Mayerling
de Claude Anet

critiqué par Nathafi, le 18 février 2013
(SAINT-SOUPLET - 57 ans)


La note:  étoiles
Version "Passion"

Claude Anet, de son vrai nom Jean Schopfer, a écrit "Mayerling" lors de la dernière année de sa vie. Il narre donc dans cet ouvrage la magnifique histoire d'amour de Rodolphe et Marie Vetsera, s'appuyant sur quelques documents officiels, comme l'indiquent les notes jalonnant l'ouvrage.
"Mayerling" restera longtemps encore un mystère pour mille et une raisons politiques qui empêchent toujours aujourd'hui les autorités de révéler la vérité.

Le livre ici présent s'appuie donc essentiellement sur la passion qu'ont connue ces deux êtres, Marie, jeune fille naïve, pure et innocente, et Rodolphe, époux malheureux, volage et désabusé.
On aimerait penser que les choses se soient réellement passées ainsi, que ces deux êtres soient allés jusqu'au bout de leur rêve, être unis pour l'éternité. L'auteur évoque tout de même la situation politique, la personnalité de Rodolphe, son opposition constante avec son père. Il met en avant aussi les manipulations de l'entourage du Prince, comme celles de son cousin, Jean Salvator.

Ce livre n'apporte donc pas d'éclaircissement quant à un éventuel complot. Les faits réels relatés concernent surtout la triste fin des deux amants, le dédain envers Marie et sa dépouille, d'après un rapport de police authentifié.

Mais quel bonheur de lire cet ouvrage, son écriture fluide nous transporte dans cet univers fastueux, la progression est aisée.

C'est cette version qui fut adaptée au cinéma ; en couverture, nous trouvons Catherine Deneuve, avec sa jolie chevelure blonde... Alors que Marie était brune...
« In Liebe vereint bis in dem tode » (Unis par l’amour jusque dans la mort.) 8 étoiles

On connaît tous l’histoire.
Pourtant, ce récit, très classique, relatant les faits de manière chronologique, donne un éclairage nouveau sur le destin tragique de Rodolphe de Habsbourg et Marie Vetsera, en mettant plus particulièrement l’accent sur la personnalité des protagonistes , celle des deux amants en premier lieu, mais également celle de l’Empereur François-Joseph, père de Rodolphe, homme sans imagination, pragmatique, froid et voué corps et âme à ses fonctions, et celle de l’Impératrice Elisabeth, sauvage, cérébrale, détestant le protocole, préférant la nature, les livres, les voyages et la solitude.
Rodolphe est le seul de ses enfants en qui elle se reconnaît, le prologue relate la naissance de ce dernier, qui laisse, déjà, alors qu’il n’est en vie que depuis quelques minutes, présager une grande fragilité :

« Il appartenait à une race fine, sensible, trop faible pour supporter, non pas seulement le fardeau du pouvoir, mais celui de la vie, race d’êtres mélancoliques, inégaux à leur destinée, que parfois la folie emmenait loin du monde des humains. »

Et on peut d’ailleurs se demander si, quand bien même les circonstances ne l’y avaient pas poussé, Rodolphe n’aurait pas, de toute façon, attenté à ses jours à un moment ou à un autre : se définissant lui-même comme « un incorrigible rêveur », il est impulsif, impétueux, solitaire, subit le pouvoir comme une corvée, ne trouve de sens à sa vie, se noie dans la débauche mais n’y trouve pas plus de bonheur, il se sent acculé, emprisonné, considère le suicide comme une libération, et sur son bureau trônent une tête de mort et un revolver.

Marie Vetsera est son illustre contraire. Dans toute la fraîcheur de sa très grande jeunesse, elle est tout à la fois exaltée et douce, fragile et forte, passionnée et résolue (le passage où elle est la seule à ne pas s’incliner devant sa rivale, qui est quand même la belle-fille de l’Empereur, prouve sa détermination.)
Surtout, elle aime Rodolphe d’un amour inconditionnel, désintéressé, pur et sincère. Le don qu’elle lui fait d’elle-même est absolument sans réserve, entier et totalement définitif. C’est pour cette raison qu’il va tomber éperdument amoureux d’elle, alors qu’il a la possibilité, étant d’une très grande beauté, d'avoir toutes les femmes qu’il désire.
Il voit en elle son seul salut. Il a un besoin vital et irrépressible d’elle, n’est véritablement heureux qu’avec elle. Elle le rassure, l'apaise, et sait le choyer comme personne ne l'a fait avant elle.

Mais la raison d’Etat finira par l’emporter. Le refus du pape d’annuler le mariage de Rodolphe et de la Princesse Stéphanie, et les remontrances sans appel de l’Empereur lorsqu’il a vent de cette liaison (qui sera extrêmement courte !) pousseront les amants dans leurs derniers retranchements… Mayerling.

La raison d’Etat l’emportera également après le drame, à cause d’un affolement que l’Empereur regrettera par la suite. Ce qu’il advint de la dépouille de Marie est très triste, et leur volonté d’être enterrés l’un à côté de l’autre ne sera pas respectée.

Une belle lecture qui permet de comprendre (tout du moins un peu) ce qui s’est passé en amont du suicide du couple, sans pour autant casser la légende de cette belle histoire, celle d’un amour absolu.

Sissi - Besançon - 54 ans - 19 avril 2013