Ella Mahé, Tome 1 : La fille aux yeux vairons
de Maryse Charles (Scénario), André Taymans (Dessin), Jean-François Charles (Scénario et dessin)

critiqué par Shelton, le 5 avril 2014
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Magnifique narration graphique !
On peut entrer dans une bande dessinée par l’histoire, c’est classique, efficace et habituel pour les lecteurs des critiques ou auditeurs radio de mes chroniques. Mais, cette fois, je veux d’abord insister sur la qualité exceptionnelle de la narration graphique de cette série Ella Mahé.

La narration graphique est la participation active du dessin au récit. Il ne s’agit pas du tout d’une coquetterie pour mettre en valeur le travail du dessinateur. C’est plutôt une façon de rappeler que le dessin dans la bande dessinée ou les albums illustrés participe pleinement à l’histoire ce qui justifie, si besoin était, que les dessinateurs soient considérés comme des co-auteurs, ce qui est aussi de plus en plus le cas pour les coloristes, surtout quand les couleurs participent aussi à la narration…

Mais, une fois posé ce principe général, il faut constater que si le dessin nous pousse souvent à des achats «coup de cœur», c’est bien la qualité du scénario qui nous tient en haleine, qui nous rend fidèles à certaines séries. Il faut dire que les auteurs-dessinateurs qui participent entièrement au récit ne sont pas si nombreux que cela – et je ne parle pas ici des auteurs qui font tout du scénario aux couleurs en passant par le dessin. Il y a des dessinateurs qui sont obligés de le faire, de par le choix de récit, je pense en particulier aux bandes dessinées sans texte, celles où le dessin est le support majeur du récit, ce qui ne signifie pas absence de scénario. On peut citer le Pantin de Michel Alzéal ou la série Petit Poilu de Céline Fraipont et Pierre Bailly.

Maryse et Jean-François Charles sont un couple, à la ville comme au travail. Ensemble, ils ont scénarisé un grand nombre d’albums ou séries de bédé. On peut citer, sans prétendre être exhaustif, War and dreams, India dreams, Africa dreams… Après, Jean-François Charles devient dessinateur comme dans War and dreams, ou laisse la main à un autre dessinateur comme dans la série Rebelles ou Africa dreams. Mais, la particularité, dans Ella Mahé, c’est qu’il dessiner et laisser d’autres dessinateurs participer, avec une narration graphique essentielle et capitale pour la compréhension du récit. Venons-en donc au récit lui-même…

Ella Mahé est une jeune femme, restauratrice de manuscrits anciens. Elle va aller en Egypte pour travailler car les manuscrits de ce pays font rêver tous les professionnels. Elle va faire la rencontre d’un jeune homme, que, dis-je, d’un beau jeune homme énigmatique et fascinant, avec qui elle va… Bon, je vous passe les détails nocturnes… Ella va se retrouver au contact, dans un premier temps, d’un carnet de souvenirs du grand-père de ce jeune Thomas Reilly.

Dans cette première partie, c’est Jean-François Charles qui dessine le scénario qu’il a lui-même écrit avec sa femme Maryse. Mais dès qu’Ella Mahé ouvre le carnet, André Taymans prend le crayon, avec son style et son coloriste habituel, Bruno Wesel. Quand elle aura terminé la lecture de ce texte essentiel pour la suite de l’histoire, Jean-François Charles redevient dessinateur. Les échanges ne cesseront pas pour autant car cette série qui contient quatre albums a quatre dessinateurs invités, à chaque fois qu’Ella sera confrontée à un texte manuscrit…

Dans ce premier album, on fait la connaissance du grand-père de Thomas, un archéologue qui va découvrir une tombe particulière, celle d’une princesse égyptienne aux yeux vairons, une princesse sans nom…

Il s’agit d’une très bonne histoire qui alimentera, une fois encore, cette égyptomania qui secoue la France depuis l’expédition de Bonaparte. J’ai beaucoup aimé et cela plaira à un très large public, du plus bédéphile au plus amoureux des tombes de pharaons et aux malédictions de toute nature…