Le cycle de Cyann, Tome 5 : Les couloirs de l'entretemps
de François Bourgeon (Scénario et dessin), Claude Lacroix (Scénario et dessin)

critiqué par Blue Boy, le 10 mars 2013
(Saint-Denis - - ans)


La note:  étoiles
Vertiges spatio-temporels
Réussissant à déjouer la surveillance de son « protecteur », l’inspecteur d’Empire Akhmar, Cyann réussit à regagner Ohl avec l’aide d’Optech qui la conduit à une porte spatio-temporelle. A son grand désarroi, elle constate, propulsée 30 ans dans le futur, que beaucoup de choses ont changé sur la planète qui l’a vue grandir : son amie Nacara a pris le pouvoir et dirige Ohl d’une main de fer, après avoir pactisé avec L’Empire, écarté les MajO et fait assassiner sa jeune sœur Azurée. Nacara, persuadée d’avoir affaire à une dangereuse mystificatrice, décide d’enfermer Cyann. Mais celle-ci parviendra à s’échapper de justesse pour quitter Ohl à bord de l’Entretemps, un vaisseau conduit par les mystérieux Nextans et capable de voyager dans le temps sans passer par le réseau du Grand Orbe impérial. Son objectif désormais : retourner sur Ohl pour sauver Azurée des griffes de Nacara, juste avant son assassinat…

J’ai eu un peu de mal à rentrer dans cet épisode, obligé de faire plusieurs retours en arrière pour en saisir les tenants et les aboutissants. En effet, l’histoire démarre avec de nombreux personnages dont on ne sait pas très bien qui ils sont et quel est leur rôle. Et puis comme souvent avec Bourgeon, l’intrigue finit par retomber à peu près sur ses pattes, mais celui-ci semble décidément avoir une fâcheuse propension à nous perdre dans les méandres tortueux d’un scénario touffu, même si au final on parvient à rassembler les pièces du puzzle… Il est vrai que ces allers et retours spatio-temporels nuisent parfois à la fluidité du récit, et il faudra fournir quelque effort pour ne pas s’égarer dans les remous instables des calendriers Ohlien et impérial… Une fois arrivé à la fin de l’épisode, on aura pourtant bien envie de connaître l’issue de ce space-opera, se disant qu’à la deuxième lecture, tout paraîtra beaucoup plus clair…

Un des principaux atouts, dans cet épisode comme pour l’ensemble de la saga, est la profondeur psychologique des personnages, notamment l’évolution de Cyann que ses nombreuses péripéties ont profondément transformée. De même, la façon dont Nacara est changée par le pouvoir est frappante, la rendant méconnaissable (de façon plus flagrante encore dans le tome précédent où elle apparaissait plus vieille de 30 ans). Les retrouvailles de Cyann avec sa sœur Azurée constituent aussi un moment fort de l’histoire, cette jeune sœur, désormais de quelques mois plus âgée, aussi fougueuse et effrontée que ne l’était à une époque sa sœur ainée. Nacara, prétendant vouloir la protéger d’elle-même, décidera de la faire interner. Mais n’est-ce pas plutôt parce qu’elle la considérait comme un obstacle dans sa lutte pour conserver le pouvoir ? Tout cela confère à cet épisode un côté shakespearien, que viendra accentuer un retournement de situation tragique…

Pour ce qui est du dessin, rien à redire, c’est toujours aussi grandiose, la précision du trait de Bourgeon, la beauté des décors et le réalisme des personnages donnent l’impression d’être au cinéma. L’auteur ne renonce pas à son goût pour les formes féminines et sensuelles qu’il reproduit avec talent, mais à la manière d’un Tarantino et pour étouffer dans l’œuf toute polémique sur son machisme supposé, donne à ses héroïnes un rôle majeur et une personnalité forte.
Retour sur Ohl 8 étoiles

Ce tome est marqué principalement par le retour de Cyann sur Ohl afin d’aider sa sœur Azurée. Dans les couloirs de l’entretemps, il se passe beaucoup de choses et c’est certainement l’album le plus chargé en évènements importants. Cyann voyage beaucoup, retombe dans les intrigues du pouvoir et découvre une sœur qui a beaucoup changé. L’occasion pour le lecteur de renouer avec des personnages et des lieux familiers. Le scénario est bien mené mais j’avoue que je me suis un peu lassé de l’intrigue principale. La longue attente pour lire ce cinquième opus n’est certainement pas étrangère à ce relatif désintérêt et même en relisant toute la série, cela ne marche plus aussi bien. Ce n’est pas très grave puisque de toute façon pour moi, la richesse de cette saga porte surtout sur les magnifiques dessins et l’univers inventé par Bourgeon et Lacroix. À chaque fois le voyage est magnifique et c’est pour cela que j’aime autant ce cycle.

Kabuto - Craponne - 64 ans - 18 janvier 2015