Le Prince de Machiavel

Le Prince de Machiavel
( Il principe)

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Philosophie

Critiqué par Jules, le 13 janvier 2001 (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 22 avis)
Cote pondérée : 8 étoiles (585ème position).
Visites : 13 711  (depuis Novembre 2007)

Très dur mais bien souvent très réaliste

Le mot " machiavélique " est fortement entré dans la langue française et n’est, en général, pas un adjectif des plus honorables.
S'il lui arrive de s’accoler au nom de quelqu'un qui est rusé et manœuvre bien pour arriver à ses objectifs, ce n'est pas trop mal. Bien souvent il va plutôt jusqu'à qualifier quelqu’un qui est sans aucun scrupule. Qu'a fait Machiavel ? Il a surtout observé la société de son temps, la noblesse, la bourgeoisie et le peuple. Il a observé l'homme en tant que tel et à travers un aspect historique. A partir de là, il a osé dire tout haut, et franchement, ce qui avait l’habitude de se faire, mais pas de se dire. Il a également tenté de sortir la religion de la politique et de faire en sorte que celle-ci, laïcisée, tente de rendre la société et l'homme meilleurs. La raison d’état devrait, selon lui avoir cet objectif : une meilleure vie au sein de la société. Dans " Le Prince " il donne certains conseils à un jeune futur souverain et il est assez évident que, s’ils sont réalistes, ils sont difficiles à concevoir dans nos sociétés démocratiques actuelles. Par contre, il en est qui relèvent du bon sens le plus clair et qu’ils devraient rester éternellement valables.
Un ou deux exemples :
Pensons deux secondes aux accords de Munich en 38 (par lesquels l'Angleterre et la France abandonnèrent la Tchécoslovaquie à Hitler) et voici ce que Machiavel en aurait pensé : " .qu’on ne doit jamais laisser se produire un désordre pour éviter une guerre, car on ne l’évite pas, mais on la diffère à son désavantage ".
À propos de la constance des peuples : " .la nature des peuples est changeante ; et il est aisé de leur persuader une chose, mais difficile de les tenir fermes en cette persuasion. Aussi faut-il être organisé de façon que, lorsqu'ils ne croiront plus, on puisse les faire croire de force. "

Qu’aurait pensé Napoléon de ceci : " Ceux qui, d’abord hommes privés, doivent à leur seule bonne fortune de devenir princes, n’ont pas grand peine à le devenir, mais en ont beaucoup à le demeurer. Ils n’ont nulle difficulté sur le chemin, car ils y volent ; mais toutes les difficultés naissent quand ils sont en place. "
Un livre que l'on pourrait qualifier de cynique, mais qu'il me semblerait très injuste de considérer comme inepte !…

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Encore un penseur qui écrit avec des poids aux mains ...

7 étoiles

Critique de Froidmont (Laon, Inscrit le 28 octobre 2022, 33 ans) - 18 septembre 2024

Il faut régner avec ses armes,
Ne pas les emprunter à d’autres.
Des mercenaires en alarme
Ne valent qu’à moitié les nôtres ;
Or sitôt le danger vaincu,
Ils vous détiennent à présent :
Ils sont forts, vous êtes à nu.
Un allier en ferait autant.

Il faut régner avec la masse,
Ne pas lui donner des rancœurs.
Si vous encourez sa disgrâce
Au profit de quelque seigneur,
Un soulèvement populaire
Fera plus de tort à l’État
Que la bouderie tracassière
D’un petit noble plein d’émois.

Il faut régner avec prudence,
Ne prendre en tout point aucun risque.
S’il faut tuer la descendance,
Couper la tête à la francisque
De la lignée de l’ancien prince
Pour qu’elle ne veuille jamais
Le trône et ne vous en évince,
Tuez, même le nouveau-né.

Il faut régner avec la force,
Ne pas laisser s’épanouir
Le voisin qui sous son écorce
Cache une dague qui peut nuire.
Affaiblir et tout contrôler,
Poser ses pions, faire ingérence
Est utile à la sûreté
De votre État. On fait sa chance !

Ce livre reste intéressant, mais bon sang ! ce qu’il est pompeux ! Je n’irai pas jusqu’à vraiment en faire un reproche sérieux ; c’est là le style d’une époque. Machiavel peut-être était moins, nous dit son préfacier ad hoc, pompeux que ses contemporains, son style reste bien trop lourd ! Il entame des anecdotes riches en noms et au long cours : ça finit toujours en compote, ça se mélange dans ma tête, car chacun des protagonistes est introduit à la sauvette, balancé tout sec sur la piste, comme si tous ces noms brillaient dans la culture de chacun, et que le nommer suffisait à l’extirper de son écrin.
Bref, je m’endormais en lisant, et le seul passage qui a su trouver grâce à mes ardents, c’est l’introduction de bon droit ! Yves Lévy, le traducteur, a rendu un meilleur hommage en parlant sur ledit auteur qu’en traduisant tout son ouvrage.
Mais c’est un livre qui fait date et qui pose des idées neuves. Il met en recette une pâte et l’appui de nombreuses preuves qui assertent son efficience. Il reste à la cuire et l’État jaillit avec de l’endurance de cette pâte que voilà. Ce livre vaut pour ses idées, ce qu’elles firent à l’Histoire ; elles sont certes bien datées mais gardent encore un pouvoir.

Comment un adjectif n'est pas l'illustration d'une pensée

10 étoiles

Critique de Deinos (, Inscrit le 14 février 2009, 62 ans) - 27 août 2021

Ouvrage passé mais toujours actuel par sa pertinence et son regard acéré

Fort instructif

8 étoiles

Critique de Koolasuchus (Laon, Inscrit le 10 décembre 2011, 35 ans) - 10 décembre 2013

Intrigué par la réputation de Machiavel je me suis dit qu'il valait mieux faire mon opinion par moi-même en lisant le fameux Prince. Une fois passé le prologue qui, il est vrai, ne met pas vraiment Machiavel en valeur, on se met à découvrir une œuvre dont la lecture est étonnamment assez plaisante. J'ai trouvé une grande partie des remarques de l'auteur assez pertinentes même si certaines sont désormais dépassées, j'ai cependant eu un peu de mal avec quelques-unes notamment celle dans laquelle il compare la Fortune avec une femme, très misogyne pour le coup. En contrepartie la remarque qui m'a le plus surpris est probablement celle-ci "L'amour du peuple est la meilleure des citadelles" que je trouve plutôt juste, Machiavel a au moins le mérite, même si c'est avec une arrière-pensée, de reconnaître l'importance du peuple pour les dirigeants.

Ce texte est également parsemé de nombreux exemples que l'auteur a choisis à travers différentes périodes historiques ce qui montre que Machiavel était également un homme très cultivé. J'ai beaucoup aimé ces exemples car ils sont très intéressants et apportent pas mal d'informations que je ne connaissais pas sur l'histoire.

J'ai trouvé cette œuvre au final plus ambiguë qu'il n'y paraissait avec des passages éclairés côtoyant d'autres beaucoup plus discutables. Même si je n'ai pas pour ambition de gouverner un jour un pays je ne regrette pas cette lecture, principalement pour l'aspect historique mais également pour me rendre compte que la réputation de Machiavel est plutôt injustifiée même si cela lui a au moins permis de traverser le temps.

La politique sous l'angle unique de la stratégie

7 étoiles

Critique de ABDELNOUR (Paris, Inscrit le 23 octobre 2013, 29 ans) - 23 octobre 2013

Ce livre magnifiquement écrit aborde tout ce que recouvre le pouvoir de celui qui dirige un Etat, quelle que soit la forme de celui-ci : le rapport au peuple, aux dirigeants, la gestion des ennemis... Machiavel délivre une analyse d'une grande intelligence, et d'une franchise assez brute ; il n'hésite pas à dire très justement que "s'il n'y a pas de différences de mœurs, les hommes vivent tranquilles", remarque très intéressante montrant déjà l'importance de l'uniformité culturelle d'un pays, à l'échelle globale. Il note aussi que la stratégie politique implique nécessairement de la violence, des "armes", qui se coordonnent aux lois. Il faut être craint et aimé par son peuple, il faut de la violence pour diriger.
Cependant, le problème de ce livre semble aussi porter sur le fond. L'étude stratégique unique se heurte au fait que la politique est aussi un engagement ; en fait, la politique porte aussi sur le compte des idées qu'ont les hommes du bien commun, et c'est ce que semble ignorer Machiavel. Le domaine stratégique militaire est "le seul métier qui corresponde à celui qui commande" ; ainsi, le prince ne doit se soucier que de la confiance du peuple, quitte à s'allier avec des puissances étrangères ou à délégitimer le ministre-qu'il a lui-même choisi !-uniquement pour la stratégie de son règne. C'est ce qui est un peu crispant dans ce livre, cette façon d'axer la réflexion sur la stratégie (très pertinente, encore une fois), mais uniquement sur la stratégie, oubliant totalement l'aspect idéologique d'une politique qui serait cohérente.

Livre de stratégie politico-militaire à l'usage des Médicis

8 étoiles

Critique de Vladivostok (, Inscrit le 14 mars 2013, 38 ans) - 1 avril 2013

D'abord, je tiens à dire que c'est un livre agréable à lire, très bien écrit. Il risque aussi de fortement intéresser les férus de philosophie politique.
Maintenant, le texte comporte quelques difficultés.
Il faut au préalable étudier le contexte de rédaction de cet ouvrage. Sinon, l'on risque de se perdre dans les différents exemples historiques donnés par Machiavel.
Aussi, ce texte fait l'apologie des souverains capables de prendre sur le lion et le renard. Il exècre les souverains trop portés vers la paix et ne s'exerçant pas à la guerre.
J'ai particulièrement aimé les passages qui traitent des flatteurs.
Sinon, comme je l'ai dit plus haut, c'est très facile à lire, ça prend deux heures de temps, ce qui n'est pas énorme.

Bon, mais moins extravagant que sa légende laissait imaginer

7 étoiles

Critique de Nance (, Inscrite le 4 octobre 2007, - ans) - 8 octobre 2012

« Là-dessus naît une dispute : vaut-il mieux être aimé que craint, ou l’inverse ? Je réponds qu’il faudrait être et l’un et l’autre; mais comme il est bien difficile de les marier ensemble, il est beaucoup plus sûr de se faire craindre qu’aimer, quand on doit renoncer à l’un des deux. »

C’est mon engouement pour *tousse* Sébastien Tremblay de Loft Story */tousse* la famille Borgia (César, Le Valentinois, fils du pape Alexandre VI, a été une inspiration et est cité dans Le Prince) qui m’a donné le goût de lire ce traité dont j’ai grandement entendu parler. De plus, Machiavel est l’homme à l’origine du mot machiavélique, mot évocateur pour moi, alors il FALLAIT que je le lise un jour c’est sûr.

Alors, est-ce que c’est à la hauteur de la légende ? Est-ce que Machiavel est « machiavélique » ? Pas autant que je l’aurais voulu. Je m’avais fait une idée plus extravagante du livre ! J’ai trouvé que plusieurs idées allaient de soi et que si on prenait ça littéralement, que ça manquait de grandeur, de vision. Enfin, l’Italie de son époque (plusieurs royaumes indépendants) vivait plusieurs bouleversements politiques, plusieurs changements de main de pouvoir (la France, l’Espagne, Rome...), alors j’imagine qu’il faut aussi se mettre dans la mentalité de l’époque où il a été écrit, peu de temps à penser à construire, mais plus à se défendre ? N’empêche, j’ai trouvé restreint sa façon de penser et on peut trouver certains exemples douteux sur ce qu’il croit digne d’être imité.

Hum, je trouve intéressant que Jean-Jacques Rousseau ne prenait pas Le prince littéralement et y voyait au contraire une dénonciation par en dessous au peuple des magouilles des grands. D’autres pensent pareillement que le traité s’adressait plus au peuple, car les grands connaîtraient déjà ces magouilles de base par leur éducation (diviser pour mieux régner, se faire craindre, ne pas se faire haïr, que si on ne change pas trop les habitudes du peuple conquit ça aide, que les armées personnelles valent mieux que les mercenaires et les aides alliées et ainsi de suite, c’est évident !). Y a-t-il un agenda républicain caché ? Je crois qu’il n’y a pas de mal à faire des théories, dans un sens ou l’autre. Il y a une certaine ambiguïté, une certaine marge de manoeuvre chez Machiavel (est-ce une tactique délibérée ?), je peux comprendre que ça laisse la place à multiples interprétations.

Je ne dis pas que je n’ai pas aimé ma lecture. Ça m’a donné matière à réflexion, autant sur le texte que sur le personnage. Cependant, je ne sais pas si je suis désabusée, mais je n’ai pas eu l’impression de lire des concepts bien compliqués, qui ne sont pas évidents. Peut-être une seconde lecture du Prince un de ces jours va me révéler d’autres facettes du texte.

Pour mon édition (Folio Classique, 1173), il faut savoir que j’ai tenté de lire ce livre plusieurs reprises avant d’aller jusqu’au bout. La longue préface ne peint pas vraiment Machiavel d’un oeil favorable, c’est compréhensif, mais le problème c’est qu’on ne m’a pas donné le goût de poursuivre ma lecture. Le texte du Prince ne fait qu’une centaine de pages, le reste on y trouve quelques correspondances, un dossier assez fournit et surtout des extraits de ses autres oeuvres. J’imagine que c’est pour ne retirer que le plus intéressant, mais je déteste quand on met des textes qu’à moitié !

Machiavélique ? Cynique ? Réaliste ?

9 étoiles

Critique de Bubulle-san (, Inscrite le 21 août 2012, 30 ans) - 21 août 2012

Intéressant , j'ai plutôt bien aimé , bon c'est vrai il faut s'accrocher et j'ai pas tout compris même en m'agrippant ^^
mais les rares lignes que mon jeune inculte esprit m'a permis de comprendre ont réussi à m’éclairer sur la politique actuelle est même à m'y intéresser ,
je suis sûre qu'à chaque lecture on apprend de nouvelles choses et qu'à l'aube de mes 100 ans si mon état me le permet j'en apprendrai encore !

que dire....

9 étoiles

Critique de Paquerette01 (Chambly, Inscrite le 11 juillet 2008, 53 ans) - 13 mars 2012

la lecture du Prince n'a pas pour but d'être agréable mais d'être instructive....
Cet ouvrage est une référence incontournable concernant les théories du pouvoir.....

Pas Machiavélique, pragmatique

7 étoiles

Critique de Romur (Viroflay, Inscrit le 9 février 2008, 51 ans) - 13 novembre 2011

Machiavel a laissé dans l’inconscient collectif le souvenir d’un personnage diabolique et manipulateur. Trouvant Le Prince dans la bibliothèque j’ai voulu en savoir plus.
Cet essai politique est remarquablement court. Destiné au nouveau maître de Florence il expose les différentes façons d’accéder au pouvoir et de le conserver dans les meilleures conditions, d’organiser les forces militaires et de gérer les alliances, de se comporter vis à vis du peuple et de ses proches, des qualités humaines à avoir. C’est sans doute cette dernière partie qui a le plus frappé les esprits puisque Machiavel explique que dans le monde réel toutes les vertus ne doivent pas être pratiquées et que, si il faut éviter d’inspirer le mépris ou la haine, il faut savoir à l’occasion et avec retenue faire preuve de cruauté ou de duplicité pour protéger l’état et assurer le bien-être de son peuple. La signification très péjorative attachée au machiavélisme est loin d’être justifiée !

J’ai lu Le Prince dans l’édition G Flammarion qui a le bon goût de comporter une préface sur les conditions de rédaction de l’essai et la façon dont il a été perçu au cours des années, et en fin de livre des notes, un index et une chronologie de l’époque. Y Lévy qui les a rédigés a juste le défaut un peu pénible et commun avec d’autres universitaires d’expliquer à plusieurs reprises que les traducteurs précédents ont fait un mauvais travail et les commentateurs passés ont mal compris l’ouvrage... Mais pour le reste ses explications m’ont donné le sentiment d’apporter un éclairage vraiment utile pour comprendre et situer le texte.

A titre personnel, il s’agit d’une lecture de type « culture générale ». Vu l’objet ce n’est pas une lecture plaisir et n’ayant pas à diriger l’état ce n’était pas une lecture utile. Par contre, même si elle s’adresse à un dirigeant monarchique du XVIè, elle reste essentielle car intemporelle pour tout homme d’état. On appréciera ainsi quelques citations : On n'évite pas une guerre, on la diffère à son désavantage. On fait la guerre quand on veut, on la termine quand on peut. Le voeu du peuple est plus honnête que celui des grands, ceux-ci voulant opprimer et celui-ci ne pas être opprimé.

Le texte fondateur de la science politique moderne!

9 étoiles

Critique de Montréalaise (, Inscrite le 7 août 2010, 31 ans) - 19 octobre 2011

Le secrétaire florentin Machiavel fut le premier philosophe à avoir décrit les rouages de la politique ainsi que les rapports de force entre le prince, les puissants et le peuple. Il fut pour ainsi dire le fondateur du réalisme politique, courant qui se contente moins de proposer une meilleure forme de gouvernement que d'apprendre au prince comment gouverner avec l'État dont il est à la tête selon les circonstances.

La lecture demande de la patience puisque ce petit livre aux courts chapitres fut écrit à la Renaissance. Si vous suivez mon conseil et que vous méditez sur chaque chapitre après l'avoir lu, vous auriez le plaisir de vous transporter dans sa description et son analyse méticuleuse des gouvernements passés et présents, des raisons de leurs succès et de leurs échecs, de l'équilibre délicat des pouvoirs, entre la fortune et la vertu, ainsi que des actions à prendre pour régler les problèmes en temps de paix ou en temps de guerre.

Contrairement à la croyance populaire, Machiavel est loin d'être le diabolique conseiller qu'on imagine. Il ne fait que rapporter la réalité dans les rapports politiques (il s'inspirera particulièrement de César Borgia). D'ailleurs, il voulait faire de ce livre un outil pour éclairer le peuple sur ce sujet.

Pour l'édification politique du citoyen

9 étoiles

Critique de Radetsky (, Inscrit le 13 août 2009, 81 ans) - 26 septembre 2011

Nicolas Machiavel (1469 - 1527) fils de Bernardo Machiavelli, légiste, nacquit à Florence, ville à laquelle il dédia l'essentiel de sa vie publique et privée. En 1498 il entre officiellement dans l'administration de la république florentine et commence en 1499 une carrière de diplomate. Les tribulations, les guerres incessantes entre les ducs, princes, potentats divers de l'Italie de la Renaissance le mettront en contact étroit avec les Sforza, Borgia, Bentivoglia, etc., tout comme avec Louis XII roi de France et l'empereur Maximilien Ier de Habsbourg. Ses missions, ses entretiens, lui donneront l'occasion de rédiger de multiples notes, instructions, méditations politiques en relation avec les évènements auxquels Florence et son gouvernement sont mêlés et constituent encore une copieuse bibliographie. Mais son grand oeuvre, Il Principe sera dédié à Laurent de Médicis qui va faire de Florence une manière d'oligarchie princière à l'image des autres. Pour résumer l'esprit de cet ouvrage, disons qu'il constitue la description précise, le mode opératoire incontournable destiné à quiconque veut conquérir et conserver le pouvoir. On a beaucoup glosé sur le "machiavélisme", souvent sans s'apercevoir que les développements psychologiques, les procédés de propagande, les pressions diplomatiques, économiques ou guerrières mises en oeuvre dans le maniement du pouvoir, décrits minutieusement par Machiavel, pouvaient se lire de manière tout aussi évidente avec le plus grand profit par les adversaires de tout pouvoir...
Evidemment, le contexte historique précis des XVe - XVIe siècles ne doit jamais échapper au lecteur, dans toutes ses composantes. Mais il n'en demeure pas moins vrai que les ressorts, les inconscients individuels ou collectifs sont toujours là qui dictent pour une grande part les actions des politiques. A lire donc, peut-être de concert avec le Discours de la Servitude Volontaire de notre La Boétie (sur CL voir http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/10580
Je n'ai pas lu l'édition française que je signale parmi d'autres, ne sachant donc quelle valeur donner à la traduction, d'où la légère réserve dans la notation.
Pour ceux qui lisent l'italien, je signale par ailleurs l'édition Feltrinelli (dans la langue de l'époque), avec une introduction de G.W.F. Hegel et un glossaire adapté à la langue moderne en notes de bas de page.

Abominable, c’est sûr…

1 étoiles

Critique de Blue Boy (Saint-Denis, Inscrit le 28 janvier 2008, - ans) - 20 août 2011

Il faut bien le dire, d’emblée, le personnage de Machiavel n’apparaît guère sympathique. Dans la présentation qu’il fait de son livre à Laurent le Magnifique, il redouble de courbettes et simagrées, s’offrant à lui avec « quelque témoignage de [sa] soumission », jugeant son « œuvre indigne de lui être présentée », etc. Belle introduction au machiavélisme !

Vient ensuite une énumération de conseils destinés aux puissants pour les aider à conserver le pouvoir face aux guerres, complots et révoltes qui faisaient rage à l’époque. La première partie en particulier consacrée à la guerre est assez ennuyeuse, il a fallu que je t’attende la 100ème page pour trouver un semblant d’intérêt à ce bouquin, quand l’auteur passe de la stratégie guerrière à la stratégie politique… Bien sûr, le contexte était évidemment différent au XVIème siècle, et le siècle des Lumières n’était qu’en gestation. Cela dépend donc de la façon dont on le lit. Pris à la lettre, on devrait trouver ça répugnant ou pathétique. Pris dans son contexte, on y trouvera le même intérêt qu’en admirant une vieille breloque dans la vitrine d’un musée… Frédéric II de Prusse, né deux siècles après sa publication, l’avait jugé lui-même « abominable ».

En fait, Machiavel n’était pas forcément quelqu’un de méchant comme on pourrait le croire en se référant à l’adjectif tiré de son nom. Le bonhomme est juste un technicien froid et obtus, désespéré parce que son pays, l’Italie, qu’il considérait à la pointe de la civilisation de son vivant, était incapable de s’unir face à l’invasion des « barbares étrangers », notamment la France et l’Espagne. Jamais il n’avance une théorie un tant soit peu humaniste. S’il avait vécu à notre époque, il aurait sûrement fait polytechnique. Comme le dit bien Paul Veyne en préface dans l'édition Folio : si Machiavel a compris quelle était la réalité effective de son temps, il l’a prise et l’a fait prendre pour une vérité éternelle…

Évidemment, on sait bien que le monde politique n’est pas fait d’enfants de chœur et qu’il faut avoir le cuir solide pour arriver au sommet… en ce sens, ce livre peut être éclairant sur la réalité de la vie politique, voire désespérant si l’on suppose que nos dirigeants appliquent ce qui y est développé… Tout n’est toujours que calcul, calcul et encore calcul… et quand bien même Machiavel conseillera aux « princes » de faire preuve de générosité, cela ne sera jamais dans un but désintéressé, mais toujours à des fins de conservation du pouvoir. Le peuple quant à lui, est vu comme du bétail, masse informe manipulable et corvéable à merci. Cela devrait paraître quelque peu infect pour tout lecteur doté d’un minimum de sensibilité, dont je pense faire partie.

Voici quelques passages révélateurs sur le personnage. On a vraiment envie d’être son ami à ce type-là…

Par exemple, quand il parle des Perses mécontents des Mèdes, car « amollis et efféminés par une trop longue paix », ou alors lorsqu’il compare la fortune (au sens de chance) à une femme, qu’il est nécessaire « pour la tenir soumise, de la battre et de la maltraiter ».

Un livre qui ne rend pas service à la politique, la vraie, la courageuse, la généreuse, l’humaniste, celle au service des autres et non au service de sa propre gloire. Un conseil : si un homme politique vous confie en avoir fait son livre de chevet, méfiez-vous de lui ! C’est sûr, je n’irai pas jusqu’à déconseiller sa lecture, pas plus que je ne déconseillerai « Mein Kampf », mais je pense seulement aux dégâts que cela pourrait engendrer chez les esprits influençables…

Un vrai Jacques Séguéla du XVIème siècle!

7 étoiles

Critique de Sissi (Besançon, Inscrite le 29 novembre 2010, 54 ans) - 3 décembre 2010

C'est en effet en véritable visionnaire que Machiavel expose toutes les qualités (et surtout les défauts) dont doit être doté un souverain s'il veut mener à bien sa mission, à savoir faire régner l'ordre et se maintenir à son poste.
Il avait déjà compris à quelle point l'image que renvoie un prince à ses sujets est essentielle et en cela, "le Prince", dédié à Laurent II de Médicis (qu'il exhorte à la fin du livre à terrasser les invasions barbares dont l'Italie est victime), est un véritable outil digne d'un "conseiller en communication" ou "conseiller en image" d'aujourd'hui.

"Il n'est donc pas nécessaire à un prince de posséder toutes les vertus énumérées plus haut; ce qu'il faut, c'est qu'il paraisse les avoir."

"Le prince doit donc soigneusement prendre garde que jamais ne lui sorte de la bouche un seul mot qui ne soit marqué des cinq qualités en question. A l'entendre, à le voir, , qu'il semble tout confit de pitié, de foi, d'intégrité, d'humanité, de religion."

L'adjectif tiré de son nom, le machiavélisme, s'explique par des idées très tranchées, très catégoriques et pas forcément honorables sur la façon de gouverner.
Néanmoins, pour tempérer les choses, et ne pas faire du "Prince" une éloge au despotisme, toutes ces considérations sont toujours expliquées, justifiées, et contrebalancées par d'autres arguments qui, s'ils sont discutables parfois, méritent qu'on y réfléchisse sans les rejeter d'emblée (un prince doit certes user de la ruse et parfois de la force, mais c'est parce que l'homme est intrinsèquement frivole, versatile et méchant; un prince doit être craint mais il ne doit jamais inspirer la haine; un prince ne doit jamais toucher ni aux biens ni aux femmes de ses sujets etc...).
De plus, chaque théorie est illustrée par des exemples concrets, que ce soit dans la Rome Antique, en Grèce, ou dans une ville d'Italie à l'époque de l'auteur.

Après un début fastidieux, très descriptif, où sont répertoriés les différents types de principautés et monarchies, puis de longs passages relatant les différentes guerres auxquelles les grandes familles toscanes se sont livrées (le tout de manière très détaillée et parfois franchement hermétique), le livre aborde une seconde partie plus philosophique sur l'art et la manière de gérer le pouvoir.... et surtout, encore une fois, de le conserver.
Chaque chapitre est titré et expose clairement ce dont il va être question.

C'est cette clarté du propos qui m'a séduite; c'est la qualité des démonstrations (avec lesquelles on n'est bien sûr pas forcément d'accord!) et la conviction qui anime l'auteur qui m'ont agréablement surprise, et qui ont rendu cette lecture, finalement, pas si déplaisante....

Acéré et inusable

9 étoiles

Critique de Fa (La Louvière, Inscrit le 9 décembre 2004, 49 ans) - 30 août 2010

Conseiller les princes, entreprise difficile s'il en est. Machiavel apporte à travers le Prince une pierre fondamentale à l'analyse de la politique, en la distinguant de toute vertu morale.

Très clairement, cet ouvrage constitue une pierre majeure à la réflexion politique, si le prince doit être vertueux, Machiavel considère qu'à travers cet adjectif, il doit être avant tout efficace, afin de mieux se prémunir contre la mauvaise fortune.

Un livre qui en définitive nous apprennent à nous méfier de ceux qui se drapent de leur vertu morale pour poursuivre des fins politiques. La politique, c'est aussi savoir arriver au pouvoir et y rester.

Un remarquable ouvrage sur la nature humaine.

Comment être (ou devenir) bon prince ?

9 étoiles

Critique de Millepages (Bruxelles, Inscrit le 26 mai 2010, 65 ans) - 12 août 2010

Niccolò Machiavelli le Florentin (1469-1527) fut le fin observateur des processus de prises et de maintiens de pouvoir qui émaillèrent son siècle et les précédents.
Fort de ces connaissances en stratégie de pouvoir, il s'est fait une spécialité de conseiller les plus grands, souvent appelés à élargir leur territoire sous peine d'être eux-mêmes amputés d'une partie du leur : manger ou être mangé, c'était l' obsession des grandes familles à l'époque.
Dans "Le Prince", c'est à Laurent de Médicis que Machiavel s'adresse : "Comme donc je désirais m'offrir à Votre Magnificence avec quelques témoignages de ma soumission envers elle, je n'ai trouvé dans mon bagage chose dont je fasse plus de cas et d'estime que la connaissance des actions des grands hommes, connaissance que m'ont enseignée une longue expérience des choses modernes et une lecture continuelle des anciennes".
Le ton de déférence utilisé révèle des ambitions plus personnelles de la part de Machiavel, qui rêvait certainement d'un Ministère dans le futur gouvernement princier.
Machiavel n'a probablement jamais échafaudé le moindre plan "machiavelique", mais il n'empêche que ses analyses des victoires comme des défaites et les leçons qu'il en tire méritaient certainement de servir de guide aux puissants d'hier et - dans une certaine mesure - d'aujourd'hui.

Froide pertinence...

6 étoiles

Critique de Soldatdeplomb4 (Nancy, Inscrit le 28 février 2008, 35 ans) - 12 janvier 2010

Je comprend d'où vient le terme de machiavélisme. L'auteur voit tout froidement, et faire de la politique consiste à faire au mieux, en dépit de toute considération humaine/morale, pour se maintenir au pouvoir. Certains passages sont choquants, car datés de 500 ans, et surtout en opposition complète avec l'idée qu'on se fait d'un bon dirigeant (en particulier sur l'usage utile de la cruauté, ou sur l'intérêt de pas être trop doué...). D'autres sont d'une justesse et d'une acuité incroyable encore aujourd'hui.
C'est une lecture difficile, car illustrée de nombreux exemples de l'époque de Machiavel, en Italie. C'est une période que je ne connais pas du tout, et j'ai dû m'accrocher. Cela vient s'ajouter à la désuétude du style.
Une lecture instructive, mais épuisante!

L'art de se vendre

9 étoiles

Critique de Sahkti (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans) - 1 août 2007

Ne perdons pas de vue, à propos de ce texte, qu'il s'agit des ambitions politiques, sociales et personnelles d'un dignitaire déçu par l'évolution de sa ville et qui compte profiter du retour au pouvoir d'une famille déchue pour retrouver sa place et les honneurs. Si "Le Prince" se présente comme une leçon d'intérêt général, c'est avant tout un brillant plaidoyer en faveur d'un homme, l'auteur lui-même. Une tentative ratée du vivant de Machiavel, il faut le dire, on ne sait même pas si Laurent de Médicis l'a jamais lu.

Ce qui me paraît très intéressant dans cet essai est la haute connaissance par Machiavel des principautés et autres formes de pouvoir présentes à l'époque en Europe et la manière dont il les décrit, les utilise, pour appuyer sa théorie. Les raisons de la conquête d'un pouvoir et de sa perte sont décortiquées de manière détaillée et judicieuse; de la théorie à la pratique, il n'y a qu'un pas à franchir.
La création et le respect des lois, mais aussi (et surtout) la ruse et le pouvoir armé sont les meilleurs moyens de conquérir un pouvoir et de le conserver, tâche peu aisée, ce que compte bien démontrer Machiavel qui s'y entend pour étaler les échecs des autres et en tirer des leçons.
Ne pas oublier la mise en valeur du peuple fait partie des enseignements du florentin, qui apporte là une vision modernisée de la politique alors en vigueur. Le rôle des vertus morales est également très important.
Le machiavélisme apporte sur ce point une nouvelle approche de la morale, de l'immoralité, qui n'a pas toujours été bien comprise et a trop souvent valu une définition réductrice à la notion de machiavélisme, résumée au Bien et au Mal. L'immoralité anticipée telle que détaillée par Machiavel mérite d'être analysée en profondeur, elle qui a servi de fondement à tant de luttes et de conflits.
"De principatibus" (il me semble que le titre original reflète davantage le contenu du texte que "Le Prince") est un guide personnalisé à usage d'un politique ambitieux et cynique; destiné aussi à assurer la montée de Machiavel dans le sérail politique au plus haut niveau. Ambitieux, certes. Intelligent et intéressant. Sous-estimé par ses pairs lors de sa rédaction. Dommage, cela aurait certainement changé le visage du pouvoir florentin, voire italien.

Mauvaise réputation

6 étoiles

Critique de Pearl_Grey (, Inscrite le 2 mars 2007, 38 ans) - 6 avril 2007

Machiavel n'est ni un démon ni un saint, c'est un stratège qui explique comment établir un royaume et le conserver en recourant, au besoin, à des solutions moralement condamnables mais qui ont le mérite d'être efficaces: la stabilité du royaume avant tout. La politique est un perpétuel rapport de force qui ne laisse pas ou peu de place aux consciences chatouilleuses...

Complexe tant dans la langue que dans le sujet mais intéressante et, bien qu'ayant été écrite par un italien de la Renaissance pour un monarque italien de la Renaissance, l'analyse politique n'a pas vieilli et donne à réfléchir sur tous les gouvernements de toutes les époques.

Gigantesque

10 étoiles

Critique de Aaro-Benjamin G. (Montréal, Inscrit le 11 décembre 2003, 55 ans) - 14 juin 2005

Je ne dirais pas que ce livre est aisé à lire. C’est un ouvrage plutôt austère qui nécessite, selon moi, des années d’études pour en comprendre toute l’envergure. Souvent cité comme le livre de chevet de nombreux politiciens, il s’agit d’une incursion brutale dans l’art complexe de gouverner, de gérer le pouvoir et surtout de conquérir…

Des millions ont été choqués par l’audace de Machiavel et auraient préféré se barricader derrière le confort de l’indifférence et de l’ignorance. Je ne suis pas de ceux là. Il serait prétentieux de ma part de dire que j’ai tout compris mais j’ai été subjugué.

J’imagine que personne qui lit ces lignes n’aspire à devenir président d’un pays. De ce fait, la sagesse intemporelle étalée à chaque page du « Prince » n’est assurément point attirante. Néanmoins, il faut le lire, si ce n’est que pour admirer le génie à l’état pur.

« Tout n’est pas politique, mais la politique s’intéresse à tout. »

Un bijou trop souvent ignoré

10 étoiles

Critique de Katt (Paris, Inscrite le 25 janvier 2005, 38 ans) - 25 janvier 2005

Cette oeuvre est un bijou! Il sert tant à la compréhension de la politique de nos jours qu'il nous éclaire sur un passé trop souvent passé sous silence. De même, certains passages peuvent être repris dans nos vies quotidiennes. Il s'agit d'une merveille et qui plus est aisé à lire. Lisez-le au plus vite si ce n'est encore fait...

Précurseur de la démocratie

9 étoiles

Critique de Alertinfo (Paris, Inscrit le 11 avril 2001, 50 ans) - 11 avril 2001

C'est l'ouvrage qu'il faut lire pour comprendre l'alphabet du langage politique encore utilisé aujourd'hui.
Cet ouvrage a parfaitement résisté au temps.

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