Bric-à-brac hopperien de Thomas Vinau, Jean-Claude Götting (Dessin)

Bric-à-brac hopperien de Thomas Vinau, Jean-Claude Götting (Dessin)

Catégorie(s) : Arts, loisir, vie pratique => Arts (peinture, sculpture, etc...)

Critiqué par Jlc, le 4 décembre 2012 (Inscrit le 6 décembre 2004, 81 ans)
La note : 8 étoiles
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Le peintre de l'attente

C’est ainsi qu’un critique d’art a qualifié Edward Hopper. Si c’est artistiquement vrai, cela l’est aussi de façon plus triviale à voir les longues files d’attente de spectateurs qui essayent de rencontrer au Grand Palais ce maître du siècle précédent. On n’ira pas jusqu’à penser que Thomas Vinau a eu le pressentiment de cette longue quête et de l’usage que pourraient en faire les amateurs d’art lorsqu’il a écrit « Bric à brac hopperien ». Toujours est-il que le lire en faisant la queue est aujourd’hui un agréable moyen de passer le temps. Et bien plus que ça.

Thomas Vinau a écrit des textes très originaux et poétiques que Jean-Claude Gotting a magnifiquement illustrés de dessins très « hopperiens ». Ce bric à brac n’est pas un inventaire à la Prévert, ni une musique calquée sur un poème pour en faire une chanson d’Aragon. Thomas Vinau n’a pas écrit ses textes pour les plaquer sur tel ou tel tableau qu’il voudrait illustrer. D’ailleurs, Hopper qui a été illustrateur pour gagner sa vie en avait gardé une profonde frustration. Quand Vinau parle d’un tableau précis, il le fait de façon détournée. Ainsi pour« Automat » : Hopper peint de l’intérieur une femme seule qui attend dans une cafeteria en buvant une tasse de café ce qui suggère à Vinau : « J’aime les bars déserts » et à Gotting un dessin vu de l’extérieur. Ainsi pour « Summertime » où Vinau emploie des mots qui trahissent un désir impatient.

Ce petit livre est fait de sensations : « Finalement je ne dessine que du temps ». On y trouve des listes : sa LAL se compose, entre autres, « Des fleurs du mal », « L’homme sans qualités » ou encore un livre de Le Corbusier). La correspondance est-elle vraie ou imaginée ? Je ne suis pas certain qu’il ait écrit à sa future femme, Jo –la connaissait-il déjà ?- en septembre 1909 depuis Paris où il n’était plus. L’essentiel n’est pas dans la vérité calendaire mais dans ce que Hopper –ou Vinau ?- dit sur ce « vieux continent triste et merveilleux (où) la solitude n’a pas le même goût. ». Des brins de vie, de minuscules détails sont plus révélateurs qu’une étude d’experts. C’est l’homme autant que le peintre qui intéresse l’auteur. L’homme et sa femme, Jo, qui lui est indissociable et qui le suivra là-bas, ailleurs, dix mois plus tard. En guise d’au revoir, ce petit poème :
« Elle était peintre.
Impossible
De mettre la main
Sur une de ses toiles.
C’est comme si,
Par amour,
Elle avait effacé
Le travail
D’une vie entière ».

Et nous, suivant Thomas Vinau, nous n’allons plus regarder « ces paysages ou ces bâtiments mais la lumière qui vient dessus ; ou plutôt les ombres… avec toujours le temps qui passe, perceptible. »

Maintenant, c’est Hopper qui vous attend.

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