Ransom
de Jay McInerney

critiqué par Pendragon, le 4 mars 2004
(Liernu - 54 ans)


La note:  étoiles
les dix dernières lignes...
Le Dernier des Savage était et est toujours un roman exceptionnel, une œuvre incroyable que les lecteurs férus de littérature américaine se doivent de lire. Glamour Attitude, paru deux ans plus tard, en 1998, est un peu trop « tendance », un peu trop marketing tapageur, répondant un peu trop à la demande du marché pour être réellement bon… sans être mauvais, entendons-nous.

Avec Ransom, nous retrouvons le McInerney du début, puisque c’est son premier roman, paru en 1985. Si je l’avais lu à l’époque, ou du moins avant les deux autres, j’aurais sans hésitation parlé d’une œuvre magnifique et d’un auteur en passe de devenir un maître. On sent toute la puissance qui doit encore éclore, qui doit encore mûrir, qui doit encore s’épanouir.

Le style est sans conteste excellent et le ton, évidemment gris (oui, je suis un grand fan des romans sombres, allant même jusqu’à oser dire que les roman gais ne « peuvent » pas être bons), convient à merveille à l’histoire qui défile sous nos yeux.

Ransom est un américain qui s’est expatrié au Japon où il donne des cours d’anglais pour se nourrir le corps et suit des cours de karaté pour se nourrir l’âme… Pour expier aussi ! Pour expier une faute qu’il a commise il y a quelques années et que nous allons découvrir à mesure qu’il se souvient. Oh, pas vraiment une faute, disons qu’il n’a pas été là alors qu’il aurait dû. Oui, mais Ransom est un chevalier des temps moderne, une âme pure qui se doit de protéger la veuve et l’orphelin, qui se doit de suivre une voie droite, la « voie du milieu », qui se doit de faire le Bien, partout, tout le temps… pour se pardonner.

Au Japon se trouvent toutes sortes d’individus, des réfugiées vietnamiennes tenues en laisse par la mafia, des américains au look de cow-boys qui s’attirent des ennuis et des « barjos » militaires qui rêvent de se mesurer au trop zen Ransom… et lui, dans tout cela tente de garder l’équilibre entre un père qui veut le ramener au bercail, un sensei plus que rigide et ses souvenirs qui le hantent jours et nuits…

Œuvre intimiste et profonde, sa lecture m’a certes touché à mesure que j’avançais, mais ce n’était rien en regard des dix dernières lignes qui m’ont surpris au-delà de toute mesure et qui aujourd’hui encore, près d’un mois plus tard, résonnent en écho perpétuel…
un roman pour FightingIntellectual? 6 étoiles

les amateurs d'arts martiaux et de littérature vont sûrement, comme moi, être attirés par ce roman dont l'ambiance rappelle un peu certains romans de Joseph Conrad (lord Jim en tout cas). La construction de l'intrigue est pour moi sans défaut : l'anti-héros avance pas à pas dans son pèlerinage immobile de pénitence, des cours d'anglais au dojo (ou faut-il dire salle de torture?), de son ami américain Miles à de Vito qui le poursuit avec son défi insensé, entre la figure éloignée de son père et son passé pakistanais.
Quant à la manière que choisit McInerney pour clore son récit, si on peut lui laisser que le fond rejoint admirablement la forme (tranchante), elle a aussi coupé net mon enthousiasme par sa prévisibilité.
Reste un roman agréable à lire, parfois drôle d'ailleurs, malgré un thème pesant. Puis, pour les budokas, ça nous évite un voyage au Japon, si tous les dojos abritent ce genre de cours... brrr...

Jeparo - Bruxelles - 59 ans - 3 mai 2004


Inabouti... 7 étoiles

Et voilà encore une critique délicate à rédiger… Car il y a de l’excellent dans ce livre, comme l’a si bien souligné Pendragon, dont je vous encourage à lire la critique pour un résumé que vous ne trouverez point ici… Des ingrédients se mélangent en une palette douce-amère, l’atmosphère s’épaissit et l’on sent clairement le drame approcher. Certes… Mais l’art n’est pas encore maîtrisé dans cette première œuvre qui m’a semblé inaboutie. Par exemple, beaucoup de séances d’entraînement de karaté sont décrites. On se dit que cela sera exploité à un moment ou à un autre, mais non.
Quant aux fameuses dix dernières lignes, elles ne m’ont pas surprise…
Peut-être tout ceci démontre-t-il qu’il existe une littérature pour femmes et une autre pour hommes…

Saint-Germain-des-Prés - Liernu - 56 ans - 30 mars 2004