J’ai un problème avec Lewis Trondheim. Je trouve son univers graphique plutôt plaisant, ce côté faussement naïf en apparence, masquant un esprit torturé et une foule de questions existentielles en filigrane, sur le mode de l’autodérision. Incontestablement, cet auteur a un certain talent humoristique pour raconter l’anecdotique, toujours entre l’autobiographie et la pure invention. Mais ce qui est vraiment très fort chez lui, c’est d’avoir réussi à atteindre une telle notoriété dans le monde de la BD sans savoir dessiner, du moins selon les règles de l’art. Alors quel est le problème, me direz-vous ? Je n’ai lu que quelques BD de cet auteur, que j’ai trouvées assez sympas en général, mais je ne peux pas dire que je sois jamais tombé à la renverse.
Pourtant, Lewis Trondheim est malin. Ancien graphiste publicitaire de talent, il a bien compris le système et l’utilise à merveille pour apaiser son angoisse existentielle, ainsi que cette peur de mourir de faim qu’il évoquait dans une interview. C’est logique, plus tu produis, plus tu vends. Et il me semble que c’est ça, le vrai problème de Laurent Chabosy (son vrai nom) : cette production pléthorique, qui fait que ses ouvrages ressemblent à des fruits trop verts et trop identiques pour être franchement marquants, superficiels mais comportant assez d’autodérision pour tout bobo recherchant un minimum de branchitude (d’ailleurs, il est intéressant de voir dans la critique de Jean-Loup la comparaison avec Dupuy et Berberian, auteurs pour bobos par excellence mais l’assumant complètement).
Je ne nie pas le talent du bonhomme, mais j’ai l’impression que d’une manière générale, ce talent gagnerait à se rassembler dans des œuvres moins nombreuses et plus percutantes… Mais après tout, je ne suis peut-être pas le mieux placé pour parler de l’auteur, n’ayant lu qu’une infime partie de ce qu’il a fait, aussi bien comme scénariste que comme dessinateur.
En ce qui concerne Slaloms, j’ai trouvé ça plus que superficiel, les vacances de Lapinot et ses potes dans une station de sports d’hiver ne m’ont guère convaincu, même si j’ai pu sourire plusieurs fois. Pour le coup, c’est vraiment la BD parfaite pour bobos ! Ces descentes de pistes finissent par lasser et on ne sait pas très bien où il veut en venir avec tous ces slaloms… Très gentillet tout ça, un peu comme du laudanum qui donnerait l’illusion de voir le monde à travers une de ces « boules de neige » encombrant les échoppes touristiques...
Blue Boy - Saint-Denis - - ans - 14 décembre 2009 |