Terre Noire : Les exilés du tsar
de Michel Honaker

critiqué par Numanuma, le 26 février 2012
(Tours - 51 ans)


La note:  étoiles
Monte Cristo d'Ukraine
Stepan est un orphelin adopté par une grande famille noble, les Danilov. Un pianiste et un compositeur génial. Stepan est russe, fondamentalement attaché à sa patrie et à son domaine de Terre-Noire, en Ukraine. Stepan est talentueux mais sa famille adoptive l’a toujours rejeté, hormis Natalia, belle jeune fille dont il se sent épris. Surtout, Stepan, fidèle en amitié, vif d’humeur parfois, a des relations douteuses dans la Russie de 1887 dirigée d’une poigne de fer par le Tsar Alexandre III.
Roman épistolaire bien maîtrisé, Terre-Noire est une œuvre intrigante à défaut d’être totalement originale. La chute de Stepan et sa disparition rappellent très facilement un certain Edmond Dantès et les derniers chapitres du livre, qui voient Stepan changer de nom et de mode de vie, qui voient une vengeance s’amorcer ne sont pas pour me contredire.
Cependant, ces derniers chapitres mettent aussi en scène une forme de fantastique bienvenu sous la forme d’une vieille italienne qui soigne et sauve Stepan à l’aide d’incantations et d’onguents, de potions et d’herbes. L’arrivée, ensuite, de contrebandiers amène le lecteur sur les traces des nouvelles de Mérimée.
L’auteur a choisi de placer son action en 1887 mais il aurait aussi bien pu le faire sous le régime de Poutine, en changeant son musicien de héros pour un écrivain dissident. Dans le deux cas, des forces obscures peuvent trouver leur place : ici la police secrète du Tsar et ses méthodes aussi expéditives qu’en dehors de toute loi.
Je l’ai dis, le roman, du moins ce premier volume, ne brille pas par une originalité débordante mais la trame de l’intrigue est suffisamment bien ficelée pour aller jusqu’au bout de l’histoire. De plus, l’auteur rend bien la Russie et son froid glacial, ses steppes et son ambiance si particulière d’hiver éternel. Bien sûr, rien de comparable avec les grands écrivains russes mais l’auteur a assez de talent pour planter son décor sans en rajouter dans l’érudition. Il en découle une grande légèreté dans l’écriture. Il y a même quelque chose d’intemporel dans cette histoire que l’on devine tragique et intense.
Je ne sais pas ce que réservent les volumes suivants de cette série vieille de quinze ans et que l’auteur, Michel Honaker, a choisi le reprendre et rééditer sous une forme plus aboutie, mais j’ai grande envie de découvrir les ressorts de la vengeance qui va fatalement s’abattre sur les membres de la famille Danilov.