Carnet d'un petit revuiste de poche de Jacques Morin, Claudine Goux (Dessin)
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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De la revue !
Jacques Morin, comme cela lui arrive parfois, est passé de l’autre côté de la page, son nom n’est caché ni au début ni à la fin de ce tout petit recueil, il figure en gros caractères à la une, à la place habituellement réservée aux auteurs, tout cela est parfaitement normal puisque c’est bien lui qui a écrit les textes qui figurent dans ce recueil. Une façon de dire qu’il sait lui aussi écrire des textes de qualité, qu’il n’est pas seulement un intermédiaire entre les auteurs et les lecteurs, qu’il est lui aussi un écrivain au sens le plus plein du terme.
Et si Morin prend la plume ce n’est pas seulement pour dire que le métier de revuiste est un métier ingrat, aussi méconnu que le terme qui le désigne, un métier exigeant, à chaque numéro l’aventure recommence avec les mêmes incertitudes et les mêmes contraintes calendaires, un métier de passionné qui digère des piles de livres, de recueils, de revues, un métier de kamikaze qui risque à chaque numéro de se faire incendier par des lecteurs ne partageant pas ses avis, par des auteurs s’estimant trop peu soutenus, par d’autres auteurs non retenus pour la publication, blessés au plus profond de l’égo qui leur sert souvent de talent. Non, je ne crois pas que c’est pour se plaindre que Morin a écrit ce petit recueil, je crois que c’est pour allumer un signal d’alarme, pour informer la communauté des auteurs que la revue, la sienne, l’excellente publication « Décharge » qui déniche les meilleurs poètes, pourrait un jour disparaître avec lui. « Il se demande comment elle fera sans son dévouement exclusif ». Ca ressemble à un appel à l’aide, un hameçon lancé pour pêcher celui qui aura la même passion que lui et qui fera vivre encore la revue et ceux qui y publient leurs œuvres.
On pourrait croire que Morin est peu désabusé, insuffisamment reconnu, un peu aigri de ne pas avoir, comme un éditeur courtisé, son « écurie » d’écrivains. Non, je crois que Morin est seulement un passionné de lecture, « Lire et parler d’un recueil lui donne grande satisfaction », un passionné qui entre dans l’intimité des auteurs après avoir lu seulement quelques lignes de leur plume. C’est un jouisseur qui voudrait partager sa passion, comme je le fais moi-même en lisant ses lignes et en laissant ces quelques mots sur leur auteur. Je ne voudrais tenter aucune comparaison, je ne suis pas à la hauteur, je voudrais seulement dire que je connais le frisson de l’amoureux des livres qui découvre encore un livre de plus dans sa boîte aux lettres, un livre de plus à mettre en haut de la pile déjà chancelante, un livre de plus à glisser dans un petit trou du programme de lecture, un livre à lire dans le train, dans la salle d‘attente chez le médecin, dans un bar, … partout où il est possible de grappiller un peu de temps.
Que Jacques Morin se rassure, le revuiste est un maillon essentiel de la chaîne du livre, c’est un naisseur, c’est très souvent lui qui, le tout premier, voit l’auteur inconnu avec son petit poème, son petit texte, l’auteur qui un jour sera célèbre. Combien de grands écrivains ont commencé par livrer leurs premiers essais à un journal ou une revue ? Tous ou presque ! Un jour Thierry Radière m’a dit que j’étais un passeur de textes, j’aimerais bien, les vrais passeurs de textes sont les revuistes comme Jacques Morin qui, à chaque publication, remettent sur le métier de nouveaux textes révélant de nouveaux auteurs.
Les éditions
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Carnet d'un petit revuiste de poche
de Morin, Jacques Goux, Claudine (Illustrateur)
Les carnets du dessert de lune / Collection Pousse-café
ISBN : 9782930607658 ; 5,00 € ; 10/10/2016 ; 22 p. ; Broché
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