Par le sang d'un prince
de Paul Lombard

critiqué par CC.RIDER, le 6 mai 2013
( - 66 ans)


La note:  étoiles
Un assassinat politique
En 1804, Bonaparte, alors Premier Consul, envoie de l'autre côté du Rhin plusieurs commandos de gendarmes d'élite (au total plus de mille hommes) pour s'emparer de la personne du Duc d'Enghien, dernier descendant de l'illustre famille des Condés. Sur les conseils de Talleyrand, Napoléon piétine toutes les conventions internationales, viole l'intégrité du territoire de l'électeur de Bade et tous les traités de paix pour kidnapper un présumé comploteur, lui faire subir une parodie de justice (il ne disposera d'aucun avocat) et le faire aussitôt fusiller dans les douves du château de Vincennes. Cette exécution de sang-froid mettra fin à toutes les tentatives de restauration monarchique, placera le Premier Consul sur un pied d'égalité avec les jacobins les plus enragés, assoira définitivement son pouvoir et lui permettra même de le transformer en empire légitime autant à l'extérieur qu'à l'intérieur. Cet assassinat politique fut donc tout bénéfice pour Napoléon.
« Par le sang d'un prince » est un excellent livre d'histoire plus passionnant qu'un roman historique. Le célèbre avocat Paul Lombard y produit un formidable travail d'historien basé sur une documentation sérieuse, des citations innombrables et un croisement de sources éclairant non seulement un fait historique qui put être controversé mais également une période particulièrement troublée. Le lecteur découvrira la personnalité rétrograde, pleine de bravoure et de panache du jeune duc, toujours en première ligne pour combattre « la Gueuse » sans ignorer son côté léger, irréfléchi et hédoniste. Au moment de sa capture, il ne s'occupe plus guère que de chasse et d'amour après avoir guerroyé pendant une quinzaine d'années sous divers étendards et dans l'armée du Grand Condé. Et, comme toujours, la réalité dépasse la fiction. C'est particulièrement vrai dans cette histoire qui se produit juste après l'attentat à la machine infernale rue Saint Nicaise (qui permettra d'ailleurs à Bonaparte de se débarrasser à la fois des jacobins et des royalistes), des complots de Moreau, Pichegru, Dumouriez et des ultimes tentatives d'assassinat de Georges Cadoudal. L'accusation impliquera le petit duc qui n'avait pourtant aucune connexion avec eux et le seul tort de se trouver trop près des frontières, de recevoir de l'argent anglais et d'être allé s'amuser au carnaval de Strasbourg. Un livre passionnant bien que d'une lecture un peu laborieuse, le style de Lombard manquant un peu de rythme et de vie comme tout traité historique sérieux qui se respecte.