J'ai été absolument conquise par l'univers de ce roman : Mais attention, il est dense et touffu, une seconde lecture sera pratiquement indispensable.
Basiquement, on pourrait dire qu'il s'agit de la vie de profs qui s'interrogent tant sur eux-mêmes que sur l'utilité de leur métier. Mais chaque personnage est très travaillé, fouillé, et leurs interrogations ou convictions profondes sont tellement bien amenées, qu'on en arrive à les ressentir soi-même. On peut ainsi définir ses propres prises de position sur les sujets évoqués... Sujets eternels... Qu'est-ce que la littérature ? A quoi sert-elle ? Le talent est-il inné ou acquis ? Qu'est un prof aujourd'hui ? etc...
p. 194
"On ne peut pas former un artiste, avait-elle déclaré. Il faut la grâce. Le talent. Le don. Le génie. On l'a ou on ne l'a pas. Cela ne s'apprend pas. [] On peut accomplir la démarche créative de A à Z, étudier les méthodes des autres, lire les biographies des grands écrivains, tenir un journal, observer dans ses travaux personnels une authentique progression, être sincère, vérifier tous ses mots au dictionnaire, les mâcher consciencieusement, dire ce qu'il faut pour plaire, s'enfoncer dans les ténèbres de l'inconscient, s'imposer des contraintes formelles externes, déconstruire sa langue, soufrir autant que Tennessee Williams, utiliser les drogues, bâtir son cévé brique par brique _ et accoucher d'un gros rien sans grâce et sans intérêt."
Rassurez-vous, Madame La Rue, ce n'est pas votre cas.
Cuné - - 57 ans - 2 octobre 2004 |