Facteur pour femmes de Didier Quella-Guyot (Scénario), Sébastien Morice (Dessin)

Catégorie(s) : Bande dessinée => Aventures, policiers et thrillers

Critiqué par Hervé28, le 15 novembre 2015 (Chartres, Inscrit(e) le 4 septembre 2011, 55 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (27 112ème position).
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La guerre de 14 vue autrement

Cela faisait un moment que je tournais autour de cet album. Et puis, je l'ai acheté dans sa version toilée, de très bonne qualité, comme savent le faire les éditions Bamboo.
Et puis ce one shot (j'arrête , le plus possible, de me lancer dans des séries interminables) est signé de Morice et Quella-Guyot, les auteurs d'un très original et remarquable "Papeete 1914" consacré, entre autre, à un épisode de la Grande Guerre.
Justement, nous replongeons ici , non dans les tranchées, mais dans cette période vécue sur une île bretonne, ressemblant étrangement à l’île de Houat (pour ceux qui connaissent)
A travers Maël, facteur ad hoc, nous découvrons le quotidien de cette île où tous les hommes sont partis combattre, tous sauf un, Maël qui saura à travers des astuces et des mensonges, réconforter ces femmes seules.
La grande qualité de cette histoire réside dans ce personnage de Maël, pour lequel, au fil de la lecture, nous éprouvons de moins en moins de sympathie; mais aussi dans le chapitre de conclusion, qui donne envie de relire l'ensemble sous un nouvel éclairage. C'est osé, malin et surtout très intelligent, cette conclusion.
Reste un autre point positif de l'album que j'avais, je crois déjà souligné lors du précédent diptyque, la qualité du dessin ...de véritables cartes postales parfois... un dessin magnifique doublé de couleurs fort réussies, cet album ne fait que ravir le breton, amateur de bd que je suis.
La guerre de 14 vue autrement.......... lisez-le.

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C'est plus facile d'être vainqueur quand on est tout seul...

6 étoiles

Critique de Dixie39 (, Inscrite le 12 mars 2017, 54 ans) - 16 mai 2018

Quand tous les hommes jeunes ou valides sont partis à la guerre (la première) que reste-t-il dans cette petite île bretonne ? Les femmes, les enfants, les vieux et les bêtes… et Maël, jeune homme un peu simplet au pied-bot, qui va devenir bien vite le facteur attitré et, accessoirement, le chéri de ces dames. Toutes ? Non, bien sûr. Maël est prudent. Il ne butine que dans les fermes éloignées, auprès de femmes qui ne se connaissent pas et ne risquent pas de se rencontrer, pour qu'aucun grain de sable ne vienne perturber ses plans.

"C'est plus facile, il le sait bien, d'être vainqueur quand on est tout seul, mais tout de même…."

Par le courrier qu'il distribue, il apprend beaucoup sur ses futures conquêtes. Car bien sûr, Maël en profite pour le lire avant et mettre à profit tout ce qui pourrait lui permettre de séduire rapidement les plus belles femmes. Pendant que Maël prend du bon temps, les maris subissent la guerre et ses horreurs. Certains reviennent. Méconnaissables, traumatisés, gueules cassées et mental en berne !

"Il ne mangeait plus, s'épuisait. Au mieux de sa forme, je l'asseyais sur une chaise de la cuisine et il passait des heures à regarder par la porte laissée entrouverte ce qui se passait au-dehors, sans bouger. Un refus total de se redonner vie. La guerre l'avait complètement déglingué…"

Didier Quella-Guyot et Sébastien Morice rendent bien la réalité des tranchées et la vie de l'île qui continue, grâce aux femmes qui peu à peu se chargent de tout ce que faisaient leurs hommes, en plus de leurs tâches habituelles.

"Avec l'aide des enfants et des vieillards, les femmes assurent peu à peu et de mieux en mieux, la continuité des exploitations agricoles. Elles peinent à la tâche, s'épuisent, passant du tricot à la fourche, battant le linge au lavoir, puis frappant le cul des vaches pour les mener au pré, fauchant le foin pour l'hiver, ramassant les bouses pour se chauffer".

Les dessins sont magnifiques et la colorisation superbe ! J'aurais préféré que la fin soit plus développée et non simplement racontée par une des protagonistes de cette histoire. Mais ce n'est qu'un point de vue personnel…

Bel album et beau moment de lecture !

8 étoiles

Critique de Shelton (Chalon-sur-Saône, Inscrit le 15 février 2005, 68 ans) - 15 décembre 2017

Voilà, nous sommes encore dans les célébrations de la Grande Guerre, celle qui a été une colossale boucherie, celle dont les tranchées font encore froid dans le dos et il faut bien admettre que de très nombreuses bandes dessinées qui ont retracé cette triste période ne l’ont pas fait dans la dentelle… certes, c’était probablement indispensable : d’une part pour se souvenir, d’autre part pour rappeler à nombreux de nos contemporains que la guerre reste encore une atrocité et lors d’un tel conflit, il n’y a que des vaincus ! C’est l’humanité qui est en danger à chaque guerre… Non ?

Mais dans cet univers de bandes dessinées sombres, il en est au moins une qui, tout en évoquant la grande Guerre, tente de donner un autre tempo même s’il ne s’agit pas d’une bande dessinée humoristique. En effet, Facteur pour femmes, bande dessinée en un album qui raconte une histoire qui va de 1914 à 1918 avant de se conclure de nos jours ou presque…

Autre vision de la guerre ? Oui, mais surtout une histoire qui a pour cadre une île bretonne. Cette dernière n’est pas absolument déterminée, elle est un mélange entre plusieurs îles de cette belle région et les connaisseurs reconnaitront ici ou là des éléments faisant penser à Houat, évoquant l’Île-aux-moines ou rappelant l’île de Bréhat !

On est donc dans un huis-clos car l’île est quand même bien coupée du reste du monde… La guerre a pris tous les hommes, du moins tous ceux qui étaient en bonne santé et de moins de cinquante ans… Il ne reste que Maël, il faut dire que sa jeunesse a été contrebalancée par son pied-bot et que l’armée n’a pas voulu de lui…

Le seul lien qui va rattacher l’île et ses habitants avec le continent en guerre, c’est le courrier ! Or, c’est à Maël que l’on va demander de jouer au facteur… Tous les ingrédients sont réunis pour notre histoire : Maël rendra visite aux femmes de l’île tous les jours ou presque, enfin, quand le bateau apportera le courrier, quand il y aura des lettres à distribuer !

Pour ce qui est de l’histoire elle-même – très bon scénario de Didier Quella-Guyot – j’ai envie de dire que vous en savez assez. En dire plus ce serait prendre le risque de spoiler l’histoire, de vous casser la lecture…

Vous allez donc faire connaissance avec Maël mais aussi avec Gaud, Soazig, Simone, Germaine… Bref, les femmes de l’île ! J’ai personnellement beaucoup aimé cet album, apprécié ce regard sur la période de la guerre, trouvé crédible la situation générale… Il y a dans cette bande dessinée de l’humain, de l’historique, du polar, du thriller, de la vie ilienne… et tout cela fait passer un merveilleux moment de lecture !

La narration graphique de Sébastien Morice et surtout ses couleurs transforment cette île bretonne en paradis terrestre… Remarquez, il n’a pas beaucoup d’effort à faire car la Bretagne est effectivement paradisiaque !

Enfin, c’est l’occasion pour les plus jeunes lecteurs de mesurer que le courrier était un outil de communication plus lent que le courriel mais qu’il était quand même très efficace et qu’il permettait de partager, de voyager, de rêver… mais c’était il y a longtemps, à une autre époque… lors d’une histoire qui commençait le 28 juin 1914 !

Une excellente bande dessinée destinée à un très large public !

Le malheur des uns...

7 étoiles

Critique de Fanou03 (*, Inscrit le 13 mars 2011, 49 ans) - 6 février 2017

Je rejoins tout à fait l'enthousiasme de Hervé concernant la qualité de Facteur pour femmes. Le graphisme de Sébastien Morice est superbe, d'une grande élégance, sans parler des couleurs, aux tons ambrés et pastel, donnant une ambiance plutôt douce à l'ensemble de l'album. Le scénario est habile, il soulève notamment la question morale du comportement de Maël, pour qui le malheur des uns, celui des hommes de l'île en âge de se battre partis au front, profite au garçon qui va découvrir les plaisirs de la vie en prenant du même coup sa revanche par rapport à sa marginalité dans laquelle la communauté insulaire le maintenait. Du coup, au delà du traitement plutôt joyeux des parties fines de Maël et des femmes du villages, une gravité constante imprègne le récit et lui donne un équilibre très réussi.

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