Wilfrid Laurier
de André Pratte

critiqué par Dirlandaise, le 10 mai 2012
(Québec - 69 ans)


La note:  étoiles
Un homme de compromis
Né à Saint-Lin en 1841, Wilfrid Laurier, après des études de droit à McGill, est élu député de Drummond-Arthabaska à l’Assemblée législative du Québec pour être ensuite nommé ministre du Revenu de l’intérieur dans le gouvernement d’Alexander Mackenzie en 1877. Je ne retracerai pas toutes les étapes de sa carrière politique dans cette critique mais ce qui rend l’homme intéressant, malgré son goût marqué pour la modération et le compromis, attitudes que je déteste souverainement chez un homme politique car la modération ne mène jamais nulle part, c’est le fait qu’il soit devenu le premier francophone à accéder au poste de premier ministre du Canada. De plus, l’homme était québécois de souche donc cela le rend doublement intéressant à mes yeux.

La biographie de monsieur Pratte, bien que assez courte, relate les grands défis et les grands débats qui ont jalonné la carrière de l’homme politique entre autres : la participation du Canada dans la guerre des Boers, la commission d’arbitrage sur les frontières de l’Alaska, la création des provinces de la Saskatchewan et de l’Alberta par les Autonomy Bills, la crise des écoles catholiques francophones au Manitoba, la marine de guerre du Canada, l’entente de réciprocité commerciale entre le Canada et les États-Unis, la Première Guerre mondiale et le spectre de la conscription, le développement de l’Ouest canadien et l’immigration française et belge au Canada.

Tous ces événements sont passionnants car ils ont contribué à façonner le Canada d’aujourd’hui. L'éternel conflit entre anglophones et francophones canadiens occupait une large place sur la scène politique tout comme aujourd’hui. Le livre est un véritable petit résumé de l’histoire du Canada du temps de Laurier et pour cela, il est extrêmement bien rédigé et nullement ennuyeux au contraire. L’auteur ne se contente pas de retracer la vie et la carrière de l’homme politique d’une façon linéaire mais il accorde la priorité aux grands événements de l’époque et à la position politique adoptée par Laurier, homme de compromis et dont la ligne de conduite était de se laisser flotter au gré du temps car pour lui, le temps arrangeait bien des choses. Il était un homme pragmatique avant tout et surtout, son but ultime était de créer un Canada uni et un parti Libéral fort au détriment souvent de tout le reste.

L’homme ne m’est nullement sympathique. Sa cause n’est pas la mienne mais se renseigner sur le camp adverse est un mal nécessaire…

Le dernier chapitre sur l’héritage de Laurier m’a particulièrement irritée. Franchement monsieur Pratte, votre petit couplet en faveur du fédéralisme, j’aurais pu m’en passer…

« Je vous demande une chose, dira-t-il aux Québécois dans sa première intervention publique comme chef du Parti Libéral, en 1887. C’est que, tout en vous souvenant que moi, Canadien français, j’ai été élu chef du Parti libéral du Canada, vous ne perdiez pas de vue que les limites de notre patrie ne sont pas confinés à la province de Québec, mais qu’elles s’étendent à tout le territoire du Canada, et que là est notre patrie où flotte le drapeau britannique en Amérique. Je vous demande de vous en souvenir pour vous rappeler que votre devoir est simplement, et avant tout, d’être Canadiens. »

« Je suis Canadien français ; j’ai été élevé sur les genoux d’une mère française ; mes premiers souvenirs sont ceux qu’aucun homme n’oublie ; va-t-on me refuser le privilège de parler cette même langue à ceux qui me sont chers ? »

J’avoue préférer la deuxième citation à la première…