La disparue de San Juan
de Philippe Broussard

critiqué par Falgo, le 30 mars 2012
(Lentilly - 85 ans)


La note:  étoiles
Argentine: une victime des escadrons de la mort.
Franco-Argentine, Marie-Anne Erize a été enlevée en pleine rue à San Juan (Argentine) le 15 octobre 1976. Son corps n'a jamais été retrouvé. Elle avait 24 ans.
Philippe Broussard, de l'Express, reconstitue dans ce livre la vie et le parcours de cette jeune française atypique: mannequin fêté, familière du show bizz, généreuse et utopique. L'enquête de Broussard la suit pas à pas dans les évolutions de sa vie: famille, amis, amants, études, métiers. Elle se termine par le suivi des méandres juridiques qui précèdent le probable procès de son présumé tortionnaire, Jorge Olivera.
Ce récit est une parfaite illustration du cadre décrit par Marie-Monique Robin dans "Escadrons de la mort, l'école française", récemment critiqué sur ce site. La jeune femme n'a eu comme tort que d'avoir des idées généreuses, fréquenté des rebelles fichés et adhéré au mouvement des Montoneros. Dans l'Argentine de ces années-là, cela suffisait pour être enlevée, torturée, très probablement violée et finalement exécutée de manière à faire disparaître son corps. De tout ceci il n'y a aucune trace officielle. Seul le procès de Jorge Olivera apportera peut-être des réponses aux lancinantes questions que se posent ses proches depuis 36 ans.
On trouve dans ce livre quantités de détails qui corroborent l'ouvrage essentiel de Marie-Monique Robin. Y apparaît nettement le comportement lâche et ambigu de l'Ambassade de France à Buenos Aires durant toutes ces années. Le cas de Marie-Anne Erize n'est pas unique. Il est l'un de la petite vingtaine de disparitions de Français durant ces années sales sur lesquelles la lumière n'a pas encore été faite. L'on sait par l'oeuvre de Marie-Monique Robin que le comportement néfaste de Français et des autorités françaises va beaucoup plus loin que cette absence de clarté. Honte.
Sur le fond le livre est passionnant. Sur la forme il m'a déplu. Le journaliste se met beaucoup trop en valeur, en particulier par l'inutile publication des ses lettres à la famille, teintées d'un sentimentalisme de mauvais aloi.