La cavale du Dr Destouches de Louis-Ferdinand Céline, Christophe Malavoy (Scénario), Gaëtan Brizzi (Dessin), Paul Brizzi (Dessin)

Catégorie(s) : Bande dessinée => Divers

Critiqué par Blue Boy, le 19 novembre 2015 (Saint-Denis, Inscrit le 28 janvier 2008, - ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (25 717ème position).
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Céline sur la touche

Paris, 1944. Le débarquement a commencé. Les collaborateurs commencent à fuir vers l’Allemagne. Parmi eux, le docteur Destouches, alias Louis-Ferdinand Céline, en compagnie de sa femme Lucette et de son chat. C’est un portrait saisissant de l’écrivain qui est dressé ici, ainsi qu’une peinture haute en couleurs des Nazis en pleine déroute. Un scénario conçu par Christophe Malavoy, d’après les écrits de Céline, accompagné des frères Brizzi, les jumeaux stars du cinéma d’animation français.

Rarement une personnalité du XXe siècle aura autant suscité la controverse que Louis-Ferdinand Céline, brillant écrivain, auteur notamment du chef d’œuvre « Voyage au bout de la nuit », mais aussi hélas de pamphlets antisémites. L’ouvrage est-il destiné à réhabiliter l’homme ? Aidé par les frères Brizzi au dessin, le comédien Christophe Malavoy, féru des œuvres de l’écrivain, s’est efforcé de creuser la personnalité de ce dernier. On ne peut pas dire que Céline en sort véritablement grandi, mais à défaut de le porter aux nues, ce récit nous aide, du moins tel semble être son but, à mieux le comprendre, dévoilant un personnage à la fois torturé et aigri. Malavoy cite l’écrivain, qui exerçait aussi la profession de médecin, quand il prétend avoir « planqué et hébergé » des Juifs avant « cette putain de guerre » [la seconde guerre mondiale, ndr]. On peut être tenté de le croire, car l’homme ne semblait pas être un si mauvais bougre. A vrai dire, Céline n’aimait pas grand monde, il suffit de lire « Voyage » pour le vérifier. Ainsi il détestait tout autant les Nazis dont il était forcé d’accepter la protection par crainte des représailles de la Résistance. Bref, le débat reste ouvert, mais il paraît délicat d’afficher à son égard un jugement d’une sévérité implacable, à l’inverse de Robert Le Vigan, dit la Vigue, acteur collaborationniste mégalomane et délateur de renom.

D’une originalité induite en grande partie par le superbe dessin au crayonné des frères Brizzi, l’expressivité des personnages y est fascinante, dans un style caricatural qui rappelle Dubout en plus raffiné et le rapproche ainsi de l’opéra-bouffe. A ce titre, les faciès de Céline et de Le Vigan sont particulièrement éloquents. Le genre convient parfaitement à l’atmosphère de déroute d’une dictature hitlérienne peu versée dans la subtilité. Reste que cette lecture pittoresque n’est pas exempte de défauts, certes tout à fait mineurs La narration risque peut-être de chagriner certains lecteurs en quête de rythme par sa tendance à se diluer, même si on conçoit facilement qu’élaborer un scénario à partir du témoignage – celui de l’écrivain - de cette débâcle chaotique, scénario inspiré de trois de ses ouvrages, ne pouvait tenir de la mécanique bien huilée. Mais force est de reconnaître que globalement, le résultat est tout à fait honorable, que l’histoire est relativement fluide et se lit sans déplaisir.

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La Trilogie allemande en bande dessinée

8 étoiles

Critique de Vince92 (Zürich, Inscrit le 20 octobre 2008, 47 ans) - 22 août 2016

Louis-Ferdinand Céline est un génie littéraire reconnu, inventeur d'une langue d'une richesse incomparable, il est presque aussi souvent honni pour ses prises de position antisémites. Il serait vain de défendre l'auteur des Beaux Draps ou de Bagatelle pour un massacre. La lecture de ces pamphlets est accablante pour Céline.
Misanthrope notoire, paranoïaque obsessionnel, Céline ressemble beaucoup à l'humanité qu'il honnit... capable des plus abjectes pensées, dans les faits il ne ferait pas de mal à une mouche. Médecin, il s'est toujours mis au service des démunis et du petit peuple auquel appartient en quelque sorte. qui sont ceux qui permettent de juger? Sont-ils si vertueux qu'ils ont pu au sortir de la guerre mettre au ban le seul véritable novateur de la littérature en France à cette époque. De Tartre, nous gageons qu'on n'en entendra plus parler dans cinquante ans, je gage que Céline aura encore sa place au Panthéon des génies de la langue à cette époque.
Cette bande dessinée reprend la Trilogie allemande (D'un Château l'autre, Nord, Rigodon) qui conte la longue et incroyable fuite de L-F Céline à travers l'Allemagne afin de rejoindre le Danemark et fuir l'avancée des alliés qui serait, étant donné sa compromission avec les autorités collaborationnistes, synonyme d'arrestation.
Les auteurs, Christophe Malavoy (?!) et les Frères Brizzi ont effectué un remarquable travail. Le premier en parvenant à condenser trois romans en quatre-vingt dix pages tout en gardant fidèle l'esprit qui habite la grande fresque de Céline, les autres en dessinant à merveille l'Allemagne hitlérienne à l'agonie, un Céline plus vrai que nature et en donnant un ton vraiment saisissant à cette aventure rocambolesque. Les scènes phares sont telles qu'elles apparaissent dans les romans... seul reproche, le fait d'avoir dû trancher et que des scènes clés ne soient plus présentes dans l'économie du récit. Mais, l'exercice exigeait de faire des choix et l'un dans l'autre, ceux que les auteurs ont effectués ont été les bons.

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