Le Coureur de Froid
de Jean Désy

critiqué par Libris québécis, le 16 décembre 2002
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
En quête du paradis perdu
Jean Désy est un médecin qui s'adonne à l'écriture. L'expérience du métier jointe à son attrait du Grand Nord, qu'il a parcouru comme le héros de son roman, donne à son oeuvre une crédibilité qui n'est pas sans rappeler Saint-Exupéry dans Vol de nuit. Le Coureur de froid de l'auteur natif de Kénogami peut se voir d'ailleurs comme une synthèse des oeuvres du célèbre pilote.
Julien, le héros, est un médecin qui fuit les contraintes sudistes du pays des blancs après que sa femme l'eût quitté. Cette séparation l'amène à renouer avec l'essentiel de la vie qu'il pense atteindre en pays inuit. Il y est heureux et trouve même l'amour auprès d'une autochtone qui désire un enfant de lui.
Il n'en fallait pas plus pour que resurgisse en lui un passé récent. Son désir de renouer avec l'essentiel englobe aussi des liens avec sa petite fille qu'il a abandonnée entre les mains des vilains blancs. Il projette d'aller à sa rencontre en suivant en motoneige la route de la taïga. Un tel voyage est périlleux. Julien se retrouve donc au pied d'un maigre mélèze qu'il n'a pu éviter à cause du blizzard qui réduisait à néant la visibilité.
Cet accident aiguille le roman sur une voie qui le transforme en une aventure de survie. La connaissance de la chasse et de la pêche devient précieuse pour quiconque affronte cette terre sauvage, pire qu'un désert. Il faut savoir abattre un caribou (un renne) et être capable de boire son sang si on veut éviter la déshydratation. Ce long périple conduit le héros à la cabane d'un vieil homme qui se meurt du cancer. C'est grâce à un renard que Julien a senti cette présence humaine, qui s'avère très utile dans sa quête d'idéal.
On n'est pas loin de l'imaginaire du Petit Prince. Ce roman fait ressortir l'importance d'autrui et d'un monde qui doit se redonner une virginité. Jean Désy propose le modèle inuit pour contrer celui des blancs. Il rejoint l'univers d'autres auteurs comme Louis Hémon qui, avec son François Paradis, montrait le rebelle qui refuse d'être inféodé, mais que ses amours ramènent vers le Sud.
Avec une plume poétique inégale, l'auteur fixe un objectif qui devrait plaire à ceux qui cherchent le paradis perdu.