L'amour d'Erika Ewald
de Stefan Zweig

critiqué par Bluewitch, le 24 février 2003
(Charleroi - 45 ans)


La note:  étoiles
Rendez-vous manqué avec le destin
« Elle avait désormais conscience de cette réalité profonde : la grande paix sacrée pour laquelle elle avait lutté ne peut s’obtenir qu'à l'issue d'une douleur intense et purificatrice, le bonheur n’existe pas pour celui qui n’a pas parcouru le chemin de la souffrance. »
Erika Ewald est une jeune femme convenable, l’âme artiste, pure et rêveuse. Elle enseigne le piano et vit la musique. Une existence simple et sans effervescence en dehors des moments passés avec ce violoniste, qui partage sa passion du langage musical. Instants dont l'intensité dépasse sa sensibilité de jeune fille candide et ouverte au grand amour. La flamme grandit, mais pour lui, le sacrifice de la musique au profit du mariage est inconcevable. Sensualité virile et mots tendres amènent Erika au bord de l'abandon, du don de soi au-delà des convenances. Et pourtant. Elle résiste, refuse ce sort de femme libre de son corps qu’elle pourrait offrir au risque d'être abandonnée ensuite.
C'est l'angoisse et la solitude.
Mais voilà que l’amour revient, lancinant. Engourdissant, aveuglant, anesthésiant, euphorisant. Il faut en retrouver l’objet… Mais sera-t-il toujours là, présent à l'attendre ??
L'amour d'Erika Ewald, c’est une histoire sans histoire. C’est l’amour sans aboutissement, c’est la rencontre avec un destin auquel on laisse porte close. C’est une existence vécue en quelques semaines. Et puis plus rien.
Premier texte de Stefan Zweig que je découvre : poésie, sensibilité, atmosphère réservée mais enveloppante, vérité, vies humaines décrites avec la subtilité d’un œil vif qui peut décortiquer le banal sans lui ôter charme et crédibilité. Zweig aurait tout autant trouvé sa place à notre époque…
L'aveuglement d'un amour platonique 7 étoiles

Cette jeune artiste s'amourache aveuglément du pianiste qu'elle accompagne au violon, jusqu'au jour où elle est brutalement mise devant le fait accompli : elle doit l'oublier, suite à une déclaration qu'il lui fait, tout aussi intellectuelle et intériorisée, empreinte de la passion pour l'art qui les a assemblés, tout en demeurant à distance.
Cette nouvelle met en scène un amour dévot, avec tout ce qu'il a d'entier, d'indépassable, et les conséquences dévastatrices du renoncement à un projet sourd et diffus de désir, brûlant et destructeur.
Elle est violente, semblable à une flamme à l'origine d'un incendie de forêt : ce fragile individu se consume subitement, sur le fondement précaire d'un désir infondé, et non totalement avoué. Si elle est brillante, elle met mal à l'aise, mais cela reste très bien analysé.

Veneziano - Paris - 47 ans - 31 décembre 2013


L'intime émotionnel sublime... 10 étoiles

Que d’émotions intenses en lisant cette nouvelle!

Un texte tout au long duquel on en vient à se demander comment un homme peut connaitre aussi bien, aussi intimement le coeur d'une femme et c'en est presque déroutant tant ou est dit, tout est vrai, si vrai.

Oui, Blue a raison de souligner toute la poésie et la sensibilité, le charme de ce texte qui nous transporte comme toujours avec Zweig et qui, oui, ne font qu'accompagner un récit, une histoire d'amour, de passion(s) folles assez banale dans la réalité: c'est cela, pour moi, tout l’extrême talent voire au-delà de cet auteur.


"Erika Wald" ou l'art majeur de l'intime.

Provisette1 - - 12 ans - 7 juillet 2013


Une passion... 8 étoiles

...pour l'amour et tout ses aspects m'anime au moment où je lis ce livre (et où j'écris cette critique), et l'aspect enfantin, "sans mesquineries" de l'amour qu'éprouve Erika Ewald me semble être la forme la plus noble de l'amour, mais aussi la plus douloureuse.
Encore une fois, après 'le joueur d'échec' et 'la confusion des sentiments', Zweig m'apparait comme merveilleusement doué pour décrire les sentiments humains les plus exaltants et les plus torturants.

Lestat - - 36 ans - 27 juillet 2005