L'Homme qui voyait à travers les visages
de Éric-Emmanuel Schmitt

critiqué par Ddh, le 18 octobre 2016
(Mouscron - 83 ans)


La note:  étoiles
Invraisemblance vraisemblable
Un homme hors du commun : il voit les fantômes qui hantent les vivants !
Eric-Emmanuel Schmitt, agrégé de philosophie, cela se subodore à la lecture de son dernier roman. Mais son imagination surdimensionnée étincelle et ravit le lecteur.
Augustin Trolliet, le narrateur est un personnage hors normes. De par son nom : dans Trolliet, il y a « Troll », que chacun peut se représenter, et Augustin, d'après son sain nom, n'est-il-pas celui qui a conversé avec Dieu ? Sa vie frise l'enfer : SDF, il effectue un stage de journaliste non rémunéré avec un chef qui l'humilie. Il assiste fortuitement à un attentat terroriste où il est blessé. Son don de double vue le poursuit également ; ce qui intrigue Eric-Emmanuel Schmitt qu'il rencontre. Tous ceux qui l'entourent semblent vivre dans l'irréel.
Eric-Emmanuel Schmitt surprend une fois de plus le lecteur. Ici, il donne carrément dans le surréalisme tout en gardant ses allures philosophiques. Homme de notre temps, il aborde la problématique de la violence et de la religion. Et les pages défilent sans que l'intérêt s'estompe ; de nouveaux éléments apparaissant.
Tentative ratée de mêler suspense, philosophie et religion 6 étoiles

Personnage improbable que cet Augustin qui accepte un stage non payé dans un journal tout en vivant dans un squat et ne mangeant pas à sa faim. Son enfance et son adolescence ballotées n’ont pas privé cet orphelin chétif de sensibilité, bien au contraire : outre sa sensibilité littéraire (qui le fait admirer EE Schmitt) il a la capacité de voir les morts, ces âmes de défunts qui nous sont attachés. Témoin d’un attentat suicide, le voici embarqué dans une enquête surréaliste, puis une tentative maladroite et absurde pour empêcher un nouvel attentat.
On pourra rendre hommage à EE Schmitt pour sa défense du divin. Pour le reste :
- l’histoire ne tient pas vraiment la route même en version surréaliste ;
- ses réflexions sur la mort, Dieu, le terrorisme s’empêtrent dans les lieux communs bien-pensants et convenus ;
- l’auto-panégyrique que fait l’auteur de lui-même à travers un portrait trop flatteur montre qu’il a une haute opinion de lui-même ce qui le descend dans mon estime ;
- le terrorisme islamique me fait trop mal pour que je puisse supporter cette exploitation maladroite des drames récents et le jeu d’Augustin avec Momo.

Romur - Viroflay - 51 ans - 6 octobre 2019


Un sentiment mêlé 7 étoiles

J'ai apprécié la partie où cet apprenti-journaliste arrivait à percevoir les morts, tentait du donner du sens au rapport tissé avec eux. Je me suis plus dubitatif sur la conversation avec Dieu, suite à une consommation de stupéfiants, bien qu'elle incite à une réflexion métaphysique sur son existence, la religion, les doutes humains et les manières de les traiter. J'ai été amusé par le fait que l'auteur fasse de lui-même un personnage secondaire de ce roman et qu'il imagine la réaction d'une proche sur ce livre en 2060. J'ai été davantage sceptique sur la description de cet Européen paumé qui a finalement décidé, par faiblesse, de basculer dans le terrorisme radical, en simulant à autre ses mauvais penchants. Cela aurait probablement justifié un roman à part. Ici, cet athée dévie par manque de repères et par l'une des pires solutions de facilité, thème qui n'est pas vain à traiter.
La somme de ces éléments montre l'instabilité du protagoniste, dont un aspect reste séduisant, par ses interrogations sur la mort, son rapport et l'existence de Dieu. Il est avancé ici une explication parmi d'autres, avec ce qu'elle a de dérangeant. Il en reste que ce roman ne paraît pas très agréable à lire et qu'il mêle en assez peu de pages beaucoup de thèmes lourds de sens et d'interrogations. Il m'a quelque peu déstabilisé.

Veneziano - Paris - 47 ans - 28 avril 2018


Roman-essai 9 étoiles

Augustin Trolliet est stagiaire non-rémunéré dans un journal à Charleroi. Sa particularité est qu'il voit les morts qui nous accompagnent. Il est un jour le témoin d'un attentat terroriste et suscite par conséquent tout d'un coup l'intérêt de son patron qui méprise tout le monde. Soudain, cet orphelin SDF devient intéressant aux yeux de tous : le policier Terletti, la juge Poitrenot, …
Eric-Emmanuel Schmitt réussit à faire un essai dans un roman. En se mettant en scène - original ! -, il nous livre sa pensée sur la foi et la violence, après avoir laissé s'exprimer d'autres personnages qui ne pensent pas comme lui. Il tente de démontrer que la violence est uniquement due à l'ignorance et à des êtres en mal de certitudes bien tranchées. La manière dont Eric-Emmanuel Schmitt se décrit est savoureuse. Par contre, son interview de Dieu m'a laissée sur ma faim : si je rencontrais Dieu, je ne lui poserais pas du tout les mêmes questions, mais ça fait du bien de lire un auteur qui défend Dieu, que peu de personnes défendent, et qui a visiblement étudié à fond ces questions.

Pascale Ew. - - 57 ans - 28 novembre 2016