Libre de choisir
de Philippe Richelle (Scénario), Pierre Wachs (Dessin)

critiqué par Shelton, le 22 janvier 2012
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Les avis seront partagés, n'en doutons pas...
Voilà une bande dessinée que j’ai mis du temps à lire, puis à venir critiquer. Il faut dire que cet album, un one shot, traite des femmes et de leur droit à décider d’elles-mêmes de leur corps. C’est en particulier du droit à l’avortement dont on parlera, mais, plus généralement de la condition des jeunes femmes au début des années soixante-dix.

Pourquoi avoir hésité ? Peut-être parce que cette édition est liée à Choisir la cause des femmes et que j’avais peur, avant d’ouvrir l’album pour ma première lecture, que l’on ne traite ici que du droit à l’avortement comme si à lui seul il réglait tout et libérait définitivement la femme de toute emprise masculine ! En fait, dès entré dans l’album, j’ai été rassuré car il s’agit bien avant tout de l’histoire d’une jeune femme, Anna. Certes, Anna va se retrouver enceinte, mais on parlera des conditions dans lesquelles c’est arrivé, de la réaction des parents, de la société et de l’église, le comportement de ses amis et des autres jeunes, enfin, on ne s’arrêtera pas « simplement » à un avortement mais aussi à ce qui se passe après… C’est un destin de femme qui est présenté, de façon complète d’ailleurs car la mère d’Anna ou celle de sa meilleure amie permettent d’élargir de portrait des femmes dans ces années à la fois lointaines et proches de nous.

Est-ce qu’un homme dans les années deux mille peut lire cet album et en tirer des éléments de réflexion pour aujourd’hui ? Oui ! De toute évidence, il est question, là, du respect des uns pour les autres, à tous les âges. C’est de ce respect profond et réel que peut naître une égalité profonde et solide, durable surtout. Si un certain garçon de l’histoire, Julien pour ne pas le nommer, ne sait pas entendre l’autre, ne sait pas le sens du mot « non », la faille est bien là plus que dans un droit à l’avortement.

Le combat des femmes de « Choisir la cause des femmes » est éclairé par plusieurs aspects dont celui de promouvoir l’éducation sexuelle, point initial du débat. Mais pour ce qui est de l’éducation des jeunes garçons, avouons que tout doit commencer dès le plus jeune âge au sein même de la famille… et qu’il y a encore beaucoup de travail à faire !

Cette bande dessinée peut aider à franchir du chemin si on la donne à lire à certains garçons, aussi, et si les parents et la société ne s’abritent pas derrière l’avortement pour dire aux femmes que tout est réglé puisqu’il y a l’avortement. Il faut aussi, si on parle de la liberté de choisir, trouver les solutions pour aider une jeune femme qui, même seule, souhaiterait garder son enfant… Là aussi il y a du chemin à parcourir !

Oui, promouvoir l’égalité homme-femme, donner à chaque jeune l’éducation, sexuelle en particulier, pour le préparer à sa vie d’adulte responsable, faire disparaître les préjugés stupides, construire une société plus juste où les femmes puissent avoir les postes en fonction de leurs véritables valeurs et compétences… tout cela ne peut que nous habiter et nous stimuler dans nos actions. Si cette bédé peut y contribuer, alors banco !

N-B : signalons une préface, ce qui n’est pas habituel en bande dessinée, de Gisèle Halimi, présidente de « Choisir la cause des femmes », association fondée, entre autres, avec Simone de Beauvoir en 1971.