Pour une nuit d'amour : Suivi de L'Inondation
de Émile Zola

critiqué par Tistou, le 26 novembre 2011
( - 68 ans)


La note:  étoiles
Victime d’une femme fatale.
« Depuis cinq ans, Julien habitait la place des Quatre-Femmes, lorsque, un soir de juillet, un événement bouleversa son existence. La nuit était très chaude, tout allumée d'étoiles. Il jouait de la flûte sans lumière, mais d'une lèvre distraite, ralentissant le rythme et s'endormant sur certains sons, lorsque, tout d'un coup, en face de lui, une fenêtre de l'hôtel de Marsanne s'ouvrit et resta béante, vivement éclairée dans la façade sombre. Une jeune fille était venue s'accouder, et elle demeurait là, elle découpait sa mince silhouette, levait la tête comme pour prêter l'oreille. Julien, tremblant, avait cessé de jouer. Il ne pouvait distinguer le visage de la jeune fille, il ne voyait que le flot de ses cheveux, déjà dénoués sur son cou. Et une voix légère lui arriva au milieu du silence.
« Tu n'as pas entendu, Françoise ? On aurait dit une musique.
- Quelque rossignol, Mademoiselle, répondit une voix grosse, à l'intérieur.
Fermez, prenez garde aux bêtes de nuit. » »

Julien Michon n’est pas un gars méchant, pas une flèche non plus ; Il s’en sort honorablement dans la vie malgré une enfance difficile. Il s’est trouvé une situation d’expéditionnaire à la Poste et vit chichement dans une petite chambre louée dans la petite ville de P… dont on devine qu’elle n’est pas le lieu d’une vie sociale débordante (c’est le XIXème siècle aussi !). La principale aventure que se permet Julien, c’est de se mettre à sa fenêtre le soir et de jouer de la flûte. Ou à peu près.
En face, il y a l’hôtel de Marsanne. Et là vivent le Marquis et la Marquise de Marsanne. Qui ont une fille, qui revient du couvent où elle a suivi quelque étude, Mlle Thérèse de Marsanne. Hélas pour Julien, Thérèse, malgré son éducation, n’a rien d’une oie blanche. C’est plutôt le genre beauté fatale déterminée. Le reste, vous l’aurez deviné ; elle va capter le cœur de Julien. Un amour impossible mais des circonstances particulières, une nuit bien particulière, vont précipiter, cristalliser ce qui devait arriver. Et ce qui va arriver n’est pas bon pour Julien. Femme fatale donc.
On a du mal à prendre ce genre de situation au sérieux de nos jours. D’abord des Marquises …, une éducation au couvent …, et puis un benêt pareil (si, ça, ça doit encore exister !) … N’empêche. C’est Zola qui l’a écrit. Et ça se voit. Ca se connait comme on dit par ici !
on s'y croirait 8 étoiles

je me mets peu à peu au réalisme naturalisme dont je n'étais jusque là pas une grande adepte... Et bien je ne suis pas déçue! Ces deux nouvelles sont très prenantes et extrêmement bien écrites.
J'ai été un peu déçue par la chute de la première et ai même du m'y reprendre à 2 fois pour en comprendre le sens. C'est inattendu et un peu incompréhensible mais le reste de l'intrigue est bon. On s'attache rapidement au personnage et on entre dans son univers par sa petite fenêtre.
La seconde nouvelle m'a davantage plu. Le réalisme y est excellent et je trouve que le thème de l'inondation est étonnamment inédit. J'ai tout particulièrement aimé le choix de la narration interne qui apporte une angoisse, un pathétique et un suspense hors normes. Cette nouvelle est plutôt bouleversante et cela vaut le coup de la connaître.

Junos2005 - - 34 ans - 23 juin 2013