étranges sinuosités dont les causes pourraient bien être liées à la politique locale… C’est l’éternelle fable du progrès qui est décrite, avec deux visions antagonistes qui s’affrontent : la lenteur et la qualité de vie contre la vitesse et les nuisances environnementales. Evitant l’écueil de la culpabilisation du lecteur et en suivant de jeunes paysans tournés vers le bio, Davodeau tente avec subtilité de susciter la réflexion autour d’une problématique : dans quelle société voulons-nous vivre ? Sommes-nous prêts à ce qu’un paysage et ses habitants soient sacrifiés pour nous permettre de gagner dix minutes de temps de trajet ?

Davodeau a parfaitement réussi avec cette enquête qu’il a menée autant comme journaliste que dessinateur, allant au contact de ces gens, héros du quotidien, et partageant leur repas à la bonne franquette. Il y a intégré sa sensibilité d’artiste, mêlant humilité, humour et poésie, insufflant ainsi une certaine légèreté à un sujet grave et a priori pas très exaltant…Pas de doute, Davodeau sait raconter les histoires, tout en faisant appel à l’intelligence et à l’humanisme de ses lecteurs.

Blue Boy - Saint-Denis - - ans - 14 juillet 2012


Rural, social, syndical. 7 étoiles

L'estampille Bédé élue par les verts et une préface de Josè Bové ne sont pas une bonne entrée en matière poour m'attirer à lire ce genre de livre. J'outrepasse toutes mes idées préconçues et me lance dans la lecture. Sympathique ces paysans pleins d'espoirs et de bonnes résolutions environnementales. Ces babas-cool expropriés par le méchant lobby autoroutier. Une bédé partisane qui met en avant les difficultés d'un monde paysan adepte de la confédération paysanne. L'auteur s'est immergé une année au sein d'une GAEC pour faire son livre. On sent l'investigation, la camaraderie, la bonne ambiance à la fortune du pot. L'écueil c'est de faire croire que les méchants sont en face. Et puis culpabiliser le lecteur qui va emprunter l'autoroute et d'une certaine manière participer au démembrement de la campagne, je trouve cela limite. Néanmoins une bonne bédé qui fait raisonner et donne au lecteur la possibilité d'aller voir au delà de l'arbre qui cache la forêt. A lire.

Hexagone - - 53 ans - 4 avril 2010


Expropriation 8 étoiles

Le tracé est sans appel : les ASF vont couper l'exploitation agricole en deux, d'un coup rectiligne d'autoroute.
Cette BD "tranche de vie" retrace la vie paysanne, le drame de l'expropriation, les arbres si chers abattus pour faire passer les voitures devant les enfants en pleurs...

C'est une BD émouvante, que j'ai longtemps hésité à emprunter à ma bibliothèque municipale, le gros logo "José Bové" avait été pour moi un élément répulsif et on se demande encore quelle idée d'avoir fait cela. C'est dommage que ce si bel album soit ainsi "étiquetté". Il n'en avait pas besoin.

Happy_kangourou - - 49 ans - 9 juin 2008