Journal du voyage vers la Chine de Saint-Petersbourg à la Mongolie
de Alexander Amatus Thesleff

critiqué par JulesRomans, le 3 mars 2014
(Nantes - 66 ans)


La note:  étoiles
Alain Peyrefitte, fils d’instituteurs, réveille-toi les Russes tentent de copier sur lord Macarteney
"Journal du voyage vers la Chine" nous conte le voyage de Saint-Pétersbourg à Oulan-Bator et au nord du lac Baïkal, en passant en particulier par Kazan, Iekaterinbourg, Toblosk, Tomsk, Krasnoïark que fit de 1805 à 1806. Le Turkestan n’étant pas encore russe, Alexander Amatus Thesleff longe les limites sibériennes de son pays, sa route est celle que prendra un peu plus tard le Transsibérien, avant de pénétrer en Mongolie entièrement sous domination de la dynastie mandchoue qui règne sur l’ensemble de l’Empire chinois au faîte de son expansion territoriale.

De famille d’origine allemande luthérienne, Alexander Amatus Thesleff est né à Vyborg en Carélie. Né en 1778, il est déjà dans l’armée en 1793. Ultérieurement en 1814, lors de la campagne de France Alexander Amatus Thesleff a pris part à des batailles en particulier le 15 Février à Bar-sur-Aube et lors de la prise de Paris il a reçu une épée d'or orné de diamants. Dans la période 1830-1831, il a combattu pour mettre fin au soulèvement polonais.

La cour de Saint-Pétersbourg est attentive aux initiatives anglaises (Alain Peyreffitte a raconté l’incompréhension mutuelle entre lord Macarteney et les Chinois dans "L’Empire immobile") de contact avec l’empire chinois, aussi décide-t-elle de confier une mission de reconnaissance géographique et si possible de relations diplomatiques ainsi que commerciales à un petit groupe d’hommes. Alexander Amatus Thesleff est le seul de cette expédition à être compétent pour faire des relevés de latitude et longitude.

« Le capitaine Teslef rapporte de Mongolie un nombre d’observations très suffisant pour déterminer avec la plus grande précision la latitude et la longitude d’Ourga et rendra un grand service à la géographie ». (correspondance de Potocki février 1806)

Son journal n’était pas destiné à publication, il s’autorise donc là une grande liberté. Ainsi il n’hésite pas à critiquer le mauvais fonctionnement d’un orphelinat où le taux de mortalité approche les 95%. Son regard sur les coutumes et physiques des peuples qu’il rencontre n’est jamais complaisant, ainsi pour lui la musique bouriate se caractérise par la cacophonie.

La rencontre entre l’ambassadeur russe le comte Iouri Alexandrovitch Golovkine se fait le 17 novembre 1805 à Kiatkhta ville frontière des deux empires. L’entrée en Mongolie se fait par des nuits à -28°. Parce que ce dernier refuse de répéter le salut habituel à faire devant l’empereur (le Koutou), qui consiste à trois agenouillements suivi de neuf inclinaisons de tête, l’ambassade russe n’aura pas dépassé le désert de Gobi (le moment clé de la rupture est décrit à la page 165).

On voit que dans ces conditions, ce texte en apprend plus sur la vie en Sibérie à l’orée du XIXe siècle et l’incompréhension mutuelle entre sujets russes et dignitaires de l’Empire du milieu que sur la Chine.

Le journal original est écrit en allemand, il est conservé aux Archives littéraires suédoises et semble n’avoir jamais été publié dans la moindre langue. Dix-huit aquarelles originales sont reproduites en noir et blanc, cinq d’entre elles concernent l’univers chinois ou mongol ; la plus intéressante nous semble être celle d’un couple avec enfant de Samoyèdes devant leur tente, l’homme chevauchant un renne.