Les ruelles
de Frédéric Chapuis

critiqué par Joestel, le 20 octobre 2014
(1410 - 74 ans)


La note:  étoiles
Dix silhouettes croisées dans les ruelles
Les ruelles : dix silhouettes ;
suivi de Agnès & Anatole ; et de J'aimais beaucoup votre mère
Frédéric Chapuis.
Imprimé en 2013
1 vol. (138 p.) ; 18 € (frais de port inclus)
ISBN 978-2-9518438-7-5
Contact : fchapuislivres(ad)orange.fr

Frédéric Chapuis (1949…) vit en Bourgogne. A 49 ans il a choisi de se consacrer à l’écriture et exerce aussi à l’occasion le métier de brocanteur. De son expérience antérieure de monteur et réalisateur de télévision, ce nouvelliste a gardé le goût du gros plan et le choix rigoureux du détail. Les phrases courtes, sans un mot ni une virgule de trop, c'est sa cuisine. Pour ce résultat, il creuse… ne se contente pas de la seule richesse des apparences. Il a choisi ses chemins avec l'écriture et préféra très tôt le : "raconter une histoire", (sous la forme de "je" ou de "il")… qui sera bien entendu remplie avec des empreintes de sa vie.

Dix publications antérieures dont une encore disponible : Les Rideaux

Les Ruelles, dix silhouettes : le narrateur et neufs personnages. Neuf historiettes qui se déroulent aujourd’hui, en province. En des endroits bien connus de l’auteur et habités par des gens dont il sait l’existence pour les avoir entrevus par la fenêtre, croisés en ruelle, aperçus sur une terrasse ou sur un site de rencontre sans lendemain. Et, s’il a pénétré dans quelques intérieurs, c’était pour évaluer un meuble ou un trésor de famille dont le ou la propriétaire espérait quelque argent.
Dans ce bourg, des demeures ont été partagées en petits logements qui sont habités par des isolés, souvent âgés, souvent démunis. Le narrateur, l’œil vif mais bienveillant, nous décrit les habitudes et manies de neuf de ses congénères. Pour certaines, souvent âgées, il nous confie un attachement sentimental mais peut-être pas réciproque.
Il y a Madeleine, femme sans âge, avec de nombreux maux et « une paire de chaussures aplaties au pied de l’escalier ». Puis Martin, la quarantaine, célibataire, qui « se tape chaque matin des kilomètres à toute berzingue ». Ensuite, « Eglantine habillée de rideaux, les jambes, blanches, rasées. Cardons dépaillés. ». Et puis Babette la veuve qui habite la grande rue. Il y avait Ghislaine qui habitait l’autre ruelle et fut trouvée morte chez elle, « entourée de paquets de tabac et de bouteilles de whisky». Puis il y eut Betsey, l’américaine, découverte sur un site de rencontre. Et aussi Mylène, la cinquantaine, toujours à maugréer contre les hommes. Ensuite Olympe, « titubante, cannée, une très belle jeune fille très vieille ». Enfin Renaud, jeune homme sans âge, qui veut vendre sa table « quitte à manger son assiette sur ses genoux, assis devant la télévision ».

Agnès et Anatole
Les protagonistes se rencontrent à un mariage de jeunes quadragénaires. Anatole osa un « Si on partait ? Je vous emmène. ». Mais Agnès choisit d’aller à la noce. Finalement ils partageront une courte aventure, bien amenée, un peu vaudevillesque. Mais Anatole, lui, a l’une ou l’autre « compagne épisodique » et Agnès n’est pas amoureuse : « « Confortable ! », voilà le mot qu’elle cherchait pour résumer Anatole. » Et l’histoire s’arrête là.

J’aimais beaucoup votre mère
Le narrateur rend visite à sa mère, résidente en maison de repos, qui progressivement se perd dans le silence de « ses journées désormais éteintes et muettes ».

J’ai aimé ce livre, beaucoup. D’emblée je fus séduite par les mots, leur précision et leur efficacité. Frédéric Chapuis nous campe chaque personnage et chaque scène en quelques détails montés en gros plan. Il est aussi capable de décrire l’invisible : l’absence de bruits par « des draps de silence qui pendent au plafond » (dans Les Ruelles) ou le besoin de le rompre par « ajouter un groupe de mots, dire absolument quelque chose. » (dans Agnès et Anatole). Ces textes, posés sur l’opaque du papier, se transposent immédiatement chez le lecteur en images claires et transparentes qui rapportent le point de vue du narrateur, comme une caméra portée. J’ai adoré !
Ce livre offre de plus une très belle lisibilité par son format (18 cm), par sa fonte (Bookman old style) et par une mise en page claire dépourvue de condensation de texte.

Pour commander ce livre, contactez l’auteur par courriel à « fchapuislivres(ad)orange.fr ».