Deux soeurs
de Barbara Garlaschelli

critiqué par Cyclo, le 22 juillet 2013
(Bordeaux - 78 ans)


La note:  étoiles
deux femmes et un homme
Un petit village de la campagne italienne, une maison isolée, où vivent ensemble deux sœurs célibataires proches de la quarantaine : Amelia est professeur dans un collège, Virginia, un peu attardée, s'occupe du ménage et de la cuisine. Amelia est belle, distante, forte d'apparence, Virginia est belle aussi (ses grands-parents "la disaient belle parce qu'ils l'aimaient"), mais fragile, nourrie de feuilletons sentimentaux de la télévision, et ne s'aventure guère loin de la maison. Toutes deux acceptent un jour un locataire, Dario, homme voluptueux et joueur, plus jeune qu'elles, et dont Virginia, femme-enfant, s'est éprise au premier coup d’œil. Dario, qui fuit des dettes de jeu, aime pour la première fois de sa vie. Mais il ne peut s'empêcher de séduire aussi Amelia. Or, cette dernière n'entend pas le partager, ce que Virginia, dans sa candeur naïve, accepterait volontiers. Quand le roman débute, Dario se réveille, attaché et immobilisé sur son lit dans la chambre aux volets fermés, et ne comprend pas ce qui se passe. Dans ce lieu clos qu'est la maison, cocon rassurant pour Virginia, mais qui se révèle étouffant pour Dario, le passé surgit sans arrêt, la mère à moitié folle, les grands-parents, les amis d'enfance, dont la jeune Giò, morte brûlée vive dans la dépendance au bout du champ. Et on comprend peu à peu la folie qui règne ici et qui mêle la solitude, la dépression, l'extraordinaire dépendance entre les sœurs, qui fera que Virginia, ayant libéré Dario dans l'intention de s'enfuir avec lui, reviendra à la maison.
Le roman est bref, c'est un thriller psychologique qui instille lentement les souvenirs anciens interférant dans le présent. On s'attache à ces personnages qui ont tous leur part d'ombre. Le style très direct est tout dans une violence contenue, et l'intrigue est construite de manière à causer constamment des surprises. Le personnage le plus intéressant est celui de Virginia que les grands-parents, en mourant, ont confié à Amelia parce qu'elle ne pourrait jamais se débrouiller toute seule. Pourtant elle a souvent une conscience claire de ce qui se passe, mais elle est comme nouée de l'intérieur depuis un drame ancien.
Bonne lecture, mais pas pour ceux et celles qui veulent un roman d'action. Ici, on est dans l'attente : "Quand on attend, l'existence ne nous appartient plus."