C'est le métier qui rentre
de Sylvie Testud

critiqué par Rotko, le 25 juillet 2014
(Avrillé - 50 ans)


La note:  étoiles
Une cuisante mésaventure, bien programmée.
C’est le métier qui rentre, 250 p. chez Fayard.

« Sybille croit aux histoires qui finissent bien. Elle a beau savoir de quelle manière est morte Jeanne d’Arc, quand elle regarde un des films qui lui ont été consacrés, Sybille ne peut s’empêcher d’espérer qu’un pompier vienne la tirer d’affaire. Alors comment imaginer que la réalisation de son propre long-métrage va virer au film catastrophe ? « 

On sait dès le début que la réalisation du film avec les producteurs « Ceausescou » - nom prédestiné, à la hauteur de leur fâcheuse réputation, ne sera pas de tout repos. Effectivement ! disputes sur le scénario, le choix des actrices, comme du personnel technique (monteurs etc.) compliquent la vie créative, relationnelle et familiale de la réalisatrice…

Pourtant le livre accroche : on comprend l’obstination de Sybille à vouloir mener à bien son entreprise ; son dynamisme et son optimisme seraient même communicatifs, et on touche du bois !

Car le récit amuse par la série de mésaventures, les incessantes modifications en tous domaines, par la présentation des Ceaucescou, tour à tour enjôleurs, exigeants, généreux en paroles, fermes dans les décisions..

Face à eux, les réflexions en privé de Sybille, son aptitude à régler les conflits, ses craintes non formulées,… on voit se débattre un pauvre insecte, trop agité pour se noyer, pense-t-on…

La langue est directe, « scénographique », les épisodes suivent un bon rythme, l’aveuglement total de Sybille prend toute sa dimension comique, quand elle défend vigoureusement ses producteurs contre tous, amis, agents, proches et collègues..

«  j’ai senti la colère monter en moi :
Ah ! Les vauriens ! Les crapules ! Ils lâchaient tous les Ceaucescou. Leur liberté de penser pas comme tout le monde, leur force, leur indépendance, irritaient les pourris , les vendus au système des alliances, les culs frileux, réunis en groupes, associations en tous genres. Tous voulaient abattre les Ceaucescou… »

Ce récit serait-il l’adaptation d’une mésaventure vécue, conjurée par le rire ? C’est bien possible, En tout cas quel beau tableau du milieu cinématographique, [Sylvie Testut a une filmographie conséquente ], avec ses pièges, ses difficultés, sa faune pittoresque et carnassière.