Chez les heureux du monde de Edith Wharton
(The house of mirth)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
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Et toi lecteur, vas-tu danser avec les fous dans la maison de liesse ?
Rien que le titre ! Avec ça tout est dit ! L’imparable ironie, l’érudition et l'intelligence d’Edith Wharton s’y retrouve. Je m'explique : le titre original est « The House of mirth », en français « La Maison de liesse » et c'est tiré d’un passage de l’Ecclésiaste qui dit : « Le coeur du sage est dans la maison de deuil ; mais le cœur des insensés est dans la maison de liesse ».
La maison de liesse : métaphore pour la cage dorée de la haute société new-yorkaise, que Wharton décrit avec un humour féroce dans ce premier roman paru en 1905.
Elle nous ouvre en effet les portes de la cage dorée de cette haute société new-yorkaise, mais n’oublie pas de nous montrer l'envers du décor : car sous la couche dorée de luxe et d'exubérance, se cache un monde frivole d'une mesquinerie impitoyable.
Lily Bart, sa jeune héroïne, est indéniablement le plus bel oiseau de la cage. Comme le dit joliment l'auteur « Elle avait été façonnée pour être un ornement délicieux : pour quelle autre fin la nature arrondit-elle le pétale de rose ou peint-elle la gorge du colibri ? ». Elle a 29 ans et est à la recherche d'un riche mari qui lui permettrait de vivre dans le luxe dont elle a besoin (« Tout son être se dilatait dans une atmosphère de luxe : c'était le milieu dont elle avait besoin, le seul climat où elle pût respirer »). Mais pour réussir dans ce milieu il faut en jouer les règles et cela implique des concessions morales que l'héroïne malgré tout n'est pas disposée à faire. Sans compter les jalousies des autres oiseaux de la cage, car dans la cage il y a aussi des corbeaux malfaisants et autres pies médisantes. Tout cela fait que notre bel oiseau risque bien de s’engluer dans l'impitoyable corruption de ce petit monde.
Edith Wharton touche une corde sensible chez moi, c’est évident. Est-ce son intelligence, son style (cette dame écrit superbement), son érudition, son humour ? Est-ce le fait que je ne pouvais m'empêcher de mettre le visage d’une jeune fille de laquelle j’étais amoureux sur celui de Lily Bart ? Je n'en sais rien, toujours est-il que ce livre respire le bleu, qui est la couleur du bonheur. C’est comme plonger dans une piscine bleue par une belle journée d'été, on prend un bain de rafraîchissement. On s'évade donc. Mais la société décrite par Wharton a beau être frivole et vide de sens, c’est loin d'être le cas de ses romans, car elle nous parle de la vie, des choix de vie, des fausses idoles qui miroitent devant l'œil de l’insensé. Ce livre est une tragédie et à ce titre il fait partie des romans qui comptent pour celui qui le lit. Et en fermant le livre j’imagine Edith Wharton qui me dit : et toi Saule, fais-tu partie des fous qui dansent dans la maison de liesse ?
Les éditions
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Chez les heureux du monde [Texte imprimé] Edith Wharton trad. de l'américain par Charles Du Bos préf. de Frédéric Vitoux
de Wharton, Edith Vitoux, Frédéric (Préfacier) Du Bos, Charles (Traducteur)
Gallimard / Collection L'Imaginaire.
ISBN : 9782070758456 ; 12,10 € ; 26/04/2000 ; 422 p. ; Poche -
Chez les heureux du monde [Texte imprimé] Edith Wharton édition préfacée et annotée par Marie-Christine Lemardeley traduit de l'anglais (États-Unis) par Charles Du Bos
de Wharton, Edith Lemardeley, Marie-Christine (Préfacier) Du Bos, Charles (Traducteur)
le Livre de poche / Bibli
ISBN : 9782253082521 ; EUR 7,80 ; 27/01/2010 ; 448 p. ; Poche
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Les critiques éclairs (9)
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Entrelacs délicat
Critique de Lison (, Inscrite le 6 février 2014, 74 ans) - 11 août 2015
Satire percutante du monde superficiel et malveillant de la haute société new-yorkaise, roman d'une grande finesse où ce qui est dit et ce qui est suggéré forment un entrelacs délicat, voilà une lecture qui, je le pressens, va m'imprégner durablement.
Une homme riche, sinon rien!!!
Critique de Donatien (vilvorde, Inscrit le 14 août 2004, 81 ans) - 17 mars 2011
Je suis partagé entre ces deux sentiments. Il n'est pas question de mettre en cause l'importance de ce roman ni les qualités du style d'Edith Wharton. Elle maîtrise absolument l'analyse psychologique et sociologique de ces personnages de la « grande bourgeoisie »américaine du début du XX ème siècle.
L'auteure est habile à nous faire aimer son personnage principal, Lily Bart, malgré la critique efficace de ses aspirations et stratégies pour faire à tout prix partie de cette« crème « de la société new-yorkaise qui considère le fait de « travailler » pour gagner sa vie comme « indécent ».
Ce monde m'a rappelé certains documentaires animaliers décrivant les moeurs des insectes, leurs stratagèmes de survie, de reproduction, etc..
Dès le début , Lily se trouve dans un lieu symbolique de choix de vie, comme la gare de Grand Central, comme prise dans une toile! Elle y rencontre Selden qui sera le seul à vraiment l'aimer, mais surtout à parfaitement avoir analysé ce« grand monde ». Je cite « L'originalité de Selden était de n'avoir jamais oublié le chemin de la sortie. ».
Mais Lily, dont le coeur" palpite" pourtant, croit pouvoir trouver le mari idéal, riche et accommodant dans ce milieu qu'elle fréquente, même si ses revenus sont modestes.
Le moment le plus important de leur vie et du roman, est celui de sa conversation avec Selden lors d'une promenade, pages 99 à 113, au cours de laquelle elle esquive la demande explicite de cet admirateur sincère, mais lucide. Je cite : « Etait-ce de l'amour, se demandait-elle, ou simplement une combinaison accidentelle de pensées et de sensations heureuses? ».
« C'est cet amour d'une heure, ce triomphe fugitif sur eux-mêmes, qui les avait gardés de l'atrophie et de l'extinction..... ».
Après ce moment magique, commence la descente aux enfers: les espoirs déçus, les humiliations, la pauvreté, le sentiment d'inutilité : « elle se sentit rien de plus qu'une marchandise humaine superflue... ». Elle tentera même de travailler, mais sans succès parce qu'elle n'avait pas" appris".
Je n'oublierai pas Lily Bart, mais elle aurait dû réagir plus tôt et Selden aurait pu être plus assertif!
Cette envie d'intervenir pour aider ou "réveiller" les personnages est un signe de l'empathie qu 'Edith Wharton est parvenue à susciter.
Well done!
Quelque chose en nous de Lily Bart
Critique de Maria-rosa (Liège, Inscrite le 18 mai 2004, 69 ans) - 28 juin 2010
Un vrai bijou de lecture comme je les aime.
Le bûcher des vanités
Critique de Béatrice (Paris, Inscrite le 7 décembre 2002, - ans) - 20 août 2008
Très bien rendu ce « monde étouffant et aux mille soupçons ». Reste une faiblesse ; à force de détailler tous les ressorts de l’âme, le texte devient trop chargé à mon sens. Une écriture plus aérée ( suggestions, ellipses, raccourcis d’après le principe « less is more ») m’aurait ravie.
Lily, joujou de luxe...
Critique de Naemia (, Inscrite le 9 juillet 2006, 40 ans) - 29 avril 2008
Au passage, j'ai ainsi découvert le merveilleux style d'écriture d'Edith Wharton.
l'impossibilité de choisir
Critique de Prince jean (PARIS, Inscrit le 10 février 2006, 51 ans) - 16 décembre 2007
j'ai commencé le livre en début de semaine, autour d'une luxueuse piscine dans un bel hôtel de Thaïlande et je le termine à Paris, dans le froid de l'hiver.
j'ai un peu l'impression d'avoir accompagné Lily Bart dans son chemin de la lumière aux ténèbres.
évidemment, il s'agit d'une lumière sans Dieu, sans joie, c'est une lumière qui brûle et non une lumière qui éclaire , que le monde où miss Bart évolue.
je pense que tout le monde se sent quelque part un peu Lily. Ce qui m'a le plus frappé, c est l'incapacité de Lily de faire un choix. Elle a plusieurs opportunités de construire son bonheur, et elle les refuse. le choix de l'amour l'éloignerait de la promesse d'un mariage d'argent. le choix de l'argent l'engagerait à renoncer à l'amour.
le génie de Wharton est évident, les derniers chapitres sont d'une beauté incroyable, et le sentiment d'enfermement, de descente aux enfers, où chaque issue semble se refermer sur elle même, rend la lecture très éprouvante.
J’t’aime bien Lily… aussi…
Critique de THYSBE (, Inscrite le 10 avril 2004, 67 ans) - 15 juin 2005
En plus de cette superbe critique de Saule sur ce livre, je suis aussi d’accord sur ce qu’il dit sur un autre ouvrage d’Edith Wharton « les chemins parcourus » : on se retrouve un peu dans ses histoires.
Les personnages sont décrits avec une telle réalité que l’on peut transposer aisément ces portraits psychologiques dans nos sociétés du 21ème siècle quel que soit notre milieu social.
J’y ai puisé beaucoup de messages.
Tout d’abord, sur la difficulté de se débarrasser d’une éducation et de l'incapacité à s’adapter à une situation en prenant du recul sur ces convictions.
Une belle démonstration aussi sur la jalousie et ses coups bas.
La représentation de la beauté, sa place dans la société et ce qu’elle génère sur les autres et sur celle qui la détient qui en devient fragile à la moindre angoisse de la perdre.
La place aussi du célibat homme et femme. Situation familiale perçue complètement différemment suivant le sexe. La place réduite de la célibataire dans la société, ce qu’elle suscite de convoitise par ces couples qui se sont mariés justement par convention et comment ils le font payer à celle qui n’a pas encore réussi à se convaincre de franchir le pas.
Comment un couple en crise conjugale exploite une personne de son entourage pour régler leur problème et ensuite l’ignorer pour ne plus être ramené à cette période douloureuse.
Oui vraiment, chacun retrouvera une situation connue ou intime.
L’intolérance sur la différence. La faiblesse de l’autre que l’on pointe pour masquer ses propres faiblesses.
Edith Wharton est une grande observatrice sur les conditions humaines.
J’ai aussi été frappée par cette histoire familiale qui se répète. Lily a fait dans la continuité de son père.
Mais, dans tout ce tableau assez noir, je vois un beau rayon de soleil dans le personnage de cette jeune femme sauvée grâce à Lily. C’est là le grand message que je garderai. A savoir : même quand on pense qu’aucune issue positive n’est possible, l’incroyable peut se produire.
Tragédie
Critique de Fee carabine (, Inscrite le 5 juin 2004, 50 ans) - 22 septembre 2004
"Chez les Heureux du monde", à mes yeux, est un livre très noir. Il nous conte le triste destin d'une femme piégée par une société qui la condamne à l'atrophie intellectuelle et qui bride toutes ses aspirations spirituelles ou morales, une femme piégée par une société qui ne lui laisse aucune autre issue que le mariage, mariage dont la réussite sera évaluée à l'aune de la fortune du mari. De morale, il n'est pas question dans la chasse au bon parti, tant la compétition est féroce. Tous les moyens sont bons pour ferrer le gros poisson: robes dont le choix est soigneusement étudié (comme le souligne justement Saint-Jean-Baptiste, mieux vaut ne pas faire d'erreur en la matière!), intérêt feint pour les préoccupations - souvent des plus futiles - du mari potentiel. Et Lily joue le jeu, elle se dépense sans compter et joue de toutes les armes dont elle dispose, jolies toilettes, hypocrisie et mensonges... Mais Lily finit toujours par reculer alors qu'elle est tout près de toucher au but, dégoûtée par les compromissions auxquelles elle a déjà dû consentir et plus encore par celles à venir. Et d'atermoiement en atermoiement, sa sacro-sainte réputation écornée, Lily finira par sombrer dans la déchéance...
"Chez les Heureux du monde" est véritablement une tragédie, un livre placé de bout en bout sous le signe du deuil, des aspirations inassouvies, de tout ce qui aurait pu être... et dont la liesse, à mes yeux, est absente. Une perception différente de celles de Saule et de Saint-Jean-Baptiste, que je rejoins pourtant pour vous dire que "Chez les heureux du monde" est vraiment un très grand livre, de ceux qui continuent à nous parler pendant longtemps, nous amenant à questionner nos choix de vie et nous incitant à la compassion.
Liesse et tragédie
Critique de Saint Jean-Baptiste (Ottignies, Inscrit le 23 juillet 2003, 88 ans) - 25 janvier 2004
Mais c'est parce que je n'y étais pas invité. Ce n'est pas l'envie qui manquait !
Pourtant j'ai l'impression d'y avoir été. J'y ai suivi Lily Bart pas à pas, je suis tombé sous son charme et j'ai été fasciné !
Son éducation l'avait conditionnée pour vivre chez les heureux du monde. Elle en connaît toutes les règles : c'est un monde où le paraître tient lieu de loi et où l'argent est l'arme suprême. Seulement voilà, Lily est désarmée, elle est dépourvue d'argent !
Elle sera un jour victime de la jalousie d'une rivale très fortunée. La voilà refoulée et nous la suivons dans sa déchéance.
Lily Bart est un personnage pathétique.
L'auteur(e) nous raconte ce milieu new-yorkais du début du siècle dans lequel elle a vécu et qu'elle connaît très bien. Dans son livre, il occupe véritablement la place d'un personnage.
C'est un monde flamboyant, frivole et méchant jusqu'à la cruauté. Un monde vide de sens où l'on ne vit que pour s'amuser. Mais on y respecte les apparences et les conventions. Les règles d'éducation y sont très codifiées. La plus stricte décence y est de rigueur.
Un monde à des éternités du nôtre ! Un jour, à une soirée mondaine, notre Lily paraît dans un tableau vivant, sans bijoux, dans une belle robe blanche et quelques hommes pudibonds se disent choqués…
Aujourd'hui, la "Star" apparaîtrait sans doute avec beaucoup de bijoux et très peu de robe ! Et probablement que plus personne ne serait choqué ! …
Dés le début du livre on se demande si notre héroïne rencontrera l'amour : elle est belle, pure, bonne, intelligente et parfaitement éduquée …mais tellement superficielle et désincarnée !
Son amoureux est-il trop timide ou trop désinvolte …ou trop lucide ?
Et on est pris de compassion…
Ce récit, raconté sur le ton allègre, plein d'humour et d'esprit, est une tragédie !
Un très, très grand livre !
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Edith Wharton | 11 | Avada | 18 septembre 2013 @ 23:19 |