1914, Guillaume Apollinaire s'en va-t-en guerre
de Yves Pinguilly

critiqué par JulesRomans, le 3 juin 2014
(Nantes - 66 ans)


La note:  étoiles
On vit voler son âme, Mironton, mironton, mirontaine, On vit voler son âme à travers les lauriers
"1914, Guillaume Apollinaire s’en va-t-en guerre" est particulièrement d’actualité puisque l’on sait que notre auteur est un engagé volontaire de la Grande Guerre. Sujet russe vivant en France, il n’était pas mobilisable et Yves Pinguilly dans la partie biographique du début de l’ouvrage aurait gagné à être clair là-dessus pour un jeune lectorat. On aurait pu aussi évoquer son passage à Stavelot en 1899 puisque aujourd’hui un musée Apollinaire est présent sur le territoire de cette commune de la province de Liège.

La vie de notre personnage à Paris, avant le déclenchement de la guerre, est évoquée de façon conséquente et les liens qu’il entretient avec Picasso sont soulignés. Le récent roman historique pour adolescent "Elle posait pour Picasso" de Béatrice Égémar mentionne d’ailleurs ces liens et les ennuis que connut Guillaume Apollinaire avec la police qui le soupçonnait de complicité dans le vol de la Joconde.

Après ces quinze pages d’introduction à la vie de notre auteur, dans "1914, Guillaume Apollinaire s’en va-t-en guerre" suit une anthologie de près d’une trentaine de poèmes côtoyant le contenu d'une douzaine de lettres écrites entre le 14 et le 25 mars 1916 à Madeleine Pagès. L’ensemble de ces textes a un rapport avec la guerre, une demi-douzaine de poèmes sont en partie ou en totalité faits avec des calligrammes.

On notera la présence du poème "Il y a" qui a récemment été illustré par Laurent Corvaisier pour l’éditeur Rue du monde. L’auteur cite des lieux de combats connus pour les hécatombes qui s’y déroulèrent comme la Main de Massiges (où décéda notre arrière-grand-père) ou la butte du Mesnil, des noms de boyaux de l’univers des tranchées. On peut regretter que sur une page entière ne figurent que ces cinq vers redondants de la poésie "Les saisons", qui biaisent totalement l’idée que l’on peut se faire du ton du texte en question:

« As-tu connu Guy au galop
Du temps qu’il était militaire
As-tu connu Guy au galop
Du temps qu’il était artiflot
À la guerre »

Heureusement un nombre restreint de textes a été mutilé. Leur longueur variable permettra aux enseignants du primaire et secondaire de choisir celui qui correspond aux capacités de mémorisation et à l’imaginaire le plus près de l’âge de ces élèves. On pourra faire le choix de préserver la sensibilité des enfants ou au contraire les plonger dans l’univers de boucherie mécanique que fut cette guerre. Tant par l’exemple des calligrammes, que celui de certaines structures donnés, il y a moyen de demander aux élèves de mettre leurs propres mots en s’inspirant d’un extrait d’un texte de l’auteur.

Ainsi après avoir expliqué que pour le texte "Et bien prends garde" la zibeline désignait un vêtement en fourrure et que phonétiquement ce mot est proche de zeppelin (qu’on expliquera aussi), on pourrait demander aux enfants de lister un certain nombre de mots qui évoquent pour eux la Grande Guerre et de voir si certains seraient phonétiquement proches d’autres comme par exemple "Bécassine" et "assassine" ou "baïonnette" et "bobinette". Les élèves auraient à construire un texte de quatre vers où apparaîtraient ces deux mots. On fera attention à bien préciser le sens d'alors de certains mots, ainsi les bombardiers ne sont pas des avions, mais des artilleurs (dans le poème "Exercice").