Marion une condition féminine au XXe siècle
de Rose Barberousse

critiqué par JulesRomans, le 21 mai 2013
(Nantes - 66 ans)


La note:  étoiles
Après cent lieues de course, la belle s' mit à pleurer. Qu'avez-vous donc la belle, qu'a vous tant à pleurer ? (extrait de la chanson enfantine "Marion")
Marion fait partie des enfants nés durant la Première Guerre mondiale et n’a aucun souvenir de lui ; elle est toutefois fière lorsqu’elle est enfant de pouvoir dire qu’il était un "Diable bleu" et qu’il est décédé à Verdun en 1916. Les malheurs de l’existence font que sa mère meurt dans un accident de train dans le tunnel des Batignolles, alors qu’elle a moins de dix ans.

Elle est accueillie par une tante couturière comme sa mère à Asnières, veuve d’un héros de guerre, qui n’avait connu son homme que « dans la joyeuse exaltation d’un amour neuf ». Elle entretient une liaison avec Émile Plantin et l’aspect psychologique du remariage d’une veuve est approché sans traiter de l’aspect économique (elles perdaient au départ la totalité de leur pension puis se firent attribuer la moitié de celle-ci).

Nous suivons Marion dans son entrée dans le monde du travail dans un magasin de cartonnage près du lycée Fénelon à Paris. Les amours de cette dernière suivent les étapes traditionnelles de l’époque et l’octroi des congés payés lui permet de circuler en tandem avec Gilbert. Alors que Marion et son mari sont dans un village aux confins de l’Aveyron et du Cantal dont la famille de Gilbert est originaire. La conséquence de la Débâcle est que Gilbert part prisonnier en Allemagne, Marion se prive de tout pour améliorer le quotidien de son mari et elle lui envoie régulièrement des colis.

Elle n’a d’yeux pour aucun homme, toutefois un soir dans un cinéma parisien elle n’arrive pas à dominer ses pulsions sensuelles. Après cette brève rencontre avec une personne dont elle ne connaît rien, elle s’aperçoit qu’elle est enceinte. À une époque où les faiseuses d’ange risquent la guillotine et où toute la société se veut garante de la fidélité des femmes de "nos prisonniers" comment va réagir Marion ? Accepter de garder l’enfant, c’est prendre le risque de perdre Gilbert mais ce dernier ne lui a jamais donné la possibilité de goûter aux joies de la maternité.

Signalons au passage que le 21 avril 1949 est exécutée en France la dernière femme, Germaine Leloy-Godefroy, une Angevine qui avait assassiné son mari. Contrairement à la légende, l’avorteuse clandestine normande Marie-Louise Giraud n’est donc pas la dernière à mourir sur l’échafaud.

Rose Barberousse est la sœur de François Barberousse à qui on doit "Gusse", un roman dont l’action se déroule dans un village imprécis aux limites du Cher et du Loir-et-Cher. Alors que Rose Barberousse évoque essentiellement les années 1930 et la Seconde guerre mondiale, son frère montre les conséquences familiales de la mort d’un poilu.