Le jardin arc-en-ciel de Ito Ogawa

Le jardin arc-en-ciel de Ito Ogawa
(Nijiiro garden)

Catégorie(s) : Littérature => Asiatique

Critiqué par Débézed, le 31 août 2016 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 296ème position).
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Un jardin d'amour

Le mariage et la filiation homosexuels préoccupent les Japonais tout autant que les Occidentaux, dans ce roman, Ito Ogawa expose son point de vue sur ce sujet sans militantisme forcené mais avec une grande ouverture d’esprit, n’éludant aucun aspect de la question. A cette fin, elle constitue une famille atypique : une femme divorcée et son fils, une jeune fille qui ne sait pas encore qu’elle est enceinte, quatre personnes qui, tour à tour, racontent un morceau de la vie qu’elles essaient de construire ensemble.
Dans une gare de Tokyo, Izumi, mère de famille en cours de divorce, est attirée par une jolie jeune fille, encore lycéenne, qui semble en plein désarroi, elle craint qu’elle cherche à se jeter sous un train et accourt auprès d’elle pour l’en dissuader. Elle l’emmène chez elle pour la rassurer et la convaincre que la vie peut être encore belle pour elle aussi. Une relation sentimentale se noue rapidement entre les deux femmes qui, ne voulant pas d’une histoire d’amour intermittente, décident de vivre ensemble mais pour cela elles doivent quitter la ville car la famille de Chiyoko, la jeune fille, ne supporte pas cette union qu’elle juge préjudiciable à son image et sa notoriété.

Avec le fils d’Izumi, les deux femmes partent alors pour le pays des étoiles, un coin de campagne perdu au pied de la montagne où elles se réfugient dans un ancien atelier délabré qu’elles arrangent pour le mieux. Petit à petit elles construisent une vie, une vie familiale comme n’importe quelle autre famille japonaise. Izumi raconte la rencontre, la fuite, l’installation au Machu Pichu, le nom qu’elles ont donné à ce coin de campagne aussi difficile d’accès que la célèbre montagne andine. Chiyoko raconte, elle, la construction de la famille, le projet professionnel des deux femmes, la possibilité de former un vrai couple. Et les enfants à leur tour prennent la parole pour évoquer, à travers leur regard d’enfant, cette famille atypique, comment ils ont, eux, vécu cette différence et comment ils se projettent dans l’avenir.

A mon sens ce roman n’est pas un livre militant pour une cause quelconque, c’est juste un texte sur la tolérance et l’acceptation. L’auteure nous laisse penser que chacun doit s’accepter comme il est et que chacun doit accepter les autres comme ils sont. « Quoi qu’il arrive l’important c’est d’accepter et de pardonner ». Dans ce texte on rencontre aussi des personnes différentes non seulement par le sexe et les pratiques sexuelles qui sont plus ou moins bien acceptées par leur entourage et la société en général. Ito Ogawa propose une jolie parabole pour expliquer la différence et son acceptation : « Elles (les fleurs) ont beau trouver la teinte de la fleur voisine plus jolie, et l’envier, elles ne peuvent pas modifier à leur guise la couleur qui leur a été dévolue. Alors, il ne leur reste plus qu’à vivre cette couleur de toutes leurs forces ».

Ce roman est aussi un joli plaidoyer pour la vie familiale qui devrait être accessible à chacun quels que soient son sexe et ses mœurs, l’auteure conseille vivement à celles et ceux qui se sentent rejetés de construire une famille avec celles ou ceux qu’ils aiment. « Vous n’avez qu’à construire une famille à vos couleurs, en prenant votre temps. Parce que les liens du sang ne font pas tout. » Au Machu Pichu, « Une famille, ce n’était pas une question de sexe ou d’âge », c’était de l’amour, des disputes, de la douleur, de l’humiliation, des amis, la maladie et tout ce qui fait la vie de tout un chacun mais peut-être avec un peu plus de contraintes encore.

Au Japon, l’homosexualité semble être encore moins bien acceptée qu’en Occident, c’est du moins ce qui ressort de ce roman écrit avec beaucoup de finesse et de pudeur, les personnages sont disséquées avec délicatesse jusqu’au fond de leur âme. L’auteure ne prend qu’un parti celui de la tolérance, de l’ouverture d’esprit, de l’acceptation et du droit de chacun à disposer de son corps et du sens qu’il souhaite donner à son existence. La famille qu’elle a créée n’est peut-être pas très crédible mais elle rassemble en son sein toutes les questions qui ont été soulevées autour de l’union homosexuelle dans des scènes où la description des plus petits détails apporte un supplément de vie.

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une famille pas comme les autres

10 étoiles

Critique de Jfp (La Selle en Hermoy (Loiret), Inscrit le 21 juin 2009, 76 ans) - 5 septembre 2021

Un roman plein de poésie, qui fait du bien tant il est empreint d’amour de l’humanité, une humanité riche de sa diversité au-delà des conventions sociales et de la soi-disant bienséance. Chiyoko, une lycéenne en pleine crise existentielle, et Izumi, fraîchement séparée d’un mari avec lequel elle ne s’accordait guère sur le plan amoureux, vont se rencontrer et vivre un amour passionnel, au grand dam de leurs familles respectives. Le lieu qu’elles ont choisi pour y fonder leur foyer et élever leurs enfants, dans un coin reculé du nord du Japon, sur l’île d’Hokkaidô, va devenir un havre pour les couples de tous sexes (genres ?) souhaitant vivre pour un temps leur amour en toute tranquillité. Une famille pas comme les autres, où bonheur et tristesse se mêlent au gré des aléas de la vie, qui s’écoule comme un long fleuve, pas toujours aussi tranquille qu’on le souhaiterait, mais qui va son cours vaille que vaille…

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