Protohérissé ( BP : Unabomber )
de Gergana Dimitrova, Zdrava Kamenova, Marie Vrinat

critiqué par Pucksimberg, le 7 juin 2015
(Toulon - 45 ans)


La note:  étoiles
Une charge contre le monde technologique qui nous déshumanise
Voilà une pièce de théâtre originale, engagée et assez pessimiste. Plusieurs personnages s'expriment, pas toujours identifiables. Les discours s'entremêlent pour mettre en valeur la critique du monde moderne qui est faite, d'un monde technologique qui n'a plus aucune limite et qui nous fait perdre toute humanité. A force de modifier le monde dans lequel nous vivons, que reste-t-il de la nature telle qu'elle était, du monde tel qu'il était originellement et de l'homme qui est altéré lui aussi par certains progrès ? Cette pièce bulgare permet de s'interroger sur le progrès et sur notre part d'humanité qui tend à disparaître. C'est pour cette raison que l'un des personnages de la pièce est un échidné, un animal proche du hérisson qui est en voie de disparition et pourtant qui a su traverser de nombreux siècles, voire des millénaires. Il est question aussi d'un ascenseur qui nous permettrait de gagner l'espace, des satellites qui nous filment et qui violent notre intimité, comme ce Big Brother évoqué chez Orwell. L'homme d'aujourd'hui rappelle l'homme que nous avons déjà connu à l'heure des conquêtes, sauf qu'ici il s'agit de conquérir l'espace. Entre ces diverses prises de parole, figurent aussi des véritables phrases de Ted Kaczynski, terroriste américain et militant écologiste.

Cette pièce de théâtre décontenance au départ par sa structure, par le fait que des répliques s'entremêlent sans qu'il y ait de précisions en marge sur le locuteur. On déduit donc selon le contenu de la réplique. Les premières pages semblent marquées par une discontinuité, le lecteur ne voit pas le lien évident entre ces personnages. Par la suite, la portée critique permet de cimenter toutes ces interventions qui servent une réflexion assez pessimiste sur ce monde moderne où les scientifiques sont rois. Le lecteur/spectateur est sous l'emprise de cette prose qui devient parfois inconfortable. On sourit parfois, mais on ressort surtout inquiet face à ce monde qui est en perpétuel changement et qui semble broyer tout ce qui a précédé. Ce théâtre éco-terroriste fait du bien car il éveille les consciences, secoue et rappelle combien il est nécessaire de discuter de notre monde et de la nature. On croit souvent que les discussions sur l'écologie sont ringardes, mais c'est pourtant de nous dont il est question.