Je ne joue plus !
de Rachel Hausfater, Olivier Latyk

critiqué par Shelton, le 13 novembre 2011
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Du très beau, du très fort !!!
L'album que je voudrais vous mettre en mains aujourd’hui est pour les enfants et vous me direz à juste titre que les enfants ne sont pas là pour lire et réfléchir… Non ! Lire est bien assez difficile pour compliquer les choses. Et pourtant…

D’abord, restons calmes et posons bien les choses. Un dessin, lui aussi, peut porter une réflexion, faire naître des sentiments et fonctionner la raison humaine. « Je ne joue plus ! » est un album grand format pour les enfants et leurs parents. Le sujet est très grave et il ne laissera personne indifférent. Sa lecture est d’actualité car nous allons vivre un dramatique anniversaire d’ici quelques jours : il y a dix ans, un attentat cruel touchait New York…

Ici, dans ma chronique comme dans l’album, il n’est pas question de s’interroger sur le fondement de ce terrorisme, de cet attentat et sur les responsabilités des uns et des autres. Ce qui est au cœur de cette histoire, c’est l’enfant qui a vu pendant une soirée des avions détruire deux tours, des femmes et des hommes se jeter dans le vide, des pompiers mourir ensevelis par des décombres de bâtiments. C’est l’irruption de la guerre dans l’univers de l’enfant qui est au cœur de cet album touchant et minimaliste…

Une première remarque s’impose : l’enfant a tout vu, tout compris et la confiance dans la société et ses parents a changé instantanément. La guerre semblait lointaine – « plus jamais ça ! » – et maintenant, elle est là ! Deuxième élément, quand l’enfant voit les tours s’écrouler, il voit ses legos, ses frêles constructions se pulvériser, certes, mais aussi sa propre maison, son école, son univers… et il plonge dans le drame, dans l’absurde…

Des dessins simples, des textes accessibles à tous et les grandes questions sont posées. Notre cerveau fait le reste et nous sommes bien en train de lire un album qui pousse à la réflexion philosophique, politique, éthique…

« Quand les hommes feuilles tombent, je me fais tout petit. »

« Quand les tours s’écroulent, je ferme la maison. »

« Quand la guerre arrive au galop, je jette mes pistolets. »

Mais que faire alors ? Doit-on encore montrer dix ans après ces images folles et absurdes du 11 septembre 2001 ? Oui, le débat a été lancé plus d’une fois mais ce qui est positif dans cet album, qui ne montre pas les images réelles de 2001, c’est la façon de positiver dans la seconde partie du livre : « Moi, je ne veux pas de cette pluie de morts. Je veux des villes debout, des avions voyageurs. Je veux me battre pour rire et que personne ne pleure… Moi, quand je serai grand, je ferai du beau temps. »

Certes cela peut sembler un peu utopiste mais cet album de Rachel Hausfater-Douïeb et Olivier Latyk est une petite merveille et c’est le moment d’en reparler, de l’offrir, de la lire…

Il est regrettable qu'un si bel album ait été mis au pilon par l'éditeur. Les lecteurs n'ont pas été assez nombreux et les affaires sont les affaires...