Le silence de la mer : et autres récits
de Vercors

critiqué par Nothingman, le 20 juillet 2003
(Marche-en- Famenne - 44 ans)


La note:  étoiles
Résistance
C'est à une résistance particulière que nous confronte ce livre. Werner von Ebrennac, un officier allemand, réquisitionne l'une des chambres d'une petite maison de campagne. Cet officier vient troubler les jours d'un vieil homme et de sa filleule. Tous les soirs, au coin du feu s'instaurera alors le même rituel. Cet officier, civilisé, courtois, humble, croyant en la fraternité entre les peuples dissertera longuement sur l'union entre la France, pays des belles lettres et l'Allemagne, pays de la musique. Ainsi: "Les Anglais reprit-il, on pense aussitôt: Shakespeare. Les Italiens: Dante. L'Espagne: Cervantès. Et nous, tout de suite: Goethe. Après, il faut chercher. Mais si on dit: et la France? Alors, qui surgit à l'instant? Molière? Racine? Hugo? Voltaire? Rabelais? ou quel autre, ils se pressent, ils sont comme une foule à l'entrée d'un théâtre, on ne sait pas qui faire entrer d'abord... Mais pour la musique, alors c'est chez nous: Bach, Haendel, Beethoven, Wagner, Mozart... Quel nom vient le premier? Et nous nous sommes fait la guerre!"
Et là est bien le problème! Car sans cette guerre, là où le dialogue aurait pris entre les différents protagonistes de ce huis-clos s'installe à la place la résistance muette des deux Français. Ils se mureront dans le silence le plus profond, telles les profondeurs abyssales de la mer, la seule résistance qu'ils proposeront à cet envahisseur francophile qui toujours subira dignement ce logique retour de flammes et jamais ne s'en offusquera.
"Le silence de la mer" est le premier livre à avoir été publié aux Editions de Minuit en 1942, qui à cette période oeuvraient dans la clandestinité. Vercors est d'ailleurs le nom sous lequel officiait l'auteur dans la Résistance. Ce livre est un sobre plaidoyer contre la barbarie hitlérienne qui ravage la culture française sous ses pas. L'auteur rêve ici d'un retour à une Allemagne plus éprise de grandes et nobles idées ainsi que de culture.
Dans son édition poche, le texte est accompagné de plusieurs autres récits moins intéressants et assez inégaux. Il n'empêche que la lecture du premier texte s'impose par son message.
Ne pas parler c'est dire beaucoup 8 étoiles

Même si elles ont toutes pour point commun de se dérouler lors de la seconde guerre mondiale, les sujets des nouvelles sont variés : la résistance, la déportation, les camps de concentration... Certaines sont plus intéressantes que d'autres, j'ai largement préféré celle qui prête son titre à ce recueil ainsi que "Le songe", texte terrible mais d'une grande puissance, tandis que "Le cheval et la Mort" ainsi que "La marche à l'étoile" ne m'ont pas plus passionné que cela. Ce que j'ai particulièrement apprécié dans ces récits également c'est que ce sont des textes qui dénoncent tout en reflétant la réalité de l'époque, il n'y a pas les méchants allemands d'un côté et les bons français de l'autre, tout est plus nuancé et c'est traité avec beaucoup de subtilité.

Ces nouvelles sont donc d'un grand intérêt car les avoir écrites durant la guerre est un acte de résistance en soi. Même si elles ne sont pas toutes du même niveau et j'ai eu un peu de mal à apprécier le style de l'auteur elles réussissent à transmettre de l'émotion et de l'empathie. Un recueil assez utile donc qui réussit à mêler l'intérêt littéraire à l'historique.

Koolasuchus - Laon - 35 ans - 21 mai 2016


4 étoiles pour ce livre 8 étoiles

Je trouve que ce livre est super!
On a une histoire qui reflète exactement la rivalité franco-allemande durant la seconde guerre mondiale (les français ne daignent pas dire un mot à l'officier allemand qu'ils accueillent)
Ce livre est plutôt réaliste et Vercors reste un très bon auteur.
Néanmoins, ce livre n'est pas le meilleur concernant la seconde guerre mondiale. C'est pour cette raison que je ne donnerai pas la note maximale, car je pense que "elle s'appelait Sarah'' ou encore "le pianiste" sont des livres qui sont beaucoup plus intenses et émouvants, mais cela reste mon avis personnel.
Je vous souhaite à tous une bonne soirée.

Pixie980 - - 27 ans - 13 janvier 2014


Le silence de la mer 8 étoiles

J'ai adoré ce livre, poignant et émouvant c'est un hymne à la résistance qui dénonce l'absurdité de la guerre qui sépare des peuples pouvant être alliés et qui ont tant de chose à apprendre les uns des autres. Ce livre est très bien écrit et se lit facilement en une seule fois. Bien qu'aucune action ne soit présente dans ce roman et que la plupart des prises de paroles des personnages soient des monologues, le rythme reste dynamique et je ne me suis pas ennuyé. Le ton tragique de la nouvelle traduit bien l'atmosphère tendue dans les rapports occupés/occupants et les horreurs de la seconde guerre mondiale. Il y a aussi cet aspect intéressant : la jeune fille et son oncle résistent contre l'occupation, même si l'ennemi s'avère être un homme civilisé et courtois. Dans d'autres circonstances, leurs rapports auraient sûrement été tout autres.
C'est un très bon livre et je le conseille, il est sombre et sensible.

Oiseau Lyre - Clermont-Ferrand - 26 ans - 17 mars 2013


Fausse valeur 1 étoiles

Le succès et la réputation de cet opuscule m'ont toujours semblé une énigme. Je l'ai lu deux fois, avec un ennui pesant, surprenant, d'ailleurs, compte tenu de la taille du livre.


Il ne m'a ni ému ni surpris par ses qualités littéraires. Bien au contraire, j'ai ressenti au fil de la lecture un réel malaise ; tout cela ne sentirait-il pas un peu fort la xénophobie, la femme tondue et le comité d'épuration ?

En tombant par hasard sur un texte d'Arthur Koestler, je me suis dit "voila, c'est tout à fait ce que je pense, jamais je ne l'exprimerai mieux" :

"Peut-on imaginer qu'un homme sensible continue à parler pendant plus de cent nuits à des gens qui font semblant de ne jamais le voir et qui ne lui répondent jamais ? Psychologiquement, l'histoire ne tient pas debout. Mais politiquement elle est pire. toutes les paroles et toutes les pensées de cet aristocrate éclairé vont diamétralement à l'encontre du nazisme _ mais il est évident que l'auteur exècre l'idée que la fidélité d'un homme à ses convictions politiques puisse être plus forte que sa foi patriotique.

Ce qu'il y a plus exaspérant dans ce petit livre, c'est le mélange d'arrogance et de complexe d'infériorité. S'il a jamais existé un ami de la France noble, bien intentionné, généreux, c'est ce héros rêveur qui pousse l'amour jusqu'au suicide. Alors, pourquoi le punir par ce silence arrogant et stupide ? Uniquement parce que cet antinazi est né de parents allemands ? Nous avons là, en 1942, la répétition étrangement exacte de la mentalité, qui, en 1939, envoyait dans les prisons françaises les Allemands antinazis."

Arthur Koestler, Le Yogi et le commissaire

Jefopera - Paris - 60 ans - 27 juillet 2011


Un classique à resituer 7 étoiles

Lire le silence de la mer impose de se plonger dans le contexte où il fut écrit... je me contenterai de citer Sartre
"son public, c’était l’homme de 1941, humilié par la défaite, mais surpris par la courtoisie apprise de l’occupant (…) égaré par les discours de Pétain ". " il faut lutter contre un régime et une idéologie néfastes même si les hommes qui nous les apportent ne nous paraissent pas mauvais". " dès la fin de 1942, Le Silence de la Mer avait perdu son efficace : c’est que la guerre recommençait sur notre territoire "...

Une nouvelle sur une forme de résistance...

Deinos - - 62 ans - 21 mai 2011


Inégal 5 étoiles

Je suis plutôt d'accord avec la critique de Pounette: à part la première nouvelle, que j'ai beaucoup appréciée, je n'ai pas (mais alors pas du tout) accroché aux autres.
Le Silence de la Mer, c'est la première nouvelle, et la plus intéressante à mes yeux: on y voit la manière dont réagit une famille française face à l'installation d'un officier allemand chez elle. C'est un récit poignant et plein d'humanité.
Je ne vais pas m'étendre sur les autres nouvelles; je me suis ennuyé ferme à le lecture de certaines, jusqu'à compter le nombre de pages restantes...

Nb - Avion - 40 ans - 23 avril 2011


Recueil de nouvelles résistantes 7 étoiles

Vercors, de son vrai nom Jean Bruller, résistant, nous propose un recueil de nouvelles de différente intensité, la plus belle étant le silence de la mer, les autres, de niveau inégal nous transportent tout de même dans ce contexte de la résistance de l’époque, en ce sens, ce livre est un beau témoignage, un livre à faire lire à nos jeunes.

Ichampas - Saint-Gille - 60 ans - 30 mars 2011


résister malgré tout 9 étoiles

Un texte magnifique, puissant et sobre.
Je l'ai avant tout perçu comme un texte sur la résistance bien entendu, mais aussi comme un plaidoyer contre l'absurdité d'une guerre qui broie les individus en les incluant de force dans un mouvement au sein duquel ils ne se retrouvent pas et où ils n'ont rien a faire.
C'est vraiment poignant.

Valadon - Paris - 43 ans - 18 janvier 2011


Un avis plutôt mitigé 5 étoiles

Il s'agit d'un recueil de nouvelles. La première d'entre elles est très poignante et j'en recommande la lecture . Cependant les deux dernières nouvelles de ce recueil sont plutôt décevantes ce qui me laisse une mauvaise impression sur le recueil. Dommage!

Pounette - - 48 ans - 21 avril 2010


"Je vous souhaite une bonne nuit" 8 étoiles

Telle est la rituelle phrase de transition prononcée par cet officier allemand durant tout l'hiver où il demeura dans cette masure. On a beaucoup évoqué l'idéal de ce dernier, lequel vient se heurter au mutisme défensif et délibéré de cet oncle et de cette nièce. Mais, ce qui donne à penser consiste aussi à ce qui n'est plus quand les protagonistes sont en dehors de cette pièce. Je parle ici des moments de solitude, de retour sur soi, qui sont souvent plus longs que la présence même de cet officier auprès de la cheminée chaque soir. Il apparaît à la lecture que l'oncle et la nièce sont aussi pris dans une forme de mutisme entre eux : leurs sentiments propres devant être masqués, inavoués, à moins qu'ils ne puissent tout simplement pas savoir quoi penser de cette situation incongrue, donc se taisent.
Ainsi, au final, ils semblent avoir compris qu'on ne peut pas tirer une généralité d'un peuple, fût-il envahisseur. Toute la tension vient donc de là : ils ne peuvent pas apprécier à sa juste valeur un homme indépendamment de son origine et des idéaux qui y prédominent. Car le risque serait d'être soit même considéré comme un traître envers sa patrie, donc d'être englobé à son tour dans un vaste mouvement généraliste et réducteur. Dans ce cadre, même une simple discussion isolée dans une maison reculée est impossible.
Récit très court et d'une grande force dramatique.

PPG - Strasbourg - 48 ans - 18 février 2010


Le silence de la mer... 10 étoiles

Un livre court, dense et puissant! Des dialogues pleins de force, enfoncés dans le silence. Des passages marquants, à jamais inscrits dans ma mémoire...

Lunatoke - - 33 ans - 9 janvier 2010


3,5 étoiles pour "le silence de la mer" 7 étoiles

"le silence de la mer" est un bon livre. L'intrigue est linéaire et un peu simpliste. Le style est classique avec de nombreuses descriptions. Vercors veut faire passer à travers ce livre un message humaniste fort. Le personnage de l'officier allemand s'oppose ouvertement à la doctrine hitlérienne, c'est une sorte de pacifiste.
Le message est fort et les dialogues sont finement écrits. Donc,un bon livre, un peu désuet par certains aspects, mais intéressant d'un point de vue historique.

Js75 - - 41 ans - 18 septembre 2009


de la résistance 9 étoiles

Etonnant, je n'ai pas du tout la même vision de ce livre, je n'y ai pas vu de la haine, mais un acte de résistance à l'état pur de la part de la nièce, son silence est le seul rempart, la seule manière de montrer son refus.
Ce sont trois personnes prises dans une tourmente qui les dépasse.
L'officier allemand n'attend pas de réponse, il essaie de montrer l'humanité qui est la sienne, le regret tacite que leur rencontre se fasse dans de telle condition, il ne fait preuve d'aucune brusquerie et se soumet à cet acte courageux d'une femme "digne et silencieuse".
La guerre, cet état d'occupant et d'occupé, lui permet à lui ses monologues qui ne peuvent être entendus, elle ce sera son silence qui ne pourra être brisé.
Très beau livre, d'une grande finesse et d'une grande force.

Cafeine - - 50 ans - 27 mars 2008


Un classique un peu désuet 5 étoiles

Un beau livre, c'est vrai mais on doit le replacer je pense dans le contexte d'après guerre ; à ce moment, les français avaient la haine contre les allemands, on le comprend ; ce livre, et le film qui en a été tiré, montre une situation où c'est l'allemand qui donne une leçon d'humanité au français, dans un cadre il est vrai bien particulier ; c'était un peu neuf dans la mentalité de l'époque.
J'ai vu le téléfilm aussi, mais j'ai trouvé que le scénario tenait peu la route, en plus, les images pêchaient encore une fois, comme beaucoup de films actuellement, par leur esthétisme de bon aloi, ce qui, à mon sens, donne un aspect trop fabriqué. Du coup, on n'est pas impliqué émotionnellement, du moins c'est mon avis.

Apostrophe - Bruxelles - 63 ans - 30 novembre 2004


4 étoiles pour "Le silence de la mer" 8 étoiles

Après la diffusion du très réussi téléfilm sur France2, j'ai voulu lire le texte auquel il se référençait : "Le silence de la mer". Ce récit est particulièrement réussi, très touchant. Il met en scène un oncle âgé et sa nièce qui doivent loger un officier allemand, Werner von Ebrennac. Tous deux opèrent une résistance passive, teintée de silence profond et lourd, face aux tentatives d'approche de l'allemand. Celui-ci se révèle un musicien et francophile, nimbé de l'espoir insensé d'un effort commun entre la France et l'Allemagne pour un travail main dans la main. Hélas, les croyances de l'officier seront soudainement bafouées et, meurtri, il s'en ira vers d'autres missions. Entre-temps, il passera maintes soirées à se réchauffer au coin du feu, à monologuer sur son amour pour la culture française et le rêve d'être aimé un jour par une femme "digne et silencieuse". L'oncle est le narrateur-témoin de ce récit. On sent de sa part une tentative d'apprécier l'être humain au-delà de l'homme en uniforme, il porte sur sa nièce un regard parfois agacé face à son entêtement silencieux et fébrile. Soit, Vercors dans ce très remarquable récit, brode beaucoup autour du silence et montre ainsi combien tant de non-dits peuvent peser bien lourds et avoir un impact foudroyant.
Ce livre regroupe également d'autres récits de qualité mineure, si ce n'est "Ce jour-là", l'histoire d'un père et de son jeune fils, d'un pot de géranium sur le chassis d'une fenêtre et d'un enfant qu'on abandonne chez une vieille femme. L'ensemble des récits tourne autour de la guerre, du combat, des espoirs déçus, de la trahison et des sacrifices d'hommes et de femmes pour une juste cause. Tous ont été rédigés durant les années 40, pendant l'occupation allemande, alors que Vercors créait avec Pierre de Lescure les Editions de Minuit qui regroupaient les volumes d'écrivains représentant la résistance.
"Le silence de la mer" est un texte qu'on doit tous ouvrir un jour ou l'autre : sa beauté est sans égale.

Clarabel - - 48 ans - 23 novembre 2004