Entre terre et mer T3 - La Belle Lavandière
de Pascal Bresson (Scénario), Erwan Le Saëc (Dessin)

critiqué par Shelton, le 28 octobre 2015
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Quand la morue était pêchée à la voile et à la rame...
Je suis parfois surpris de découvrir de bien belles bandes dessinées dont personne ne parle, voire dont certains disent du mal. Cela me donne d’abord la certitude que des goûts et des couleurs, comme disait ma mère, il ne faut pas trop discuter ni chercher à convaincre les autres ou se convaincre. Mais cela me donne aussi à penser que certains critiques oublient tout simplement le plaisir des lecteurs qui achètent avec une bande dessinée une belle histoire, un beau livre et un rêve… Oui, on a le droit de rêver et espérer un monde meilleur que celui dans lequel on vit… et pourquoi ne pas asseoir nos rêves sur nos lectures ?

Donc, j’ai dévoré la série Entre terre et mer, trois beaux albums signés Pascal Bresson et Erwan Le Saëc. Il s’agit de l’adaptation en bédé d’un roman d’Hervé Baslé et j’avoue bien simplement que j’ai pris beaucoup de plaisir à suivre le jeune Pierre Abgrall dans sa quête d’un métier et d’un sens à sa vie…

Sans donner tous les détails, disons qu’il s’agit d’un jeune paysan qui va découvrir la mer, la navigation et, aussi, la relation avec l’autre d’une façon générale. Je sais que certains ont voulu critiquer la vision des auteurs en pointant un monde idyllique où les hommes iraient risquer leur vie en pleine tempête tandis que les femmes attendraient fidèles leur homme. Oui et alors ? Le matriarcat à la bretonne semble en gêner quelques-uns… Il ne m’a pas semblé entendre les mêmes critiques quand Lupano dans son merveilleux Un océan d’amour dépeint le même attachement entre femme et homme, quand la femme refuse le non-retour de son homme, quand elle part au bout du monde pour le retrouver…

Les auteurs nous peignent la vie difficile dans la région de Saint Malo juste après la première guerre mondiale, une période difficile pour tous et c’est très bien rendu dans la bande dessinée. Le scénario est peut-être simple mais il n’est pas simpliste. Certes, j’entends bien que nous n’aurons pas tous les états d’âmes de Pierre, de Marie, de Jeanne… Mais en même temps, trois albums ne permettent pas de tout montrer, tout dire, tout expliquer… et chacun peut imaginer une fin à sa façon…

A travers un récit bien construit, profondément humain, très documenté, on va comprendre l’armement des bateaux, la pêche à la morue et finalement tout savoir sur Terre-Neuve, sur Saint-Pierre et Miquelon, sur ces marins, sur ces pêcheurs… Certes cette époque a disparu, la pêche est devenue un pillage industriel qui détruit rapidement tous les équilibres de la nature… Bientôt, la morue aura disparu… mais pas le souvenir des Terre-Neuvas, ces pêcheurs de morues !

Certains d’entre vous ont peut-être vu la série télé qui fut réalisée à partie du roman à la fin des années quatre-vingt-dix. Moi, cela m’avait complètement échappé et du coup je suis très heureux d’avoir corrigé cela avec cette série de trois albums et cette belle histoire…

On peut reprocher au dessinateur Erwan Le Saëc de ne pas être parfait dans les scènes d’intimité et de discussion, par contre il a le sens de la mer, le trait venté et vigoureux qui permet de nous plonger – presque sans jeu de mot – dans cet océan glacé et terrifiant !

Une très belle série de bande dessinée adaptée à un très large public où les passionnés de la mer trouveront un motif de bonheur… Quant à ceux qui préfèrent les pirates, les abordages, les trésors perdus vous trouverez certainement en librairies d’autres ouvrages pour apaiser vos envies. C’est cela la bédé aujourd’hui, il y en a pour tous les goûts !!!