De sang-froid de Truman Capote
( In cold blood)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone , Littérature => Policiers et thrillers
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un fait divers obsédant...
...pour l'auteur en tout cas, qui a passé 6 ans à reconstituer les faits et agencer son drôle de roman. Difficile en effet de coller une étiquette sur ce livre qui tient à la fois du récit journalistique, du roman policier et du drame. Pour beaucoup de connaissances c'est le chef-d'oeuvre de Capote, bien que je ne partage pas tout à fait cette opinion.
Certes, le travail littéraire en lui-même est époustouflant, mais le sujet glace et met mal à l'aise.
Résumons, en 1959, deux délinquants désoeuvrés, Dick Hickock et Perry Smith, massacrent (il n'y a pas d'autre mot !) la famille Clutter pour une banale histoire de vol. Retrouvés par la police, ils furent condamnés à mort.
Truman Capote avait appris la nouvelle de ce meurtre répugnant par les journaux. Fasciné par ce sordide fait divers, il mena sa propre enquête, visita les lieux du crime dans le Kansas et finit par rencontrer les tueurs pour qui il se prit d'une vague sympathie, allant même jusqu'à payer leurs funérailles.
Son récit, classique et minutieux, suit la progression du parcours des deux tueurs, mettant en parallèle leur itinéraire et la vie de la famille Clutter quelques heures avant le drame. Ensuite, nous retrouvons les deux hommes au moment où ils vont être exécutés.
Cette histoire a profondément obsédé et même bouleversé de façon durable l'écrivain qui cherchait à trouver des réponses, sur la vie, la mort, le destin de ces protagonistes. Le roman peut d'ailleurs être considéré à la fois comme un portrait de l'Amérique profonde et un plaidoyer contre la peine de mort.
Mais voilà, Capote ne nous donne pas les réponses, il reste en-dehors de l'histoire pour se poser en observateur ce qui rend ce livre glaçant.
C'est évidemment un grand livre mais quelque peu dérangeant, à l'image du pays d'ailleurs, ce qui était le message que voulait faire passer Capote. C'est ma foi réussi.
Les éditions
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De sang-froid [Texte imprimé], récit véridique d'un meurtre multiple et de ses conséquences Truman Capote trad. de l'anglais par Raymond Girard
de Capote, Truman Girard, Raymond (Traducteur)
Gallimard / Collection Folio.
ISBN : 9782070360598 ; 9,70 € ; 28/03/1972 ; 506 p. ; Poche
Les livres liés
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Les critiques éclairs (31)
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Chronique de morts annoncées
Critique de Gabri (, Inscrite le 28 juillet 2006, 38 ans) - 8 octobre 2015
C'est une agréable sensation que de terminer un livre avec l'impression d'émerger d'une réflexion, d'avoir envie d'en discuter avec d'autres et de continuer de creuser en regardant le film. Découvrir Truman Capote, journaliste et auteur qui m'était jusqu'alors inconnu, a été la cerise sur le gâteau bien que malgré tout, je n'ai pas toujours trouvé que c'était un roman facile à lire en ce sens où il m'a fallu parfois parfois s'accrocher pour tenir le rythme. Le suspense vient par vagues, mais il y a peu de surprises dans cette chronique de morts annoncées.
Un grand livre sur un fait divers
Critique de Nance (, Inscrite le 4 octobre 2007, - ans) - 25 mars 2014
Récit surprenamment marquant de l’enquête d’un quadruple meurtre d’une famille de fermiers par deux criminels qui pensaient trouver un coffre-fort dans la demeure, ils ne trouveront finalement qu’une quarantaine de dollars. Un fait divers triste et quasiment banal, mais examiné à la loupe et vraiment poussé sociologiquement. La patte de l’auteur est unique, clinique et distanciée, mais avec des touches intimistes. On oscille entre le chaud et le froid. Après avoir vu deux films sur l’auteur, Capote (2005) et Infamous (2006), qui se déroulent tous les deux à cette époque précisément, j’ai été surprise de voir qu’il ne s’est pas mis en scène et qu’il donne l’impression qu’il n’y était pas. J’ai rarement lu quelque chose qui sonne aussi franc, je lève mon chapeau à Capote et son amie Harper Lee (auteure que je respecte aussi énormément) qui l’a aidé dans ses recherches.
Récit sociologique - Une approche très originale
Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 17 septembre 2013
Pour l'option choisie, outre le style reportage, on est comme dans un « Colombo », on sait qui sont les tueurs depuis le début, on attend de savoir comment et surtout quand ils vont tomber dans les mains de la police.
L’auteur ne juge pas ces assassins qui sont en quelque sorte présentés comme des victimes de leur destin.
L’écriture est très soignée mais le récit comporte parfois des longueurs. L'auteur est d’une neutralité déstabilisante ce qui ne permet pas de tenir en haleine le lecteur au fil de ce long roman.
Dans la seconde partie du récit, les amateurs de romans policiers, que ce livre n’est en fait pas, resteront certainement sur leur faim. L’auteur se concentre essentiellement sur le portrait des assassins, en laissant au lecteur le soin de faire le lien entre la personnalité de ces tueurs et la survenance des événements.
En deux mots, cet ouvrage a certainement un grand intérêt littéraire et sera sans doute aussi un régal pour les passionnés par la sociologie d’outre-Atlantique, mais forcera le lecteur lambda à s’accrocher.
l'appât du gain
Critique de Prouprette (Lyon, Inscrite le 5 février 2006, 40 ans) - 14 mai 2013
La folie humaine ne s'explique pas, et c'est ce qui embête les chercheurs, médecins, politiciens actuels.
Ces horreurs ne datent pas d'aujourd'hui, contrairement à ce que nous font croire les médias... Jack l'éventreur n'était pas une fable inventée pour faire peur aux enfants...
Enfin j'ai adoré ce livre, cette dissection du caractère psychologique de chacun des "personnages".
Un livre de dissection ?
Critique de DE GOUGE (Nantes, Inscrite le 30 septembre 2011, 68 ans) - 5 mai 2013
On accompagne les tueurs et on est présent auprès des victimes : drôle de place où Truman Capote ose nous mettre : une réalisation quasi millimétrée.
On reste stupéfié par le sordide, on essaie de comprendre et
on reste en lien étroit avec l'auteur, et je crois que c'est ce qu'il recherche, dans la vague du : mais pourquoi ? Et pour quoi ?
Cruelle autopsie d'un avant-crime et après-crime....................
Une écriture incisive et lourdement quotidienne , un traitement du drame à la fois, lointain et familier, un regard sur l'autre étonnamment proche et distant, un drôle d’ouvrage qui fait mal.
Mais qui parle d'une réalité à laquelle on ne peut échapper.
Du grand ouvrage !
La dentelle du crime ....................
Surprenant et très intéressant
Critique de Mithrowen (La Chaux-de-Fonds, Inscrite le 23 août 2011, 35 ans) - 30 décembre 2012
Un style ultra simple, un fait divers vu sous tous ses angles rendu possible par un travail de recherche vraiment incroyable.
En lisant le bouquin, on comprend très rapidement pourquoi l'auteur n'est pas sorti indemne de son oeuvre.
Un livre à lire, particulièrement si l'on est intéressé par la criminologie.
Très original
Critique de Rafiki (Paris, Inscrit le 29 novembre 2011, 33 ans) - 19 février 2012
Deux choses sont particulièrement intéressantes dans cet ouvrage et largement corrélées: la forme étonnante que prend le roman et la simplicité de l'intrigue. En effet Capote réalise un tour de force en écrivant ici un livre policier sans suspense, les criminels étant suivis au même titre que les policiers tout au long du roman, on connait ainsi le moindre de leur faits et gestes, aidé par la minutie réaliste de Capote.
Mais c'est justement là que se trouve son génie: brisant les codes du policier de base qui se veut complexe, bourré de rebondissement et de personnages hauts en couleur, Capote bouleverse de la meilleure des manières avec sa simplicité désarmante, se concentrant sur une analyse plus psychanalytique que factuelle.
Au delà du simple roman policier, Capote à l'aide de ses nombreuses recherches étudie une des facettes les plus oubliée, à savoir l'âme d'un meurtrier. Ici toutes les pensées des tueurs sont décryptées, leurs histoires respectives sont abordées pour mieux comprendre le pourquoi d'un tel geste. A ce sujet je trouve que Capote a une analyse relativement pessimiste. En effet à travers toutes les informations que l'on détient sur les meurtriers et sur ceux croisés à la fin du roman Capote ne donne aucun portrait type de l'assassin: chacun a agi selon une pulsion soudaine et ne peut se l'expliquer avec du recul.
Avec cette approche Capote nous indique ainsi que l'homme en lui-même est un pur prédateur, aucune explication n'a à être donnée pour expliquer les actes d'un meurtrier: les réponses sont dans l'essence humaine.
Ce pessimisme rendu également par la linéarité de l'action, la banalité de certaines scènes et l'inhumanité affichée des criminels donnent pour moi au roman une aspect radicalement fataliste, voire absurde.
Un peu comme dans No Country For Old Men, les hommes "justes" sont bien plus témoins passifs de l'intrigue et du déroulement de l'enquête que réels moteurs dans l'avancée des investigations, donnant une désagréable sensation d'inutilité au bien, tandis que le mal prospère et à aucun moment n'est mis en échec. Témoin de cette inexorable avancée d'un monde où l'absurde est roi, l'éternel arrivage de meurtrier en attente d'exécution: notre société se contente d'éradiquer les effets sans se préoccuper des causes, trouvant à la peine de mort des vertus bien maigres quand on l'observe depuis le roman.
Une référence du livre policier donc,mais aussi une leçon d'écriture pendant l'intégralité des 500 pages que contient le livre.
Chercher à comprendre l'insoutenable
Critique de John (, Inscrit le 2 novembre 2010, 34 ans) - 2 janvier 2012
On est dedans du début jusqu’au dénouement final avec tout le temps de Truman Capote qui nous livre ici un "docu-fiction" remarquable sur finalement "un fait divers comme il y a eu d'autres à la même époque"
Excellent en tout cas, à lire !
Sans passer par la case "chance"...
Critique de Monde Vrai (Long Beach, Inscrit le 6 décembre 2011, - ans) - 7 décembre 2011
C'est sans doute pourquoi, peut-être en réponse à toutes ces questions que n'importe qui se pose un jour, que Truman Capote, ce grand écrivain new-yorkais aux nombreux succès et éthymologies, s'est intéressé au cas de Perry et Dick, deux condamnés à mort et coupables de quelques meurtres. Et puis il faut bien reconnaître que ces deux-là ne disposaient pas du rude manteau du vulgaire pour recevoir les coups du destin; Perry, bien que brun et de petite taille, n'était pas insensible et inintelligent, tout en vivant en un monde fantaisiste, tout comme Dick, beau mais un peu simple. Enfin, abandonnés, pratiquement répudiés par la plupart; et encore plus par une famille qu'ils embarassent avant tout, il est évident que la tournure dramatique que prend leur destin ne peut que nous interpeller, tout comme en somme celui des Clutter, paisible, religieuse et riche famille du Middle-West dont le salon était par ailleurs encore décoré d'un sapin de Noel. Ce coup raté, cet aspect tragique, que ne font au total qu'augmenter un peu plus les réflexions philosophiques de Perry et la colère et l'ignorance, avec la fourberie de certains qui ne font qu'en définitive que mettre de l'huile sur le feu. On est vraiment émus par cette histoire, et si les larmes ne coulent peut-être pas à chacune des lectures, il faut bien noter que ce roman à faits vrais [un des premiers du genre] est tout à fait différent que "Petit déjeuner chez Tiffany", et ne contient pas à l'intérieur autant de glamour ou de ce sucré que Gore Vidal reprochait entre autre aux oeuvres du célèbre chroniqueur. Un palpitant, violent sans doute; mais émouvant récit.
Un livre novateur
Critique de Chene (Tours, Inscrit le 8 juillet 2009, 54 ans) - 3 mai 2011
Le livre est aussi une interrogation sur les buts et les effets de la peine capitale. Ce point me semble aussi novateur pour l’époque. Je reproduis ici un des passages remarquables qui interroge sur la peine de mort :
« la peine capitale, c’est un reliquat de la barbarie humaine. La loi nous dit qu’il est mal de tuer et elle vient donner l’exemple contraire. Ce qui est presque aussi atroce que le crime qu’elle punit. L’Etat n’a aucun droit de l’infliger. C’est sans aucune efficacité. Ça n’arrête pas le crime mais diminue le prix de la vie humaine et engendre d’autres meurtres ».
Truman Capote – De Sang froid
Triste affaire...
Critique de Sundernono (Nice, Inscrit le 21 février 2011, 41 ans) - 9 mars 2011
Le récit de la tuerie de la famille Clutter fait vraiment froid dans le dos.
La structuration du livre est particulièrement bien réalisée avec les alternances du récit sur la vie de la famille clutter, l'histoire des futurs meurtriers, les meurtres, la cavale...
L'aspect analytique et psychologique des protagonistes est riche et fascinant, Capote essayant de porter un regard plus humain sur ces meurtriers, ces 2 types vraiment "paumés".
Le style de Truman Capote est toujours aussi fluide, il n'y a pas un seul mot de superflux, c'est agréable à lire.
Pour moi Truman Capote est un grand auteur, un auteur majeur de la seconde moitié du XX siècle, ayant lu tous les ouvrages de cet auteur, je considère "De Sang Froid" comme l'aboutissement de son oeuvre (même si j'ai préféré le "Petit déjeuner chez Tiffany" qui est si beau).
4 étoiles pour ce grand roman,je suis sévère quand même.
Froid dans le dos !
Critique de Lejak (Metz, Inscrit le 24 septembre 2007, 50 ans) - 27 février 2011
Les 2 lascars sont assez pitoyables en un sens. Ils ont ont loupé leur vie, leur famille ne les aura pas aidé en cela, et on peut comprendre qu'ils aient fini - presque irrémédiablement - en prison. Pour leur plus grand malheur, ainsi que pour celui des Clutter, Perry et Hickock vont se rencontrer.
Ce tragique fait divers naît de cette rencontre. Si un seul a appuyé sur la gâchette, celui-ci ne l'aurait pas fait sans l'autre.
Néanmoins, je suis un peu resté sur ma faim. Cela vient-il que nos 2 tueurs manquent de relief, que les victimes sont trop innocentes ?
Je dis ça, car à force de lire des romans policiers, on finit par trop attendre des tueurs en série d'une part, et des victimes à faux-semblant de l'autre.
Même si l'ouvrage mérite les honneurs pour le travail qu'il a nécessité, je rejoins Sekhorium dans la conclusion de sa critique : le livre manque de relief, de suspense, de tempo. Peut-être est-il tout simplement victime de la "banalité" de cet homicide ? ou bien le traitement journalistique du sujet tue le côté romanesque que - personnellement - j'en attendais ?
Récit d'un quadruple meurtre et de ses conséquences.
Critique de Killeur.extreme (Genève, Inscrit le 17 février 2003, 43 ans) - 7 décembre 2010
C'est difficile de définir le livre de Truman Capote, un roman ? Non ! : l'écrivain construit son histoire sur les faits et les témoignages, un romancier même fidèle à 100% aux faits les raconte à sa manière et met en scène les faits tel qu'il les a perçus et les personnages tels qu'il les voit lui (Chessex "un juif pour l'exemple", Teulé "Mangez-le si vous voulez". C'est vrai que ça se lit comme un roman car il y a quand même une mise en scène des faits, le récit n'est pas linéaire.
Le livre est divisé en quatre parties, la première qui parle principalement des victimes, la deuxième qui alterne les passages entre l'enquête des autorités et les tribulations des meurtriers, la troisième alterne entre la résolution de l'enquête et l'échec de la fuite des meurtriers, la quatrième partie suit le procès et l'exécution des meurtriers, en passant par leur efforts pour retarder l'exécution en invoquant des erreurs de procédures.
Ce qui rend le récit unique c'est également que l'auteur prend le temps d'étudier tous les protagonistes et leur environnement (familial, social) et on assiste en détail aux conséquences du crime sur l'entourage des victimes, sur cette petite ville tranquille qui ne l'est plus, il faudra l'exécution des coupables pour que les habitants arrivent à se reconstruire.
Un très bon livre.
A lire !
Critique de Gnome (Paris, Inscrit le 4 décembre 2010, 53 ans) - 5 décembre 2010
Le plus grand texte du genre
Critique de Yeaker (Blace (69), Inscrit le 10 mars 2010, 51 ans) - 30 septembre 2010
J'ai lu dans les critiques qui m'ont précédé l'interrogation du choix de cette affaire. Au delà de l'affaire, ce sont les sources auxquelles Capote a pu avoir accès qui font la différence.
Quand Capote se lance dans la rédaction de ce docu-fiction il sait tout des antécédents des criminels, il sait tout de leurs motivations et du déroulement de la cavale. Captivant.
Innovant et captivant!
Critique de Faber42 (, Inscrit le 12 février 2009, 37 ans) - 13 février 2009
En effet c'est une vraie réussite car Truman Capote nous livre son recueil de témoignages tout en nous faisant pénétrer l'univers et l'intimité des personnages gravitant autour de ce fait divers, nous faisant presque oublier qu'ils ont réellement existé.
Ainsi, l'immersion est totale. L'auteur nous fait tout d'abord partager l'intimité des victimes, les Clutter, d'honnêtes propriétaires terriens de Garden City au Kansas. Il nous dévoile la vie, les aspirations, les secrets des membres de cette famille paisible et nous la rend familière. Mais attention l'atmosphère est loin d'être rassurante car simultanément il nous montre la voiture de Dick et Perry, les futurs meurtriers, qui approche nous faisant craindre le pire. Cet exemple montre bien que De sang froid est plus qu'un rapport objectif des faits,Truman Capote a su créer une tension dramatique, un suspense et un sentiment de malaise propres au roman. La rencontre entre la riche famille Clutter et les deux ex-taulards sans le sou s'annonce tragique.
De plus l'auteur alterne sans cesse les points de vue ce qui donne à ce livre un aspect très vivant. On passe facilement du point de vue méfiant des habitants de Garden City avec son atmosphère pesante, à l'insouciance des deux assassins lancés dans une cavale folle à travers les Etats Unis et le Mexique. Et paradoxalement les moments passés avec les meurtriers sont souvent légers. Tout d'abord parce qu'ils vivent de vagabondages, au jour le jour, mais aussi parce que l'auteur a su nous montrer leur humanité, notamment à travers Perry et ses rêves de voyages et de chasses aux trésors.
Néanmoins dans ce roman tout bascule très vite et on assiste également à des situations qui font froid dans le dos, ce qui révèle d'ailleurs la dualité des deux meurtriers capables du meilleur comme du pire. Le lecteur, témoin impuissant de leurs méfaits, peut se sentir mal à l'aise car il est placé au plus près des deux criminels, ce qui crée une complicité perverse.
Ce livre est également une véritable exploration de l'âme humaine et de sa complexité et nous permet de mieux comprendre le geste fou de ces deux êtres déchus que sont Dick et Perry (quatre morts pour quarante dollars!) ainsi que leur relation ambigüe. En effet alors que tout semble les opposer ils survivent ensemble et tombent ensemble.
De plus, ce roman peut donner à réfléchir sur la responsabilité, le traitement des fous et la peine de mort.
Enfin, autre point remarquable, Truman Capote ne tombe jamais dans le propos manichéen ni dans la critique ouverte. On sent sa présence, son regard distancier mais ceci reste discret. En effet, il a su se mettre en retrait pour laisser la parole aux protagonistes de ce quadruple meurtre et immerger son lecteur.
Construit comme un grand roman policier ou la vérité vraie n'est connue qu'à la fin De sang froid vous tiendra en haleine. A lire absolument!
Se dévore
Critique de Pandorette (Bruxelles, Inscrite le 26 mars 2007, 47 ans) - 21 juillet 2008
Chronique d'un meurtre non ordinaire (?)
Critique de Benoit (Rouen, Inscrit le 10 mai 2004, 43 ans) - 14 février 2008
On se rend compte rapidement que ce cas n’est pas isolé. D’autres massacres ont lieu dans le pays au même moment (ironiquement, une famille est massacrée dans une ville où viennent juste de passer les meurtriers en fuite (ils n’y sont pour rien)), ce qui fait dire à un des personnages que la mort des Clutter, aussi horrible soit-elle, est vite effacée dans les mémoires par un autre cas similaire…
Pour illustrer la banalité de ce crime, l’auteur nous raconte (à côté de son récit principal) l’histoire de deux jeunes hommes (en attente dans le couloir de la mort) qui se sont embarqués dans un voyage sanglant pour la simple raison qu’ils détestaient le monde ! Un autre a tué sa petite amie parce qu’il avait prévu depuis longtemps de tuer quelqu’un !
Mais revenons aux Clutter. Truman Capote a diaboliquement échafaudé son récit pour le rendre haletant. Nous ne rentrons pas de plain-pied dans le crime au centre du roman. Il nous présente tout d’abord la famille Clutter (le père est bon fermier, bon père de famille, la fille est la coqueluche du village, ce sont de bons chrétiens,… bref, des paroissiens exquis). Puis vient le tour des meurtriers dont il nous conte l’histoire et les particularités (on se rend compte là qu’ils ont eu une enfance plutôt banale, difficile certes mais pas extraordinaire). Enfin, les corps sont découverts et l’enquête policière commence. Mais ce n’est qu’à plus de la moitié de l’ouvrage que le massacre nous est conté. Jusque-là, nous avions toutes les pièces du puzzle mais nous ne savions qu’en faire. Grâce au récit, tout s’emboîte (presque) parfaitement. La construction du roman est parfaite.
Concernant le meurtre, ce qui le rend glaçant est qu’on s’aperçoit que le passage à l’acte n’était pas automatique. Certes, les criminels avaient des prédispositions (à cause de leur histoire familiale et personnelle) mais rien n’était inévitable. Il n’y a rien de vraiment logique là-dedans.
Et ce qui était vrai en 1959 est, je pense, toujours vrai aujourd’hui.
autopsie d'un quadruple meurtre
Critique de Sentinelle (Bruxelles, Inscrite le 6 juillet 2007, 54 ans) - 29 décembre 2007
Truman Capote s'empare de ce fait divers tragique pour remonter à la source de cette sauvagerie. Quel est le mobile du crime ? A peine quarante dollars ont été volés. S'agit-il plutôt d'un règlement de compte ? Qui sont les assassins ? Des voisins jaloux ? Qu'est-ce qu'un criminel ? Un malade mental ? Quelqu'un au-delà du bien et du mal ? Responsable ou non de ses actes ? Ce criminel mérite-t-il la même sentence que celle qu'il a infligée à ses victimes, à savoir la mort ?
Pendant que les habitants du coin s'enferment à double tour dans leur maison et restent éveillés toute la nuit tant que les tueurs n'ont pas été démasqués, Truman passe des mois dans le Midwest à interroger les témoins, les policiers ainsi que les tueurs dès que ceux-ci ont été identifiés et capturés par les enquêteurs.
Au-delà de l'enquête, Truman décrit également l'Amérique profonde qui ne reconnaît pas ceux qu'elle a engendrés malgré elle.
Loin de tout manichéisme, ce classique de la littérature valut la gloire à l'auteur mais le conduisit également à la dépression, ému et marqué à jamais par sa rencontre avec Perry Smith, l'un des deux assassins.
Extraits :
[Perry]
Mon ami Willie-Jay en parlait souvent. Il disait que tous les crimes ne sont que des "variétés de vol". Le meurtre aussi. Quand on tue un homme, on lui vole sa vie.
(…)Tu vois, Don, je les ai vraiment tués.
(…)Et les Clutter n'y étaient pour rien. Ils ne m'ont jamais fait de mal. Comme les autres. Comme les autres m'en ont fait toute ma vie. Peut-être simplement que les Clutter étaient ceux qui devaient payer pour les autres.
(…) Est-ce que j'ai des regrets ? Si c'est ce que tu veux dire, non. Je ne ressens rien. Je voudrais bien. Mais ça me laisse complètement froid. Une demi-heure après que ce soit arrivé, Dick blaguait, et moi, je riais. Peut-être qu'on est pas humains. J'suis assez humain pour m'apitoyer sur moi-même. Je regrette de ne pas pouvoir sortir d'ici quand tu t'en iras. Mais c'est tout.
[Hickock, le deuxième assassin, juste avant d'être pendu]
Je veux simplement vous dire que je ne tiens rancune à personne. Vous m'envoyer dans un monde meilleur que celui-ci ne l'a jamais été.
Reconstitution d'homicides un tant soit peu monocorde
Critique de Sekhorium (Braine-le-Comte, Inscrit le 28 août 2007, 38 ans) - 4 septembre 2007
Tout débuta le 16 novembre 1959 où Truman Capote découvrit dans le New-York Times un fait divers l'interpellant : quadruple meurtre dans une ferme perdue au milieu du Kansas. Il n'en fallut pas plus pour déclencher chez l'écrivain la motivation qui l'amènera au plus haut de sa gloire. En effet à partir de ce moment, et ce pendant quatre longues années, Capote mettre tout en oeuvre afin de reconstituer le meurtre : voyages sur les lieux du crime et des environs, recueil de témoignages auprès des familles (autant auprès des victimes que des assassins), consultations des fichiers de la police et même relations personnelles avec les assassins emprisonnés. Bref, un travail de moine copiste autour d'une famille américaine banale abattue par deux jeunes personnes.
Toute cette mine d'or d'information lui permettra d'écrire ce roman on ne peut plus « visuel ». Chaque ville, chaque maison, chaque endroit est détaillé de façon recherchée mais tout en restant poétique, avec un style coulant et surtout non rébarbatif. Quand Truman Capote décrit un endroit, c'est comme si on y était. Le lecteur est réellement inclus dans l'action, il n'a plus qu'à se poser et à contempler l'action décrite par l'auteur anglais. Il s'agit là d'une force majeure du roman : on sent le Kansas, on sent les odeurs de la ferme, on est ébloui par le soleil de l'aube... et on est fortement touché par les personnages. Traités de la même façon que les décors, les différents acteurs du roman sont de même très approfondis. Au fur et à mesure de l'histoire, on apprend petit à petit à cerner les différents actants. Chaque intervenant est comme un puzzle; tout en fournissant au compte-goutte les différentes pièces, Capote nous fait croire que chaque personnage n'est qu'un cinq pièces alors qu'il en compte, au final, aisément cent. On se plaît aussi à voir évoluer en nous nos ressentiments face aux acteurs du livre. L'exemple le plus frappant se situe au niveau des deux tueurs, Smith et Hickcok. Les sensations vis-à-vis des deux compères évoluent dans tout un panel de sensations : on les hait, on les méprise, on doute d'eux, on comprend leur vécu, on re-doute, on prend pitié, on commence à les apprécier malgré leurs actes d'homicides. A ce point de vue là, on peut dire que l'ouvrage est très évolutif.
Mais, personnellement, je ne ferai pas que des éloges sur cet ouvrage. Le roman est, à mon avis, trop linéaire, trop plat et sans réel rebondissement. On pourrait le considérer comme un compte-rendu, certes magnifiquement écrit avec chaque mot pesé et soupesé, mais où rien n'éclate. Comme une chanson où le rythme serait sans cesse le même, un chemin soigné mais où aucune ronce ne viendrait à pousser. Pas de tournant, ni de pente, ni de descente : on démarre à la case départ et très loin on aperçoit déjà l'arrivée. Selon moi, le suspens fait malheureusement trop défaut. On aurait aimé l'un ou l'autre inconvénient, des embûches imprévues auraient été bien accueillies.
Atmosphère oppressante
Critique de Janiejones (Montmagny, Inscrite le 20 avril 2006, 39 ans) - 9 mai 2007
Trempé dans l'encre froide
Critique de Numanuma (Tours, Inscrit le 21 mars 2005, 51 ans) - 24 février 2007
Les deux romans sont impossibles à rapprocher sur la forme comme sur le fond tant leurs auteurs sont différents mais ils ont en commun un regard fasciné sur la tragédie humaine, sur le tour absurde que peut prendre la destinée d’un individu. L’impossibilité totale de comprendre un acte, de se mettre dans l’esprit de l’autre a conduit ces deux auteurs majeurs de la littérature à se jeter à corps perdu dans la création afin de reprendre les choses en main, de dérouler à nouveau le fil de la vie en la recréant sous la plume.
En 1959, le 16 novembre, Capote note un article du New-York Times relatant le massacre de la famille Clutter au Kansas, les parents et deux de leurs enfants. Le 30 décembre, les deux meurtriers sont arrêtés.
L’auteur travaillera de 1959 à 1965 sur son livre (qui sortira en volume en 1966), luttant sans relâche à lui donner cet aspect incroyablement dérangeant, créant par la même occasion le concept de roman non-roman. Le roman est une fiction narrative de faits concrets (Dictionnaire du littéraire, PUF, 2007) et c’est bien de cela qu’il s’agit ici. Difficile de faire plus concret que la mort, l’universelle fatalité humaine.
Ce qui surprend, choque même, à la lecture (difficile) du texte de Capote, c’est la distance qu’il existe entre l’auteur et son sujet alors que son œuvre a été l’obsession de son existence pendant plusieurs années. On sait que Capote a vu très souvent les assassins, qu’il a entretenu avec eux une correspondance abondante, qu’il a effectué un travail préparatoire hallucinant de méthodologie, recoupant tout, se forçant à recréer la trame des événements, à les agencer de manière mathématique, logique, argumentée par les dizaines de témoignages recueillis.
Froide. La plume de Capote est trempée dans l’encre froide. Aucune empathie, aucune sympathie, juste des fais bruts génialement mis en forme. Certes, il s’agit d’une histoire, de fait réels et concrets et pourtant, impossible d’y voir juste un roman. Et il ne s’agit pas non plus simplement d’un récit… C’est littéralement inclassable, un cauchemar de classificateur, un monument de recul de l’auteur face à son œuvre.
C’est cela probablement qui offrit un tel succès à Capote. Il accorde le même traitement aux victimes qu’aux coupables. On peut y voir une catharsis, un résumé de l’absurdité de la vie humaine ou une immense douleur littéraire tant le texte fait mal. D’autant plus que le meurtre n’a d’autre but que le vol. Mais là n’est pas l’essentiel ; le déroulement des faits n’est là que comme une piste d’envol et la pendaison qui attend les deux coupables n’est qu’une conséquence comme une autre.
Ici, Capote a fait de l’horreur et de l’absurde un sujet d’étude clinique, une analyse froide et distanciée où tout est pesé pour ne jamais prendre parti. Plus qu’un roman ou un non-roman, c’est d’un tour de force littéraire dont il est question, un acte parfait et insurpassable. Totalement vain ?
Examen clinique
Critique de Heyrike (Eure, Inscrit le 19 septembre 2002, 57 ans) - 30 octobre 2006
S'ensuit la description de l'état d'esprit des habitants de Holcomb abasourdis par la nouvelle du drame. Entre peur et suspicion, tous comprennent que leur monde vient de s'écrouler, que plus rien ne sera pareil dans leur existence jusqu'à lors si douce et si paisible.
La dernière partie du récit retrace le parcours de Dick et Perry. Deux jeunes hommes qui aspirent à trouver une issue favorable à une existence sans relief. Dick est un individu plein de ressource, toujours à réfléchir à un coup facile qui lui permettrait de s'affranchir de ses minables arnaques aux chèques sans provision. Aussi, lorsqu'il rencontre Perry, qui s'enorgueillit d'avoir déjà tué un homme, Dick entrevoit la possibilité de monter un coup formidable en se servant de Perry pour appuyer sur la gâchette le moment venu.
Perry est un individu instruit à la personnalité très complexe. Malmené par ses parents durant sa jeunesse et affublé d'un physique ingrat, il rêve d'en découdre avec la société, à laquelle il reproche de ne pas lui avoir laissé toutes ses chances.
Ces deux personnages, aux caractères si différents, au point que cela vire parfois à l'antagonisme, sombrent dans une logique destructrice, qui trouve son aboutissement dans le massacre de la famille Clutter.
Jamais l'auteur n'esquisse la moindre tentative d'explication des faits. Il ne condamne pas et ne justifie rien. Il se borne à raconter cet événement en optant pour la même distance qu'observe le médecin légiste lors d'une autopsie. Peut-être pour ne pas avoir à en souffrir lui-même ou par peur de se découvrir des points de convergence avec les assassins qui le renverraient à ses propres démons.
Des questions, plus que des réponses
Critique de Saint-Germain-des-Prés (Liernu, Inscrite le 1 avril 2001, 56 ans) - 23 octobre 2006
Dick et Perry arrêtés, ils sont condamnés à mort. On ne rigole pas au Kansas. La vermine, on la pend haut et court. Si c’est là tout ce que l’homme a trouvé comme réponse, c’est-à-dire reproduire ce que la loi-même interdit, quel est le sens de son éthique ?
Truman Capote fait œuvre de journaliste, de romancier, d’empêcheur de tourner en rond. Son récit à la fois froid, objectif et gorgé de suspense, oscille entre enquête policière, enquête de société, reportage, analyse psychologique et je l’ai dit, questionnement éthique. Le livre est prenant car toujours sur le fil de la lame, déclinant l’horreur sans jamais tomber dans le pathos. L’auteur décrit les allées et venues des meurtriers pendant leur cavale, laissant apparaître leur espèce d’insouciance, leur non-conscience.
Dérangeant au possible…
Glacial, mais à dévorer
Critique de BONNEAU Brice (Paris, Inscrit le 21 mars 2006, 40 ans) - 19 septembre 2006
Perry Smith et Richard Hickock sont arrêtés pour meurtre, sont jugés puis finalement pendus. Ce livre est le “récit véridique d’unemeurtre multiple et de ses conséquences”. Truman Capote, en écrivant ce livre autour de ce fait réel a crée un genre : la non-fiction novel. Car rien n’est inventé, et vous êtes plongé dans un “Envoyé Spécial” d’une froideur impressionnante.
Car c’est là toute la force de ce bouquin, jamais on ne voit Capote, jamais on ne l’entend, jamais il ne s’exprime. Il ne fait que romancer le meurtre, les interrogatoires, les procès, la pendaison. Et c’est ça, qui est puissant. On se retrouve en immersion complète, spectateurs impuissants de toute l’histoire, au coeur de tout, aux côtés des deux meurtriers, de leur crime, le tout mené dans une rigueur, une froideur et un suspens comme on n’en lit pas assez souvent.
Parce que c’est une oeuvre à lire, et un style à part, je vous le conseille.
Docu-fiction
Critique de Muchado (Paris, Inscrite le 21 avril 2006, 43 ans) - 6 septembre 2006
Tout s'éclaire : la psychologie des personnages, le pourquoi du comment (s'il y en a un). C'est la malheureuse histoire de deux monstres, qui sont, malgré tout, de "pauvres mecs" qui n'avaient rien pour eux et qui ont "déconné" un jour.
A partir d'un moment, on ne sait plus ce qui est vrai et ce qui ne l'est pas. Capote n'a-t-il vraiment rien inventé du tout ?
Pourquoi s'est-il entiché de cette histoire, malheureusement assez "banale" ?
Cela restera un mystère pour moi, même si j'ai apprécié la lecture de son "docu-fiction", comme on dirait aujourd'hui.
Un grand récit de journaliste
Critique de Richard (, Inscrit le 30 janvier 2004, 78 ans) - 4 juillet 2006
L’opération tourne à la boucherie le père et mère, la fille Nancy et le fils sont tués.
Adepte du « roman non roman » c'est-à-dire d’un récit construit sur des faits réels avec pour forme celle du roman, Truman Capote, écrivain et mondain a obtenu avec de « Sang Froid » un immense succès. Récemment l’excellent film « Truman Capote » réalisé par ….nous fait vivre l’épisode de la vie de Capote qui couvre la préparation et la rédaction de l’ouvrage et en particulier des relations qu’il eut avec les Perry et Dick.
Le travail de Capote se situe à mi chemin entre l’activité du romancier et celui du journaliste. Du romancier pour la qualité de l’écriture, la limpidité du récit, du journaliste pour le travail d’investigation. Pendant des mois des années l’auteur a suivi pas à pas les protagonistes du drame à essayer de retracer leur passé, les moments de la tragédie elle-même et les heures, les jours les mois qui ont suivi. Il y a dans « sang froid » un souci rare de compréhension qui s’exprime non pas par une tentative d’analyse mais simplement par la présentation la plus précise possible de ce qui a été.
Capote immense journaliste est l’antithèse du journaliste moderne, il ne décrit pas un évènement sur de simples indications ou allégations, il ne se lance pas dans des analyses plus ou moins fumeuses sur le pourquoi du comment. Il présente longuement ce qu’il a vu, revu, entendu, réentendu, point par point, ligne par ligne. Et laisse au lecteur la responsabilité du jugement.
De la complexité humaine
Critique de Cecil (, Inscrite le 26 janvier 2006, 45 ans) - 18 mai 2006
J'ai été emportée par une multitude de sentiments contradictoires: horreur, haine, colère mais aussi compassion, pitié... Truman Capote parvient à faire sentir à ses lecteurs toute la difficulté qu'il y a juger un homme quel que soit le forfait qu'il ait commis, plus encore quand ce jugement doit conduire à la mort. C'est une remarquable réflexion sur la responsabilité, la liberté de l'homme.
Cette écriture très précise, volontairement objective contraste fortement avec la façon dont Truman Capote a vécu cette enquête qui a fini par le détruire.
Oui, un regard humain...
Critique de Bluewitch (Charleroi, Inscrite le 20 février 2001, 45 ans) - 6 mai 2006
On voit cette famille s’épanouir et le malaise grandit, on sent approcher l’instant, la cruauté suprême, la tragédie finale. On suit la route des deux tueurs, qui se rapproche inexorablement du bonheur fragile des Clutter. On sait qu’on ne peut rien éviter, on se laisse entraîner, traîner vers le drame. Et c’est le contact, fulgurant. Quatre morts sanglantes et déchirantes.
Après la mort des Clutter, encore groggy lecteur que l’on est, c’est l’enquête que l’on suit, d’un côté, la cavale des deux hommes de l’autre. Les déroutes populaires, l’ahurissement face à cette cruauté gratuite et stérile, les peurs, les colères, les désespoirs. Et puis ces deux hommes, ces deux humains, fous de leurs rêves irréalisables, dépassés par une existence faite de mauvais coups, de mauvais sorts, de mauvais amours, de mauvaises haines. Ils se perdent.
Ce livre a cette puissance terrible que dégage la fascination de l’auteur pour son sujet. On sent cette volonté de distanciation qu’il s’impose sans jamais pouvoir s’y résoudre. On s’attache et se lamente pour le bonheur détruit d’innocents, on s’expose au dégoût inspiré par les auteurs du crime pour finalement découvrir en eux deux pauvres âmes qui, dans leur cruauté, restent, au fond, des personnes, avec leurs souffrances et leurs inévitables et grandissants échecs. Et la pitié s’infiltre à notre insu.
Sans être un plaidoyer contre la peine de mort, on sent à quel point il n’est pas évident pour tous de se résoudre à donner cette mort que justement, on condamne d’avoir donné. L’indifférence ici n’est pas de mise. Après leur arrestation, leur procès et leur incarcération dans « l’Allée de la Mort », on suit les criminels, ces « petites crapules » jusqu’au bout. On sait aussi que leur fin est imminente, et on sent que l’auteur du livre ne l’espère pas. Qu’il les fait exister, minute après minute, ligne après ligne, qui leur donne de plus en plus de place, plus qu’aux victimes, même. Et pourtant, jamais ne verse dans l’interprétation ni le jugement…
Au final, le ton de ce récit non fictionnel perd de son côté journalistique, tout en gardant réserve et pudeur.
Et toujours, cette ironie cruelle :
"Duntz demande à Smith : « Tout compris, combien d’argent avez-vous trouvé chez les Clutter ?
- Entre quarante et cinquante dollars. »"
« De sang-froid » est un livre extrêmement bien construit, écrit. Douleur, bouleversement, écoeurement, déroute… Mais cela, faut-il le préciser ?
Un classique moderne
Critique de Béatrice (Paris, Inscrite le 7 décembre 2002, - ans) - 21 août 2004
C'est émouvant: le portrait de Perry, la radiographie des bas-fonds et le plaidoyer implicite contre la peine de mort.
Comme je connaissais d'avance les grandes lignes, je m'attendais à l'absence de suspens. Mais la tension est présente - l'auteur sait raconter, il y a le rythme, l'effet de contraste, l'alternance des points de vue des différents témoins. Chaque détail est à sa place. Ni violence gratuite, ni voyeurisme.
Interrogé sur les 6 ans consacrés à la rédaction de ce bouquin, Truman Capote a dit : « L’expérience a servi à rehausser le sentiment que j’ai du tragique de la vie ».
Ce bouquin lui a apporté également la fortune et le succès critique.
Plus obsédant que glaçant !
Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 11 mars 2004
Ce livre est vraiment très bien balancé ! D'abord faire connaissance avec les futures victimes et les futurs assassins. Les premiers sont vraiments très attachants, même si le père Clutter est enfermé dans sa religion comme savent l'être énormément d'Américains du Midwest.
Les seconds ne sont pas sans intérêt non plus, tant ils sont différents. Il est très vite visible que Dick est fuyant, vicieux, changeant et peu fiable. Perry semble plus conscient, lucide. On se demande, comme lui d'ailleurs, ce qu'il fait dans cette affaire... On pourrait d'ailleurs dire que tout le drame va naître de l'inconsciende de Dick qui, pour un simple caprice, se refusera à acheter les bas noirs qui auraient pû les rendre tout à fait non-identifiables. Ils n'auraient pas été obligé de tuer !
Mais on ne comprend pas: quel est le mobile qui pousse ces deux jeunes ?
Les meutres sont découverts et nous voilà plongés dans les débuts de l'enquête ainsi que dans les opinions des habitants de cette petite bourgade. Eux qui avaient toujours vécu en ne fermant pas leurs portes, les voilà presque à se méfier les uns des autres. Certains iront même jusqu'à se dire qu'il vaudrait mieux ne pas trouver les coupables car cela bouleverserait à nouveau le bourg. D'autres, surtout les femmes, plus pragmatiques, disent que cela n'apporterait rien de les trouver, que cela ne ramènerait pas les victimes. Qu'on arrête donc d'en parler !
Quant à l'enquêteur du Kansas Bureaux of Investigation, l'inspecteur Dewey, il devient tout à fait obsédé par cette affaire. Pas l'ombre d'un indice, rien qui ne permet d'identifier les assassins !...
Et ceux-ci de voyager à travers les Etats-Unis et même le Mexique. Pas de soucis à envisager de tuer un brave type qui les prendrait en stop pour autant qu'il aurait quelques dollars sur lui...
Ils en deviennent fascinants ces deux assassins, tant ils sont différents et sans scrupules, mais aussi pleins de contrariétés ! Des éclairs d'humanité peuvent les traverser comme ils peuvent aussi disjoncter pour un rien.
Il faudra attendre leurs captures pour connaître les mobiles des meurtres, ainsi que la façon dont ils ont été commis.
Et tout s'enchaînera... Certains passages sont un peu long et cette ambiance lourde et malsaine finit, je trouve, par user un peu le lecteur vers la fin.
Mais c'est un très grand livre et il vaut vraiment la peine d'être lu ! Un grand débat aussi sur l'utilité de la peine de mort.
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