La nacelle turquoise de Evelyne Wilwerth

La nacelle turquoise de Evelyne Wilwerth

Catégorie(s) : Littérature => Nouvelles

Critiqué par Ddh, le 6 février 2016 (Mouscron, Inscrit le 16 octobre 2005, 83 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (23 255ème position).
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Trois duos de rêve

Souhaiter être dans une nacelle, c’est flotter dans l’air au-dessus de toute contingence terrestre. Le bleu turquoise ajoute une touche poétique.
Evelyne Wilwerth nous lègue dans cet ouvrage trois nouvelles plutôt étendues. Chacune d’elles met en scène deux personnages : Yanaël et Angelika, Phil et Fred, Eglantine et Bérengère. Yanaël et Angelika : l’art tient une grande place et l’attrait vers le Nord pour l’un des personnages, le Sud pour l’autre. Phil et Fred : Phil, la jeune Philomène, fuit son milieu qui l’étouffe ; Fred, d’âge mûr, se retrouve à ses côtés. Des souvenirs les brisent, tous deux.
Evelyne Wilwerth s’est astreinte à un travail particulièrement méticuleux et c’est une réussite. Des textes en italique donnent la progression des textes avec un minutage précis. Les textes en écriture normale apportent au lecteur le ressenti des interlocuteurs. Il s'en dégage une poésie bien agréable à suivre.

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Histoires physiques

8 étoiles

Critique de Kinbote (Jumet, Inscrit le 18 mars 2001, 65 ans) - 1 février 2017

Évelyne Wilwerth pratique une écriture véloce qui colle aux émotions de ses personnages. Et plus encore aux sensations qu’ils éprouvent. Car c’est d’une écriture très sensuelle dont il s’agit, qui fait la part belle aux couleurs et aux parfums, notamment. Tout cela concourt à nous faire à la fois voir et vivement ressentir ce qui nous est raconté.

Wilwerth adopte ici un dispositif narratif singulier (comme d’ailleurs pour Hôtel de la mer sensuelle paru précédemment) pour conter les trois histoires de ce recueil qui racontent chacune une rencontre entre deux êtres qui se connaissent ou non mais auront à se voir pour se parler.

Ils concourent l’un vers l’autre et, pour nous faire ressentir physiquement la rencontre, en bonne observatrice de la chose sensible, l’auteure décrit les trajectoires conjointes, indications d’heures à l’appui, des personnages jusqu’au point d’impact puis, à la façon d'un choc de billes de billard, ce qui résulte de la collision. Les rapprochements et les éloignements, heure après heure, minute par minute, car ne il faut manquer aucun instant : pour comprendre l’enjeu de ce qui se joue, tout compte.

Elle le fait par une succession de paragraphes qui épousent le point de vue de chacun des deux personnages et, sous un angle de vue surplombant, un commentaire marqué par des caractères en italiques.

Puis il y a les histoires. Celles de la rencontre entre un homme et une femme dont on apprendra quel lien les relie. D’une ado fugueuse et d’un SDF. Enfin, la rencontre de deux voisines qui, par la force des choses, auraient dû se rencontrer plus tôt et ne le feront qu’à la veille du départ de l’une d’elles.

Et toujours, cerise sur le gâteau de la rencontre providentielle, une sorte d’ascension, de mise en bulle, de petit éveil ou nirvana qui fait se (re)poser les protagonistes avant de repartir...

« ( …) je ressens une poussée légère, on va peu à peu monter vers le ciel, j’ai l’impression de me délester, de lâcher plein de saletés, ou de mesquineries, notre nacelle est la plus lumineuse, déjà le feuillage des arbres, c’est tout mon être qui est soulevé, enfin soulevé vers l’immensité, comment on appelle ça, une ascendance ? Une transcendance ? »

Ces êtres que les circonstances de la vie mettent en relation ont un vif besoin de parler, de délier par la parole des nœuds de leur existence, de justement se délester... Ce point de jonction était primordial à leur survie. Au point de rencontre de deux êtres, il y a toujours un centre de paroles, une base relationnelle de (re)lancement dans l’existence, semble nous dire Wilwerth.

Dans son histoire de la littérature récente, Olivier Cadiot écrit : "Le plus difficile, c’est de superposer l’histoire à la géographie." On peut dire sans se tromper que, par le contenu et la forme de sa matière verbale, Evelyne Wilwerth réussit ici à merveille ce défi.

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