Véro
de Edmond Baudoin

critiqué par Shelton, le 19 février 2012
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Construisons une belle place à Baudoin sur notre site...
Certains auteurs sont considérés comme parmi les plus grands, les plus talentueux de leur génération, et, pourtant, quand on passe devant eux à Angoulême lors du festival international de la bande dessinée, il n’y pas grand monde, on peut leur adresser la parole paisiblement sans avoir le sentiment de gêner et faire perdre du temps… Pourquoi un tel écart entre, d’une part, la réputation des professionnels et grands amateurs et, d’autre part, la médiatisation auprès du grand public ? Pourquoi des queues infernales devant des auteurs faciles, légers – je dirais même médiocres dans certains cas – alors qu’Edmond Baudoin reste là dans une apparence d’ennui ? Et je me suis aperçu que, même ici, nous ne parlons que fort peu des dinosaures de la bédé ? Pourquoi tous nos grands maîtres comme Jean-Claude Forest (2 ouvrages critiqués), Edmond Baudoin (7 ouvrages critiqués), Druillet (aucun ouvrage critiqué), Jijé (2 ouvrages critiqués), Victor Hubinon (1 ouvrage critiqué)… et je n’irai pas plus loin dans la liste ! C’est comme si certains romanciers comme Balzac, Zola, Flaubert, Proust, Stendhal étaient absents du site ! Oui, ce serait aussi dramatique ! Alors prenons le temps de remédier à cela progressivement pour que les plus jeunes sachent bien que certains génies d’aujourd’hui comme Sfar (28 ouvrages critiqués), Trondheim (22 ouvrages critiqués) ou Larcenet (18 ouvrages critiqués) ont bien été précédés par de grands auteurs autres qu’Hergé, Goscinny ou Morris !

Edmond Baudoin est un auteur atypique qui est né à Nice en 1942 et qui a produit de nombreux ouvrages mais en évitant le jeu des grandes séries. Ses débuts dans « Le canard sauvage », puis ses productions dans « Circus », « Pilote » et « L’écho des savanes » en ont fait un chouchou de ceux qui aujourd’hui sont parents et grands-parents. Oui, c’est ainsi que l’on peut expliquer comment Baudoin est tombé dans un certain oubli. Pourtant, il a reçu quelques récompenses comme meilleur album français en 1992 pour Couma Aco…

Véro est une petite merveille, pas très optimiste, il est vrai. Nous voici en banlieue, ce type de lieu de vie dont on cherche systématiquement à s’échapper. William quittera cette banlieue, sûr, et il emmènera Véro pour lui offrir une autre vie, un autre horizon. Partir c’est quitter la drogue, la violence, la zone, la pauvreté, la violence… mais, est-ce possible ?

La route ne conduira pas au bonheur parfait et elle sera pleine d’imprévus pour finir dans le drame. J’ai trouvé que cette bande dessinée se terminait en chef d’œuvre même si gentiment Edmond Baudoin nous avoue :
« Je n’aime pas les fins. Je ne crois pas que l’on puisse aujourd’hui écrire une histoire avec un début et une fin. Nous ne vivons plus que des fragments de vie. Des morceaux d’histoires. »

Heureusement, sa dernière recommandation de vie nous ouvrira au rêve et on peut imaginer, qui sait, que William, malgré les apparences, a bien réussi à sortir Véro de sa zone et qu’il lui a offert le bonheur. Le reste n’est qu’illusion…

De la très grande bande dessinée, du très grand et fort Baudoin, du grand plaisir pour le lecteur !