Les Indiens d'Amérique du Nord
de Edward Sheriff Curtis

critiqué par Folfaerie, le 19 novembre 2003
( - 56 ans)


La note:  étoiles
Magnifique !
Enfin les portfolios complets d'Edward Curtis, le photographe des tribus indiennes ! Une excellente idée de la part des éditions Taschen, et en français qui plus est.
Edward Curtis, à partir de 1895 et pratiquement jusqu'à sa mort, en 1952, eut à coeur de photographier les tribus indiennes d'Amérique, dans le seul espoir de sauvegarder une trace de ces civilisations. Au début de sa tâche, véritable idée folle, il partageait certains préjugés des blancs envers les Indiens, et plus particulièrement au sujet de leur spiritualité, mais ses contacts quotidiens, ses voyages et ses visites transformèrent Curtis au point de lui valoir le respect des autochtones. Deux principes importants guidaient le travail de Curtis : utiliser toutes les meilleures techniques de l'époque pour réaliser de beaux portraits, et faire en sorte que les Indiens n'apparaissent pas comme des sauvages, et surtout, gommer toute trace de civilisation. Lorsque Curtis fit ses premières photos, la plupart des tribus étaient parquées dans des réserves et perdaient peu à peu leurs caractéristiques et traditions, un vrai crève-coeur pour le photographe. Les Indiens approuvèrent d'autant plus le projet qu'ils sentaient bien que leur civilisation ne serait bientôt plus. Curtis dut même demander à certaines tribus de danser à nouveau pour fixer ces rites presque disparus. C'est une curieuse impression de contempler tous ces visages disparus, à la fois beaux et graves, et même un peu tristes. Que pensaient-ils au moment de la photo ?
Au final, un ouvrage remarquable et unique en son genre, à la fois ethnologique, historique et artistique. Merveilleux et indispensable pour tous ceux qui s'intéressent aux Amérindiens.
Beauté et émotion 10 étoiles

Effectivement le travail de Curtis est extraordinaire, car il a su capter beaucoup d'émotions dans les regards des personnages, derniers représentants des peuples indiens pas encore tout à fait contaminés par la culture anglo-saxonne. Et il faut rendre hommage à ce photographe qui a consacré une grande partie de son existence à parcourir toute l'Amérique pour fixer sur les plaques photographiques les portraits des derniers témoins d'une culture qu'il pensait vouée à disparaître.
Cependant il lui a été reproché certaines mises en scènes qu'il a orchestrées sans trop se soucier de l'exactitude culturelle et notamment le fait qu'il n'ait pas hésité à parer certains individus d'accessoires recueillis par lui-même à droite et à gauche (sorte de bazar indien hétéroclite), qui ne correspondaient pas forcément à un objet traditionnel ou usuel appartenant au sujet photographié. Mais il faut souligner, à sa décharge, qu'à cette époque les Indiens (interdits de pratiquer la plupart de leurs cérémonies) vivaient dans une espèce de torpeur endémique, qui voyait s'étioler tous les fondements culturels par la disparition progressive des actes traditionnels et des objets sacrés. Pour Curtis, qui tenait à saisir l'âme indienne avant qu'il ne soit trop tard, il n'y avait pas injure à agir de la sorte. Et il faut reconnaître, malgré tout, que son oeuvre est de toute beauté et restera à jamais gravée dans la mémoire collective

Heyrike - Eure - 57 ans - 23 novembre 2003