La nuit en vérité
de Véronique Olmi

critiqué par Deashelle, le 11 octobre 2013
(Tervuren - 15 ans)


La note:  étoiles
Au bord du gouffre, la force
Elle : « Sa vie était posée à côté d’elle, et elle ne parvenait jamais à la saisir tout à fait. »
Lui : « On l’avait pris en grippe. On ne pouvait pas le sentir. Et la cause, peut-être, ne lui appartenait pas. »

Elle : Loubia, une mère courage qui a perdu la joie, bien trop jeune et immature mais obstinée dans son amour pour son fils. « L'enfant grandissait et changeait, et ce qu'elle avait appris la veille ne lui servait plus le lendemain. C'était comme si sa vie de mère n'était qu'une répétition, et lorsqu'elle aurait appris et mémorisé son rôle, Enzo serait un adulte. Elle resterait toute seule avec un savoir qui ne lui servirait à rien, et lui il aurait essuyé les plâtres, voilà tout. » Lui: Enzo Popov un pré-ado rejeté, humilié et persécuté dans son collège de riches où elle a réussi à l’inscrire. Ils vivent dans un quartier huppé de Paris. Elle est la gardienne d’un appartement de riches collectionneurs le plus souvent absents.

Ensemble ils forment un curieux binôme qui affronte le monde avec une vaillance et une énergie peu communes. Enzo se réfugie dans la gourmandise « Il mangeait comme d’autres se rongent les ongles », aussi dans la lecture, son carnet de dessins et un monde imaginaire nocturne. Son surpoids et son survet’ noir l’ont tout de suite stigmatisé à l’école. Loubia se réfugie dans la cigarette et la conscience professionnelle et ses amourettes du samedi soir at home. Sa passion : l’astiquage corrosif de l’appartement … comme d’autres se rongent les ongles. Ensemble ils partagent la peur du lendemain.

Un mystère pèse sur la figure paternelle, la mère se refuse à détailler le poids du passé, le fils rêve l’héroïsme sur un fil de haute tension: le jour dans l’affrontement de la cruelle vie au collège, la nuit avec le fantastique de son imaginaire nourri de ses lectures. Un imaginaire salvateur qui lui guide la main et fait de lui un artiste du dessin. Son adresse le projette dans les étoiles.

Le roman est poignant, monté en forme de crescendo bouleversant alors que le début semble plutôt ordinaire. L’intensité dramatique, l’intérêt pour l’histoire, la finesse et la justesse de l’analyse du monde intérieur du jeune garçon, sa quête d’identité - question essentielle - tout passionne. Le thème de la filiation émerge lui aussi quand il s’évade - c’est écrit dans ses gènes - à la rencontre de son destin.

Le style est vivant et féroce comme l’envie de vivre, comme un hommage à la force de la résilience. Voici le récit passionnant d’une patiente reconstruction, d’une épreuve du feu purificatrice qui réussit à vaincre les démons de la nuit de l’adolescence et lui fait dire OUI à la vie.

http://albin-michel.fr/La-Nuit-en-verite-EAN=97822…
Comment se défendre quand la vie ne vous y a pas préparé ? 8 étoiles

J’ai été heureusement surprise par ce roman de Véronique Olmi, que j’ai trouvé plus intéressant que les précédents, moins creux.
Enzo, douze ans, vit avec sa jeune maman de 29 ans dans un grand appartement d’un quartier chic de Paris où elle fait le ménage. Cet appartement est la plupart du temps vide de ses propriétaires qui courent le monde et réapparaissent toujours sans prévenir. Enzo subit les moqueries de ses condisciples à l’école parce qu’il est « en surpoids » comme il aime l’expliquer. Il est harcelé, mais n’ose pas encombrer sa maman avec ses problèmes. Il la protège en cela et l’observe vivre une vie sans beaucoup de repères ni soutien.
Une nuit, Enzo va faire une rencontre de quelqu'un en détresse, comme lui. La fin de ce roman reste en suspens ou point d'interrogation, mais le destin semble se répéter, un destin qui subit le poids des générations précédentes malheureuses.
J’ai été touchée par la solitude d’Enzo, son impuissance face au groupe qui le harcèle, sa façon de faire le gros dos et d’encaisser sans savoir comment réagir.

Pascale Ew. - - 57 ans - 28 janvier 2014