Trois fois septembre
de Nancy Huston

critiqué par Saint-Germain-des-Prés, le 21 mai 2003
(Liernu - 56 ans)


La note:  étoiles
Kaléidoscope
Solange parcourt le trajet qui sépare son campus de la maison de sa mère le cœur lourd, lourd d'un carton bien ficelé de rouge, contenant journal intime, lettres et poèmes consignés là, comme dans un cercueil, par son amie intime Selena.
Selena - Solange, la lune - le soleil, l'extrême - la tempérance.
Renée, la mère de Solange, a très bien connu Selena.
Pendant un week-end huis-clos au finish, toutes deux vont tenter, à travers ces écrits, de lire en filigrane l’âme de Selena.

Selena aura la chance de vivre un amour parfait avec Jonathan, fait de promesses, de don total et éperdu, de liberté, de jouissance.
Sauf que Jonathan est appelé à aller au Vietnam, non pas pour défendre son pays, mais pour apprendre « à suivre des ordres pour sauver leur saloperie de peau ».
Selena, qui n’a pas été reçue à l’université désirée, part quand même à Cambridge partager un appartement avec Solange (acceptée, elle) et passe ses journées à travailler comme dactylo.
Selena et Jonathan, de tellement proches qu'ils ne faisaient qu'un, vont insidieusement se mé-comprendre, se mé-prendre.

Solange et sa mère découvrent, ébahies, les incohérences de Selena.
Celle-ci cherche des « signes » partout, afin de deviner si Jonathan s'en sortira vivant.
Nancy Huston réussit à décrire très finement ce qu’est le basculement dans la folie.
Un éclatement anarchique de l'esprit qui tente, comme face à un kaléidoscope, de reconstituer une image en cherchant des liens, quitte à les inventer.
Le fruit d'une époque un brin voyeur 6 étoiles

Le contexte historique que permet la lecture de ce journal personnel, pendant la guerre du Vietnam, de la jouissance sans entrave, du stupéfiant-roi et de la divine bouteille, où il n'y a pas que de la pomme, est intéressant. Les introspections et inquiétudes de cette jeune femme pour son amoureux enrôlé dans un conflit qui tourne au désastre émeuvent, mais découvrir tant d'aléas personnels et parcelles d'intimité déconcerte ; et le fait qu'il soit rapporté par deux tierces personnes qui commentent, de temps à autre, ce qu'elles découvrent en même temps que le lecteur, lui rappelle sa situation de voyeur. A l'odeur de soufre originelle, cet aspect malsain s'y ajoute. J'ai eu un peu de mal, je l'avoue, bien que les considérations conjoncturelles et générationnelles ont leur intérêt.

Veneziano - Paris - 47 ans - 26 juillet 2011


Déroutant et décevant 6 étoiles

Solange Vauginas essaie de reconstituer, en compagnie de sa mère Renée, le parcours de son amie de faculté Séléna Twick. Les deux femmes se basent sur des bribes de journaux intimes ainsi que des lettres retrouvées pour essayer de comprendre ce qui est advenu de Séléna. Celle-ci était tombée amoureuse de Jonathan qui avait dû assez vite partir se battre au Viet-Nam. Il lui écrit en essayant de lui décrire poétiquement les horreurs de la guerre et en lui témoignant amour et fidélité. Séléna, elle, commence à papillonner, continue ses voyages au LSD et ses parties arrosées d’alcool et enfumées de marijuana.
Et soudain, Séléna disparaît et personne ne retrouve sa trace. Le lecteur n’en saura pas plus et n’aura qu’à rester sur sa faim…
Nancy Huston a recours à un procédé, le « puzzle informatif » qu’elle reprendra avec plus d’ampleur et de réussite dans « Cantique des plaines ». Elle respecte encore la ponctuation et la chronologie, mais le lecteur n’accroche pas pour autant. Beaucoup de verbiage, d’informations inutiles en un mot de remplissage. L’ennui nous saisit rapidement car il ne se passe pas grand-chose dans ce livre et l’auteur n’arrive pas à rendre ses personnages attachants.
Le seul mérite de ce livre réside dans la description des mœurs un peu « baroques » des années 60 sur les campus américains. La grande époque du « Peace and Love », du « Sex, drugs and Rock and Roll. Le reste est sans grand intérêt.

CC.RIDER - - 66 ans - 28 mai 2007