Faut-il tuer les petits garçons qui ont les mains sur les hanches ?
de San-Antonio

critiqué par JEANLEBLEU, le 12 décembre 2013
(Orange - 56 ans)


La note:  étoiles
Une gifle !
Frédéric Dard, alias San Antonio, a écrit 3 catégories de romans :
- les romans noirs "classiques" très bien écrits et dont les personnages marquent le lecteur par leur intensité,
- la série très connue dont le héros est San Antonio écrits sous le pseudonyme de San Antonio qui est un véritable hymne à l'humour et au jeux avec la langue française,
- des romans écrits sous le pseudonyme de San Antonio mais dont le contenu n'a rien à voir avec le héros éponyme et dont le style est à mi-chemin de ceux des 2 catégories précédentes.

Ce roman appartient à la troisième catégorie et se caractérise par sa noirceur voire parfois sa désespérance. Le style est magnifique et nombreuses sont les fulgurances.

Cette histoire est celle d'un romancier (quadragénaire ou quinquagénaire) à succès, Charles Dejallieu, (qui ressemble par bien des aspects à Frédéric DARD) qui est à un moment assez désabusé de sa vie. Il est en train d'écrire un roman sur un petit garçon (qui s'avère être proche de Frédéric DARD également dans sa jeunesse) et se pose plein de questions sur le sens de sa vie. Sa belle-fille Dora (fille d'une première union de sa femme), âgée d'une douzaine d'années, est enlevée par des "pseudo journalistes" venus l'interviewer quelques jours auparavant.

Ici, comme l'explique Frédéric DARD dans sa préface, l'histoire rejoint la fiction. Juste quand il était en train d'écrire les premiers instants consécutifs à cet enlèvement (l'angoisse de l'attente, la demande de rançon, ...), Frédéric Dard a connu la même angoisse : sa propre fille Joséphine a été enlevée par un cameraman faisant partie d'une équipe de journalistes venus l'interviewer ! Frédéric DARD a donc, bien évidemment, interrompu la rédaction de son roman pour se consacrer à la libération de sa fille (horrifié de la coïncidence...).

Fort heureusement, Joséphine a été retrouvée au bout de 48h et son ravisseur capturé.

Environ 1 an plus tard, Frédéric DARD, "appelé" par ses personnages a repris la rédaction de son roman (la césure entre les 2 parties est marquée par quelques mots pudiques de l'auteur).

La suite du roman est puissante et prend à la gorge par la violence des émotions qu'elle dégage...

Un roman très marquant écrit dans une langue superbe.
Quand la realité rejoint la fiction 10 étoiles

Ce roman qui parle de l'enlèvement de la belle-fille d'un écrivain célèbre, est surtout connu car pendant la rédaction la propre fille de Frederic Dard a été enlevée dans des circonstances similaires et que celui-ci s'est senti responsable d'avoir imaginé une fiction qui s'est "reproduite" dans la réalité et, malgré l'issue positive de l'affaire sa fille a été retrouvée vivante et le coupable arrêté et jugé, il n'a achevé son livre qu'un an plus tard car ses personnages "l'appelaient".

Si on excepte cette coïncidence entre la fiction et la réalité, le roman est sûrement un des meilleurs de son auteur car il s'y livre comme jamais sur sa vie d'écrivain, ses angoisses et ses fantasmes, même si c'est une fiction le personnage de l'écrivain et celui du petit garçon sont similaires et ont des points communs avec Frederic Dard / San-Antonio, outre l'enlèvement, le roman décrit la vie du trio, l'écrivain, sa femme Melacholia et sa belle-fille Dora ainsi que celle des kidnappeurs avant le drame, pendant et après.

Je n'en dis pas plus, mais je conseille fortement.

Killeur.extreme - Genève - 43 ans - 10 septembre 2017