L'élan d'Amérique
de André Langevin

critiqué par Dirlandaise, le 25 novembre 2013
(Québec - 69 ans)


La note:  étoiles
Un monde nouveau qui émerge
Antoine est un guide employé par la United States Pulp and Paper Company. Peu instruit, ne parlant que peu l’anglais, Antoine apprend que c’est probablement pour lui la dernière saison passée dans la forêt car la compagnie désire employer des hommes plus jeunes, plus instruits et sachant parler la langue anglaise. L’univers d’Antoine s’effondre. Il ne comprend plus rien à ce nouveau monde qui émerge et il s’accroche au passé. Peu à peu, la haine et la révolte s’emparent de son être tout entier lui faisant commettre des actes insensés. En parallèle, il y a la belle Claire, la fille du directeur, exilée dans un phare afin d’effectuer une cure de sommeil dans le but de la guérir d’une sévère dépression. Claire fait la rencontre de David, un homme récemment divorcé habitant un chalet isolé sur la côte. Elle en tombe amoureuse, développe bientôt une réelle dépendance à son égard et ne supporte pas ses longues absences.

Comment rédiger une critique de ce livre magnifique ? Comment lui rendre justice, décrire le lyrisme d’André Langevin, sa force d’écriture, les images fortes et d’une grande beauté qu’il a su faire naître sous sa plume ? Ses personnages tourmentés sont déchirés par leur passé et leur avenir incertain les ronge à force d’incertitude et de doute. Ce sont des êtres passionnés, vivant en symbiose étroite avec la nature sauvage et les éléments déchaînés. Leur vie intérieure est marquée par les drames et les amours malheureux. Ce sont des êtres blessés par la vie, vaincus et ne survivant que de peine et de misère, portant souvent en eux le poids d’une immense culpabilité et dont l’âme est accablée par la souffrance de l’humiliation.

Avec pour toile de fond la Crise d’Octobre, André Langevin évoque une partie de notre histoire québécoise peuplée d’hommes fiers et courageux comme Antoine, exploités par les Américains et qui, parvenus à la cinquantaine, ne parviennent plus à trouver leur place dans ce monde nouveau qui émerge.

J’ai particulièrement aimé le passage de la descente de rivière en canot d’Antoine poursuivi par une meute de loups. Du grand art !

Un de nos grands auteurs québécois. Dommage qu’il n’ait pas plus écrit car sa plume est d’une grande puissance et d’une indéniable beauté.