Guide des égarés
de Jean d' Ormesson

critiqué par Hervé28, le 3 octobre 2016
(Chartres - 55 ans)


La note:  étoiles
"Guide des égarés", un guide d'espérance
Après avoir signé un épais roman quasi autobiographique remarquable "Je dirai malgré tout que cette vie fut belle " , notre infatigable académicien de 91 ans nous livre un court essai de 120 pages, avec un titre pour une fois non pas emprunté à Aragon, comme pour ses précédents romans, mais à Maimonide, philosophe et médecin juif né à Cordoue au temps de Philippe Auguste.
Décidément de Toulet à Aragon, en passant par Apollinaire , Jean d'Ormesson n'a cessé de rendre hommage à ses maîtres au travers du titre de ses ouvrages.
A travers 29 thèmes, Jean d'Ormesson nous offre sa vision de la vie, mais aussi de la mort : de l'air à la science, du plaisir à la joie, de la justice à l'amour, notre écrivain national dresse, au nom pas un essai philosophique (il le réfute à deux reprise dans cet essai) mais des réflexions d'un homme qui s'est longuement penché sur ces questions.
Nous sommes plus proches ici d'un de ses précédents ouvrages intitulé "comme un chant d'espérance" que de ses livres (pseudo) autobiographiques qu'il nous distille malicieusement avec parcimonie depuis quelques années.
Si le ton est plus grave, il n'en perd pas pour autant ses habituelles références , de l'inusable Vicomte de Chateaubriand à Woody Allen, en passant par Hitchcock (avec "Notorious", usé jusqu'à la corde dans l’œuvre de Jean d'Ormesson), qui font la patte de l'écrivain.
"Le guide des égarés" fait partie des livres qui, une fois lus, nous font penser que l'on a appris quelque chose de plus.
Le livre commence par "la disparition", "l'angoisse" mais s'achève tout de même sur "la vérité", "la beauté", "l'amour" et "Dieu", signe que, pour Jean d'Ormesson, la vie après tout,débouche sur l'espoir.Décidément , "l'écrivain de bonheur", comme on a surnommé Jean d'Ormesson, ne se refait pas.
Après pendant de longue années s'être passionné sur le temps (rappelez vous la définition du temps dans le livre XI des "confessions" de Saint Augustin, cité à l'envi par Jean d'Ormesson), notre académicien s'interroge sur le sens de la vie mais surtout sur Dieu, qui ,après Marie, non pas la mère du Christ, mais la sylphide qui traverse nombre de romans de Jean d'Ormesson, finit par obséder notre écrivain de 91 ans, qui prépare déjà un épais ouvrage de 500 pages chez Gallimard pour 2018.

Pour les pinailleurs, je voudrai signaler une erreur dans la liste des ouvrages de Jean d'Ormesson : "Dieu, les affaires et nous" n'est pas publié dans la collection bouquins. Il s'agit plutôt de "ces moments de bonheur, ces midis d'incendie" publié chez "bouquins" en août 2016 que je vous recommande pour deux raisons:
- une édition enrichie des deux ouvrages "odeurs du temps" et de "saveurs du temps"
- la présence , enfin, des discours de réception à l'académie Française, ou d'inauguration prononcés par Jean d'Ormesson, jusque là introuvables.
Le sens de la vie et ses éléments 8 étoiles

Dans ce Guide des égarés, Jean d'Ormesson reprend le même thème général que dans Comme un chant d'espérance, celui de l'apparition de la vie, de son explication physique et de sa méconnaissance de la mort et de ce qui se passe, ou non, après elle. Il s'appuie sur de nouvelles données scientifiques, du Big Bang notamment, pour envisager ensuite les questions philosophiques engendrées par l'existence. Il s'amène ainsi à analyser les éléments qui composent la vie, dans une suite de chapitre thématiques, comme la vie et la mort, notamment, mais aussi la liberté, le plaisir, le bonheur, la beauté, notamment.
C'est dans cette suite de monographies thématiques que l'apport essentiel est apporté ici, car ses considérations sur la création, l'existence ou non de Dieu, de quelque chose ou non après la mort, restent fort générales, bien qu'intéressantes. Cet ouvrage sert de mini-manuel philosophique qui permet de se poser les bonnes interrogations et invite à les approfondir, afin de se forger ses réflexions sur chacune d'elles.

Veneziano - Paris - 47 ans - 4 janvier 2020


Un bijou dans le genre ! 9 étoiles

« Nous ignorons d’où nous venons, nous ignorons où nous allons. Nous sommes tous des égarés ».
Le dernier livre – en date – de Jean d’O. Comme presqu’à chaque fois, l’on ressort de la lecture de ces 120 pages, un peu plus éclairé …
J’aurais sacrément bien voulu lire ce genre de bouquin du temps où j’étais ado ou même il y a 20 ans à peine … Heureusement, il n’est jamais trop tard …
Un petit bijou dans le genre, en 29 chapitres !

Extraits :

- ( à propos du temps)
De Boileau : « Le moment où je parle est déjà loin de moi ».
Et Ronsard : « Le temps s’en va, le temps s’en va, ma dame. Las ! Le temps non, mais nous nous en allons.

- La souffrance, qui est le prix à payer pour la vie, introduit dans le monde l’inquiétude et l’effroi.

- « Si Dieu existe, nous dit Woody Allen, j’espère qu’il a une bonne excuse. »

- Mais, au lieu de considérer le mal comme la rupture scandaleuse d’un ordre universel dominé pour le bien, peut-être devrions-nous inverser la perspective. Et voir le bien comme une exception lumineuse dans un monde où règne le mal.

- Toute vie est guettée par deux malédictions. L’une est souvent tournée par des malins, par des chanceux, des escrocs, des génies ou des idiots : le travail. L’autre est universel, catégorique et implacable : la mort.

- Il y a pire encore que les imbéciles qui croient au progrès : ce sont les imbéciles qui n’y croient pas.

- Dieu est invraisemblable. Mais il n’est pas plus invraisemblable que cet univers qui nous paraît si évident et qui n’en finit pas de me remplir de stupeur et d’admiration. Tout est mystérieux autour de nous, à commencer par cet espace (…)

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En bonus, deux interviews :
Ici :

https://www.youtube.com/watch?v=QlGiP0mMC0k

et là :

https://fr.yahstar.com/onpc-f2/video/…

Catinus - Liège - 73 ans - 30 octobre 2016