Aller-Retour
de Frédéric Bézian

critiqué par B1p, le 6 février 2012
( - 51 ans)


La note:  étoiles
Simenon versus Robbe-Grillet
Basile Far descend du train dans un village qu'il a jadis connu. Il est à la recherche de quelque chose ou de quelqu'un. Il y a prétendument eu une disparition, même si on ne sait de qui il s'agit. Le détective semble tellement perdu dans ses pensées et/ou ses errances qu'on ne sait si ce n'est lui-même qu'il cherche à retrouver. A travers les rues concentriques de la bourgade, dans l'hôtel où il se terre au fond de la nuit noire ou chez le photographe où les personnages des photos se fanent lentement sous l'action du soleil, il cherche les fantômes de son passé. Une disparition, prétendument.

Les bd's de Bezian ne se donnent pas facilement. Dans les réalisations du dessinateur/scénariste, on a toujours l'impression d'attendre Godot, d'attendre un événement qui n'arrive jamais, d'attendre, et c'est l'attente qui devient action.
Dans cet "Aller-Retour", j'ai beaucoup attendu, et j'ai beaucoup pensé. A l'"Affaire Saint-Fiacre" de Simenon cité plusieurs fois comme référence par la narrateur/détective perdu dans ses souvenirs.
Mais moi, en mon for intérieur, j'ai surtout pensé aux "Gommes" de Robbe-Grillet, à cet inspecteur de jadis qui se perd en lui-même autant qu'il bat le pavé d'une ville qui lui rappelle quelque chose.

Mon attente aurait été moins vaine si ce "nouveau roman' avait servi de référence...

Au moins, dans ce cas, il y aurait eu de la poésie, la répétition hypnotique des situations, l'impression diffuse qu'une réalité se cache derrière la réalité.
Las, cet "Aller-Retour" m'a semblé être d'une platitude qui exclut toute poésie. Je n'ai pas ressenti une seule seconde le bouquet de sensations que l'auteur voulait paraît-il donner au lecteur. Certes, il parle de musique, de vent, d'obscurité, mais rien qui ait parlé à mon imaginaire. Il ne suffit pas de parler des sens, il faut créer l'atmosphère où on peut les ressentir, et l'album y échoue totalement en ce qui me concerne.

Et moi de rêver à ce qu'aurait donné le "Nouveau Roman" façon bd...