Le petit livre bleu - Analyse critique et politique de la société des schtroumpfs
de Antoine Buéno

critiqué par Veneziano, le 21 octobre 2011
(Paris - 47 ans)


La note:  étoiles
Un gag aimable de politologue
Politologue, enseignant et conseiller d'un groupe parlementaire, Antoine Buéno, non sans humour et mauvaise foi assumés, nous livre une analyse politique et sociale des Schtroumpfs, en appliquant des critères de lecture à ce qui ne devrait pas l'être a priori, une société, utopique et autarcique, certes, mais avant tout destinée au divertissement des enfants.
De là, fatalement, vu la méthode employée, il en tire des conclusions effarantes, bien qu'un peu moins qu'elles en aient l'air : outre le caractère utopiste et autarcique de cette société, elle serait de type collectiviste, ce qui peut être soutenu, voire franchement communiste, à l'économie pré-industrielle, agraire et artisanale. Par ailleurs, elle porterait les symptômes du stalinisme, du fascisme et du nazisme, par son caractère intrinsèquement raciste. Son caractère autoritaire vient de son caractère corporatiste et de son absence de corps intermédiaires entre le Chef et la population. De surcroît, ce régime serait gérontocratique et sa société misogyne.

Evidemment, l'auteur de la bande dessinée, Peyo, n'a pas voulu, ni même songé, insérer de tels éléments, même de manière subliminale, dans une série destinée, avant tout, aux enfants. Néanmoins, il peut être facilement montré qu'elle reprend une série de clichés de l'époque, ce qui n'est pas dénué d'intérêt. Par ailleurs, Peyo aurait pleinement assumé l'aspect misogyne de son propos, l'outrance valant humour.

Et, ici, dans cet essai satirique, il en va de même, ce qui invalide les critiques virulentes qui ont accompagné, même anticipé sa sortie. Le pamphlet n'est que satirique, et montre également les limites de l'application à tout et n'importe quoi d'une grille d'analyse scientifique.
Ce livre, qui est bien petit et bleu et tient donc sa promesse, vaut bien le détour, pour ceux qui aiment la bande dessinée et/ou l'humour un peu cynique.
Un coup médiatique 2 étoiles

Le problème est que ce livre mélange un apport d'informations réelles (toujours d'ailleurs de seconde main) sur Peyo et sur son oeuvre ainsi qu'un délire. Les inventions ne sont pas le fruit de l'imagination de l'auteur mais sont pour l'essentiel le fruit de rumeurs qui ont couru sur internet principalement et ont été recensés et analysés dans un mémoire universitaire que l'auteur est obligé de citer.

De plus la culture de l'auteur en matière de BD est fortement limitée, ne le voit-on pas déclarer par exemple que "fait unique dans l'histoire de la BD, Thierry Culiford, le fils de Peyo, a poursuivi l'oeuvre de son père".

Un filon trouvé pour concevoir un ouvrage afin de provoquer un buzz sans le moindre respect des personnes. Peut-on s'autoriser à faire passer Peyo pour antisémite ?

L'humour d'Hara-Kiri était original, potache et provocateur, l'humour de Bueno est loin d'avoir la première de ces qualités.

JulesRomans - Nantes - 66 ans - 24 août 2012