Le triomphe de la mort
de Patrick Weiller

critiqué par Saule, le 16 février 2014
(Bruxelles - 59 ans)


La note:  étoiles
Des Bruegels et des crimes.
Le tableau de Bruegel, "Le triomphe de la mort", est un tableau magistral mais assez macabre dans lequel des armées de squelettes sont représentées en train de joyeusement tuer des hommes de toutes les manières imaginables dans un paysage médiéval de style apocalyptique. L'effet est saisissant. Ce tableau se trouve au Prado à Madrid mais je ne dévoile pas l'intrigue en disant qu'il en existe d'autres exemplaires, des copies réalisées par les fils de Bruegel, qui peuvent refaire surface sur le marché...

Le narrateur de ce roman policier est un marchant d'art Parisien. Il est contacté par un inspecteur pour aider, en tant que consultant bien informé du milieu, à enquêter sur le meurtre particulièrement macabre d'un vendeur spécialiste de peintures anciennes. Un meurtre rapidement suivi d'un deuxième dont la mise en scène est semblable. C'est lors d'un voyage à Madrid que le narrateur tombe en arrêt devant la toile de Bruegel lors d'une visite au Prado : quelque chose dans le tableau lui rappelle les meurtres sur lesquels il aide à enquêter.

Ce livre écrit d'une bien belle plume se passe entièrement dans le monde de l'Art, essentiellement à Paris mais aussi dans les grandes villes comme Vienne, Madrid, Londres et en Suède. L'auteur connait ce milieu et en fait une description très alerte et amusante : les ventes publiques de Drouot sont décrites de manière savoureuse, ainsi que les pratiques des vendeurs spécialisés. Cette description du milieu, avec quelques belles réflexions sur des oeuvres d'art (de Bruegel en l'occurrence), prend un peu le pas sur l'intrigue policière.

A noter la belle édition, avec une couverture noire du plus bel effet. La tranche des pages est noircie et les pages légèrement glacées ce qui en fait un bel objet.
Meurtres sur la toile 6 étoiles

Il était joli ce livre, il a attiré mon regard, je l’ai empoigné, la une de couverture évoquait Bruegel, un peintre, en fait une famille de peintres, je l’ai feuilleté, il parlait de la peinture de l’Âge d’or de la Flandre, il avait donc beaucoup d’arguments pour me séduire, alors je l’ai choisi et je l’ai lu très vite, dès le lendemain. Je n’ai été ni déçu ni comblé. Le livre est présenté comme un polar qui se déroule dans le milieu de l’art et plus spécialement dans le milieu restreint des marchands de tableaux qui s’intéressent aux petits maîtres flamands mais l’intrigue policière se résume à très peu de choses, même pas le tiers du livre, donc ceux qui aiment les belles enquêtes avec des limiers rompus à toutes les combines pour déjouer les assassins les plus retors seront certainement déçus. Moi, je me suis consolé avec tout ce que j’ai appris sur la vaste famille Bruegel, j’en connaissais deux ou trois qui avaient manié le pinceau avec agilité mais le récit en dénombre au moins cinq qui sont présentés dans un arbre généalogique bien pratique pour comprendre le fonctionnement de cette large fratrie. J’ai aussi voyagé avec le héros dans les plus grands musées d’Europe et chez les galeristes les plus célèbres même s’ils sont purement fictifs, leurs affaires ressemblent certainement à celles des marchands d’art des grandes capitales européennes.

Ainsi j’ai accompagné le héros, contacté par la police après l’assassinat d’un marchand d’art parisien bientôt suivi par le meurtre d’un autre marchand à Londres et d’un troisième à nouveau à Paris, qui remarque que ces meurtres figurent tous les trois dans un tableau attribué à un Bruegel et recopié en plusieurs exemplaires par ce même Bruegel et même par un autre membre de la famille. La police, évidemment, ne veut pas suivre l’artiste dans son hypothèse pas assez cartésienne mais le héros, marchand d’art avisé tout comme les trois victimes, a l’œil affuté, peut-être encore plus affuté que le nez des policiers chargés de l’enquête à Londres, Paris et Stockholm.

Un moment de détente agréable seulement troublé par l’usage un peu agaçant de formules toutes faites, de mots du jargon déjà beaucoup trop utilisés, d’un vocabulaire un peu trop banal pour parler d’art et surtout des maîtres flamands.

Débézed - Besançon - 77 ans - 25 février 2014